Le samedi 28 avril, à Mouscron, en Belgique, petite ville à la frontière, s’est tenue une drôle de soirée joyeusement dadaïste au 28, rue du Chemin de fer, havre de folie et de création des éditions l’Âne qui butine, dirigées par Anne Letoré et Christoph Bruneel. L’une française, travaillant dans le papier, et l’autre flamand, relieur de profession, mais aussi poète, dessinateur, peintre, performer, ils éditent de trés beaux livres d’art et de littérature, inventent des livres-objets, à tirages limités mais à l’imagination sans limites, et ils organisent régulièrement des expositions et des lectures chez eux lors de soirées à la fantaisie débridée et chaleureuse comme seuls les Belges savent le faire (et aussi les gens du Nord contaminés par la belgitude).
Le samedi 28 avril à Mouscron, chez l’Âne qui butine, la Duvel et l’Orval ont coulé à flot, dans une chaleur torride pour la Wallonie (28 degré fin avril!), le soleil faisait rougeoyer la brique rouge, les fleurs étaient de toutes les couleurs, et le buffet était « orange et plastique » car la soirée était sous le signe de Frank Valdor, crooneur disco des années 1960, qui a sorti 200 vinyles en 8 ans. Une grande partie de ces vinyles a été retrouvée par Anne et Christoph, chineurs redoutables, chez un disquaire d’occasion flamand. Sauvant ces pépites des années 60 d’une destruction certaine et de l’oubli, ils décidèrent de rendre hommage à un tel chanteur en plaçant le vernissage de l’exposition de dessins faits à quatre mains par Christoph Bruneel et Bruno Groensteen sous ses auspices.
Le samedi 28 avril à Mouscron, chez l’Âne qui butine, chaque invité à la soirée est donc entré dans la maison, annoncé par Peter Arthur Caesens, le crieur de Courtrai, et sa cloche, avec un objet que Franck Valdor aurait aimé. Après avoir bu une bière fraîche et mangé un hot-dog, chaque invité a pu découvrir les dessins de Christoph Bruneel et Bruno Groensteen, exposés sous les yeux attentifs du crocodile, du tapir, du lapin et des grenouilles empaillés. Christoph Bruneel et Peter Arthur Caesens lurent ensuite un poème écrit par Christoph en l’honneur de Frank Valdor, poème sonore en quatre langues dans ligne directe de Dada et Schwitters.
Le samedi 28 avril à Mouscron, chez l’Âne qui butine, il y avait des Français, des Flamands et des Wallons, il y avait des poètes qui écrivent en français, en flamand, en anglais et en allemand, il y avait un crieur qui annonçait la création de l’Eurodistrict, zone transfrontalière entre la France et la Belgique où l’on pourrait parler la ou les langue(s) que l’on veut,… il est très rare en Belgique (hormis à Bruxelles, mais les Belges vont diront que Bruxelles n’est pas la Belgique) de trouver des lieux où se mélangent les langues, où se mêlent flamands et wallons, où s’écrit une autre langue que celle des nations, des régions, des « peuples »… Ce soir là, en France, on était entre les deux tours, et en Belgique, on était bien, il faisait chaud, il y avait de la bière dorée et beaucoup de rires, de la simplicité et plein de délires, et de la poésie vivante.
Français, à l’heure qu’il est, vive les Belges, vive l’Eurodisctrict et fuck la République !
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