La Revue Internationale des Livres et des Idées, n° 11 : "Feu sur l’université", mai-juin 2009, 26 x 36 cm, 60 pages, 5 €.
Décidément "inclassable", comme on dit, cette revue faisant fi des frontières entre les cultures comme entre actuel et inactuel (certains articles vont jusqu’à reposer sur des ouvrages parus entre 2001 et 2006 !)…
Cette dernière livraison se concentre sur l’offensive internationale de l’idéologie néolibérale contre l’un des derniers bastions de résistance : l’université, ses chercheurs, intellectuels, enseignants et étudiants. Grâce à une stratégie aussi insidieuse qu’efficace, en ce domaine comme dans tous les autres, l’économique entend triompher. Se référant à un livre de Christopher Newfield paru l’année dernière (Unmaking the Public University), Yves Citton montre que la France reproduit vingt ans après l’erreur d’un état comme la Californie : la réduction des crédits alloués à l’éducation et l’enseignement au profit des dépenses sécuritaires… Sa déconstruction du démontage de l’université est des plus probantes, rappelant toutes les étapes du processus :
1. "l’étranglement comptable" ou l’annexion par la sphère économique de l’espace de production des savoirs (et comment oser se positionner contre la "transparence" et la "responsabilité" budgétaires ?) ; 2. augmentation des vacataires et diminution des titulaires ; 3. la rentabilisation de l’enseignement par augmentation des effectifs ; 4. "mobiliser la capacité de travail des universitaires dans la rédaction de rapports administratifs chargés de justifier le travail qu’ils ont de moins en moins le temps d’accomplir effectivement" ; 5. faire prévaloir la professionnalisation sur l’éducation ; 6. privilégier les disciplines rentables (les sciences "dures" plutôt que les sciences humaines)…
Dans "Flux", Philippe Boisnard traite à sa façon un autre aspect de la mondialisation, mettant en évidence la collusion entre argent et abstraction dans un univers où les flux humains sont réduits à de simples transactions. Plus spécifiquement, il nous offre un schéma cognitif dans lequel les énoncés – qui peuvent parfois apparaître comme des tautologies, voire des truismes – n’existent que dans la logique même du flux, c’est-à-dire des interrelations, non pas infinies mais multiples, que ne peut manquer d’opérer l’esprit de chaque déchiffreur.