Mathieu Riboulet, Nous campons sur les rives. Lagrasse, 7-11 août 2017, Verdier, 48 pages, 3 €, mai 2018.
Pour Mathieu Riboulet le lieu n’est pas le lieu, l’ici peut donc être en là-bas. D’où ce tableau implicite qui fait le jeu de la rumeur et de la vérité, de la fiction et de la réalité.
Loin des formes traditionnelles l’écriture est toute en intensité fondée sur des fractures spatio-temporelles où l’économie générale du texte devient polyphonique et l’espace ouvert.
Paysages, personnages et la voix elle-même semblent naviguer sans boussole dans un espace en dérive. L’œuvre demeure énigmatique là où l’écriture se veut une reconstitution verbale d’une force de déchirure.
Se crée une sorte de distance que la négation initie. Le lieu n’est refermé ni par des portes ni des impasses. L’écriture multiplie les points de fuite et d’achoppement. La langue devient panique et folie et où le lieu est un mot qui n’est plus vraiment un mot.
Toute l’écriture passe ainsi de l’énergie à l’épuisement, de l’illusion au désenchantement dans l’éclatement des repères. Ceux-ci deviennent d’un genre inopérant.
Dans ce but Riboulet écrit avec des mots qui bougent comme les lieux. Il crée à la manière d’une araignée qui perdrait le fil qu’elle tire et qui ne peut établir une toile.
Le texte est un corps d’encre qui fourmille de mille « pâtes ». Et pour cela quelques mots suffisent. Ils se veulent formateurs non d’un lieu de couplage mais d’un tandem inattendu, imprévisible.