La parution en juin de Vrac conversations (Editions de l’Attente), Métiers de bouche, ijkl (Ink), sans oublier ses contributions à la revue Aka et à divers sites, marque le lancement du grand dossier consacré à celle qui est tombée en langues de guingois – vlang ! Jusqu’à l’automne prochain, seront publiés une notice biobliographique, des analyses sur l’œuvre et, par fragments, un long inédit dont le titre commence par A.R.N. (Agencement Répétitif Névralgique) pour offrir un clin d’œil à l’auteur de cette appellation (Fabrice Thumerel).
Elle dit sables mouvants elle dit poussière de foin, elle dit blatte dans la soupe, elle dit on ne peut pas me séparer de la vie elle insiste, brutale, si, il faut attaquer la poésie, revenir reviens, un adversaire mon vieux, ravisseur de miettes, ramasseur il y a du reste, cadavre, fatum à bras le corps la chose est dite, elle dit bravo, ne ménagerai mes points de fuite
Elle dit ça grouille couleuvres, à l’oeuvre la faim, trop dur cette année 75% du foie gras c’est l’année vendue à Noël tout le monde dit c’est dur cette année non pas de cadeaux on ira juste aux sports d’hiver, elle dit ah oui elle dit non il y aurait à s’expliquer terriblement avec et ceux qui ont ce qu’on dit la faim et du goût des fois elle dit le réel c’est parfois quand je dis ça et vous que non c’est horreur que ça ne se discute pas, Noël
Elle dit pas, de votre monde qui a peur pas, des mots qui oppose à tout ce qui fait peur l’alibi mot coupable, assez de ces gros mots on lui dit quand elle dit ne peut faire semblant certains mots sont des actes, assez vous retrancher derrière les mots louvoyer, abominable veut dire qui ne peut pas avoir de nom, je ne suis pas, pas d’envie ne, je ne me, ça ira ira ça, ne console pas, ne si je, profondément dans les détails ne sais que, et que rien, rien, rien, rien, limons, rien, rien, sauf la scansion poétique qui défamiliarise, cœur craque dire, simplement rien, mais cela suffit, c’est bien contre dires du monde qui n’entend pas, elle dit non je ne sais rien, gare gaffe, je suis passée au langage
Elle dit les mots secouent peur en ses promesses elle dit l’autre c’est peut-être la langue rêve que je pourrais parler, libre c’est toujours de haute lutte, d’allant elle dit ou la mort c’est encore trop pour moi, elle dit la grammaire un champagne, du gaz carbonique, respire elle dit respire, ce n’est pas un caprice, ça des bulles sur ce noué sur ce qui, veut dire ne dit pas elle dit, pas, quel narrateur, en ses métamorphoses, quel narrateur pour la grammaire la mort est un verbe malmené, défectif, oui et non ça discute et c’est encore trop pour moi, et ce n’est pas, pas assez
Elle dit n’imagine pas ce qu’un corps peut avaler cracher lâcher c’est bien aussi un corps ce qu’il apprend après vivre, peut se mutiler, est-ce être, suer, vomir, ne pas contre l’amertume rire à, pas, contre l’assentiment, pas, bouger, c’est bien aussi, se lever seule elle dit, allez paquet saignant et elle dit Aristote est le premier, quelque peu barbare, à s’intéresser aux animaux elle dit le monde tant impétueux elle dit je suis morte pendant plus de 800 pages ne m’en soucie caetera crans crincrin et parfois spasmes, je ne sais pas mon présent elle dit, son propre mouvement est sa source
Elle dit ce mot j’ai pensé d’autres mots rêvé par ce mot qui corbeau dormi ce mot sac cauchemar par jours sans le jour sans ni lumière qu’artificielle la vie à sonde à quoi se nourrir de ce mot me suis réveillée, d’intraveines et confusions, remous, abattoirs, ma faiblesse, garrot, l’abîme alors d’accord, tout tant trop, de tout le monde, pas qu’un peu crâne ce mal alors d’accord, mais que fatigue mourir, comment en français vraiment il n’y aurait pas d’adjectif pour dire qui ne pleure pas
Toujours grand plaisir à découvrir un texte de Claude Favre, qui résonne longtemps toujours après lecture.
Bravo et merci.
Merci.
Fameux! N’avais plus lu de Claude Favre depuis quelques mois. Nécessaire
Bonjour Philou, un mal nécessaire 🙂
Bien à toi et itou