Tout d’abord précisons que nous avons découvert le portail des libraires indépendants placedeslibraires.fr, grâce à François Bon sur le tiers-livre qui est impliqué dans la phase de béta-test, puis du site de La Feuille. Cela pour rappeler à quel point, ces deux sites sont incontournables par rapport aux mutations du plan littéraire, mettant en lumière souvent des possibilités ou des problèmes que de nombreux acteurs de la sphère littéraire française ignorent ou ne voient pas. Le portail de La place des libraires est une plate-forme réunissant des libraires indépendants français, développant des outils web (widgets) marketing liés aux livres. En ce sens, alors que nous avons déjà la plateforme de Amazon et de ses widgets, ou bien de la Fnac, une nouvelle plate-forme apparaît. Libr-critique a décidé de soutenir activement cette initiative.

1/ La vente en ligne, donc liée à internet, selon les rapports de 2006 a eu une progression de 40 %, les ventes de certaines maisons d’édition sur internet atteignant jusqu’à 10 % (PUF, La Découverte, Dunod). Le phénomène du commerce en ligne, s’il a été la cause de l’éclatement de la première bulle internet au début du XXIème siècle, toutefois, a pris une consistance irrémédiable, la consommation en ligne devenant de plus en plus banal, permettant, en quelque sorte une form d’autonomie plus importante dans le choix, pour l’acheteur.

2/ Face à un tel phénomène, comme cela a été rappelé lors des assises d’octobre à la SGDL sur le livre à l’ère numérique, où François Bon et moi-même intervenions, on peut constater une forme de fragilisation de la fonction du libraire, notamment, je crois, au niveau des villes moyennes de Province. Sans doute moins marquée au niveau des grands pôles urbains comme Paris, ou Bordeaux, Toulouse, du fait de la concentration d’une population davantage lectrice et de l’implantation de pôles universitaires d’importance.

3/ Les librarires indépendants jusqu’à présent sont éparpillés sur la toile en sites indépendants (s’ils y sont présents), et totalement invisibles face aux pôles numériques aussi bien de la FNAC que d’Amazon, qui sont à définir cependant différemment. La FNAC n’est pas Amazon, au sens où la FNAC n’est pas seulement une librairie en ligne, mais elle est aussi une librairie réelle, de centre ville (au même titre que Privat-Brunet ou le Furet), qui peut avoir selon les libraires concernés, une réelle pertinence (rappelons l’accueil exceptionnel qui était fait à la FNAC des halles à Paris pour la poésie). Amazon, tout à l’inverse n’est qu’une librairie en ligne, en fait une forme de diffuseur virtuel, faisant la médiation entre la maison d’édition et de l’autre l’acheteur. Amazon en ce sens se substitue au libraire traditionnel, vient le concurencer totalement. La Fnac, redouble son travail de librairie traditionnelle par la médiation du web. Toutefois la FNAC n’est pas un réel libraire indépendant, elle dépend de norme commerciale et d’une logique de profit beaucoup plus accentuée que le libraire indépendant.

4/ Il est évident que les librairies traditionnelles, face à une telle concurence (par exemple les défis de rapidité de livraison, etc…, le fait de pouvoir avoir accès directement aux titres et à sa plus ou moins grande disponibilité) ne peuvent qu’être dans un devenir imperceptible, décliner comme le font un certain nombre, ou encore se reconvertir, comme on le constate aux Etats-Unis (de nomreuses librairies indépendantes se sont ouvertes à d’autres formes de service, allant du club de rencontre jusqu’au fast-food).

5/ C’est pour cela que le portail placedeslibraires.fr est important comme initiative, il réunit une diversité de libraires indépendants sur un même site, et fournit aux internautes et aux webmasters des outils spécifiques permettant de créer un réel marketing autour du livre. Ce portail n’en est qu’à sa version béta, au tout début de son développement. Peu de libraires sont affiliés encore, les outils sont expérimentés et la gamme de ceux-ci sans doute pas complète. Ce portail ne pourra réussir, que si tout à la fois a/ les libraires indépendants sont convaincus de l’intérêt de s’unir en un seul et unique portail donnant accès aussi bien à leur stock réel en librairie (fonction locale : je regarde de chez moi si le libraire a le livre et j’y vais) qu’à la possibilité de commander en ligne, qu’à la possibilité de trouver des livres qui ne sont pas intégrés dans le circuit traditionnel des librairies numériques (les petites éditions comme Le Quartanier, Le dernier Télégramme, Le clou dans le fer, IKKO, Hermaphrodites, etc) b/ les petits éditeurs travaillent en relation avec les libraires représentés sur ce portail (se mettant en relation d’une manière privilégiée avec les librairies représentées dans le portail); c/ si les lecteurs, notamment ceux qui prétendent défendre le livre de qualité, privilégie ce portail à toutes les autres offres des librairies numériques purement commerciales, telle Amazon.

6/ Vous pouvez déjà voir dans la barre de menu, un widget et un lien qui mène à une page autonome où sont mis en évidence les derniers livres chroniqués. Les livres de bernard Desportes et Annie Ernaux sur lesquels nous faisons depuis septembre des dossiers, les livres que nous avons beaucoup apprécié.

7/ Cette phase Béta s’achèvera par le lancement officiel pour la rentrée de septembre 2008