Cyril Huot, Secret, le silence, éditions Tinbad, novembre 2017, 154 pages, 18 €, ISBN : 979-10-96415-08-3.
Le héros de Secret, le silence est l’être qui rêve de fusion quoique sachant, dès le départ, la vanité de sa quête puisqu’il porte en lui la mort. Celle qu’on se donne et celle qui nous est donnée. Il n’y a donc pas d’issue. Ni pour lui ni pour l’aimée, l’autosacrifiée à la fois masochiste et sainte, sainte parce que masochiste.
L’expérience amoureuse devient un événement d’une certaine manière non vécu puisqu’elle remet en jeu la présence de la présence. Tout se passe comme étant déjà dépassé dans l’excès et le vide. D’une certaine manière de l’expérience fusionnelle ne sera perçu que son éblouissement noir. Ne restent que cet éclat et son retentissement délétère. Il brise un langage « sans entente » (Blanchot) et ne peut finir que dans le silence de mort où tout avait commencé.
L’incandescence de la passion, son expérience limite ne sont de fait que la marque de l’exclusion. Joie ou douleur : les deux protagonistes cherchent à n’en garder que l’intensité – la plus haute comme la plus basse. Mais l’amour est confronté à ce qui devient par la sidération même un vide sidéral.
Le grand désir, le plus âpre est finalement plus religieux qu’orgasmique, moins cosmique que panique. Tout fait retour à une intensité nocturne, au silence sans nom. La fusion qui appelle le hors de soi ne peut ramener qu’au désastre signe de l’approche très approximative de ce qui était désiré.
En dépit de la sollicitude masochiste de l’aimée, la nuit dernière rejoint la première. Là où même si les êtres ne dorment pas, ils demeurent exposés au sommeil le plus profond. Ce qui n’empêche pas d’entendre l’autre, le sujet d’une telle veille plus ou moins agissante mais aussi son vide.
Huot donne donc à lire une expérience limite et hystérique. Celle qui retire toute autorité aux épris. Ils ne seront rien et à jamais. Pour personne. Pour personne d’autre qu’eux. A l’exception peut-être de Dieu. Si l’on en croit l’histoire d’où le livre est tiré : celle d’une femme morte à 25 ans des affres de l’amour et que la religion canonisa. En guise de modèle. Ou pas.
Très beau titre à ce texte ! (Et très bon texte, il va sans dire…)