Toujours aussi GéoGrave, celui dont il faut relire le texte sur les SIF (Sans Identité Fixe) vous souhaite un joyeux No-fiel…
pars, cours/profil du type-hic/tragi-comédie brusselo-européenne/typologie barbaro-clownesque
tu passes tout simplement très simplement si simplement par la case rue, quand t’as pas de case t’es casé vite fait, bouche-à-merde, bouche du coin de la rue, grinçante et folle tordue, la case rue, la rue case casse fracasse, fracas-ce, ce fracas qu’on entend quand ton corps glauque se brise sur le bitume, mais seulement à Joyeux No-fiel
avant la rue quelle case ? les balochards de cabinets, raclures ! te casent via des hypothèses infondées dans des cases des typologies disent-ils, toi plutôt le type sans-logis, original, sans-abri, sans-domicile, attention les yeux : « VIVANT DANS LA RUE EN HEBERGEMENT D’URGENCE EN FOYER D’HEBERGEMENT POUR PERSONNES SANS DOMICILE EN FOYER D’HEBERGEMENT POUR FEMMES EN HEBERGEMENT POUR IMMIGRES SORTANT D’INSTITUTIONS BENEFICIAIRES D’UN ACCOMPAGNEMENT A PLUS OU MOINS LONG TERME EN HABITAT PRECAIRE MENACEES D’EXPULSION MENACEES DE VIOLENCES DOMESTIQUES VIVANT DANS DES STRUCTURES PROVISOIRES NON CONVENTIONNELLES EN LOGEMENT INDIGNE VIVANT DANS DES CONDITIONS DE SURPEUPLEMENT SEVERE », attention fais pas chier ta merde t’es comme on te dit parce qu’ils l’ont dit, bouche-à-merde, des grilles d’analystes triés sur le volet qui se ferme bien vite à la vue de la mis-erre, pondent des rapports merdachiottes illisibles et gerbichieux, et voilà casé, t’es pas heureux bouche-à-merde, toi qui n’avait justement pas de case ?
passé par la case rue, reste-z-y et ne prends pas vingt mille balles et les Champs-Elysées t’y passeras juste pour chier une caisse entre deux caisses des putes à la Miss Rance
roule le dé, après la case rue, la case hébergement d’urgence, ou pas ou pas ou pas, des berges d’urgence des voies sur berge pour planquer son pieu, une poignée de corniauds incultes tournent dans des camionnettes viennent ramasser ta gueule, bouche-à-merde, et t’es toujours pas content Boudu ? tu t’fous vraiment du monde, tu refuses de bouger tes escarres et d’asseoir tes furoncles sur le simili-cuir du siège du panier à salades maquillé en panier à sauver les savoureux errants, bien entouré par une semi-pute fausse infirmière et un assisté sot-chiale, bordel tu chies pas de l’or en barre mon pote, pour une fois fais un nom de Dieu d’effort, tu bois ton café lyophilisé et what else ? tu prends la couvrante de survie, ou tu montes et si tu restes dehors commence pas à crever pendant cette pute de nuit glacée, tu seras casé en refus de demande, et le journachieux salivant du jour suivant ou du moment même pourra placer ses mots merdachieux sur ton cas « nous apprenons qu’un sdf est mort de froid la nuit dernière »
ouf, case hébergement d’urgence, pas d’urgence à accueillir proprement en tous cas, une usine à débris tox alcoolos prostiputes and co, puant pissant chiant, quelques paumés du jour, t’as vu l’AS-SS ? le maton du social matant la toquante signalant la quille de ce merdeux boulot à la manque, c’est joli cette matraque-trique invisible mais tu la sens tout de même au bout d’ta trique, nervi nerveux
bon, résumons pour les vestes bleues qui n’ont pas compris, synthétisons le parcours de la fiente humaine, continuum de soins, ouârf ouârf ouârf, l’escalier de la misère marche après marche, t’en loupes une c’est la potence t’en passes une c’est la pitié-charité, l’oseille des assoc’ c’est du beurre de charité
finalement, bout du bout de l’exclusion pardon inclusion dans ton fion, t’arrives où si t’as gagné au jeu, devant la lourde de ton logement fixe, seul tout seul tout tout seul, sans domicile fixe la solitude c’est ta fixité fixé à la solitude, donc devant la porte blanche qui te rappelle l’asile de nuit, et t’es tracassé parce que dix piges sans clés dans la poche forcément t’es plus habitué, et celles-là les neuves de ta neuve vie tu les as laissées quelque part et tu t’en cognes, bien un cogne qui les retrouvera, car finalement tout est allé beaucoup trop vite, t’as sauté des marches mon bonhomme, alors que tu sais pertinemment que les voix dans ton plouc de crâne tu les entends et la bibine tu la lâches pas et le bitume te colle au fion, et t’es pas prêt vraiment pas prêt pas prêt pas prêt, tu le seras jamais, trop tôt trop tard pour les quat’murs le toit, face à toit, même c’est pas brillant mais les étoiles brillent pas sous ce toit, et tu préfères celles de la rue et pourtant bourré tu les confonds avec les réverbères, tu laisses ta place à un aut’ zigue tu passes ton tour, un autre qui pourra fermer sa bouche-à-merde et Amen à toute cette salade politico-merchiatique, où la rose pue la merde et la rose et tendre populace votant pour elle est ravie, c’est No-fiel c’est chiestif à l’heure de l’apé-rot, puis entre deux coups de jaja et un bout de foie gras pas cyrrhosé celui-là, quelques heures de bénévolat, ce sera l’heure de Claire Chiale-Zal, l’annonce de la mort d’un sdf qui refusait toute aide malgré son processus de réinserFion
dans deux heures tout le monde se rendormira – Jésus dans la crèche
Paris, le 20/11/2012
Mon cher Pierre,
Tu me demandes ce que je pense de la poésie française contemporaine et c’est assez difficile de répondre brièvement : autant vider un océan avec une petite cuillère. Et puis c’est une question en apparence assez polémique dans laquelle il est difficile de rester neutre et de ne pas prendre parti. Je
te dirais que le poète français contemporain doit faire face à deux périls : d’une part l’État, d’autre part le Marché. La pseudo-poésie actuellement mis en valeur par les médias de masse et institutionnels est donc de deux types : pseudo-poésie de Marché et pseudo-poésie d’État. La pseudo-poésie de Marché s’adresse au grand public. On la trouve dans les best-sellers, les films à grand spectacle, les jeux vidéos, les ouvrages de développement personnel et d’ésotérisme, la chansonnette de hit-parade, la publicité. Son but est de procurer un divertissement, une évasion de la routine du réel qui soit accessible à tous pour un coût modique et se perpétue en pseudo-besoins. : magie ; effets spéciaux ; prestidigitation ; rêve en promotion ; pseudo-beauté kitsch ; industrie du divertissement ; consumérisme ; produits dérivés …La pseudo-poésie d’État s’adresse à un public plus restreint et élitaire. Financée et mise en place par l’État, son but est de procurer un sentiment d’appartenance à une caste privilégiée, présumée dotée d’une compréhension plus exacte de la réalité et motivée par un désir de pseudo-révolte. On peut donc la comparer à ce qu’Althusser appelait : Appareil Idéologique d’État. : réalisme socialiste des années 40 ; gloire du Prolétariat ; dégénérescence du marxisme en folklore pour bobos branchés ;
carnavalesque festif pour homo-festivus … L’erreur serait de considérer que ces deux types de poésie sont antagonistes et cherchent mutuellement à se détruire, car tel les marionnettes de Guignol et Gnafron dans les théâtres pour enfants, les deux tendances se complètent mutuellement et trouvent leur raison d’être dans la continuation d’un spectacle de domination et de désinformation qui ne pourrait pas fonctionner sans les deux protagonistes. C’est ce que Debord appelait : Spectaculaire Intégré Difficile donc, quand on prétend aimer la poésie à notre époque, de ne pas tomber dans les pièges
du consumérisme d’une part, de la pseudo révolte institutionnelle d’État d’autre part. Je crois qu’internet pourrait ouvrir des perspectives intéressantes et permettre au poète de faire connaître son travail à une échelle modeste, tout en gardant son indépendance. Voilà, Pierre, excuse moi pour ces quelques notes un peu brouillonnes jetées à la va vite : cela demanderait à être argumenté et étayé d’exemples, mais je laisse à chacun le soin de relier ces remarques à son expérience de la présence de la poésie dans la société actuelle.
Amicalement
Denis