Avant que ne paraisse le prochain volume de Daniel POZNER (Variable aléatoire, 150 pages environ) – que nos Libr-lecteurs connaissent bien maintenant –, nous avons le plaisir de publier en avant-première les six premiers sizains de la deuxième partie, précédés d’un Avant-propos intitulé "Dés masqués".
Dés masqués
Variable aléatoire ? Une variable aléatoire, au sens des mathématiques probabilistes. Ou peut-être plutôt, variable (adj.), virgule, aléatoire (adj.). Au lecteur de trancher.
Volonté déouvrir les thèmes, non pas abordés ni traités – car une manière souvent plus allusive que discursive, because concision et jeux de langue – mais évoqués. Multiplier les images, lieux, personnages, époques, les angles, les prises de vue. Toutim, tout le toutim ou presque dans de brefs poèmes. Evidemment, espoir déçu, mais la trace reste là, cet éclatement. Obtenu par un jeu de contraintes, procédé de fabrication dont je dirai simplement l’outil principal : un dé (plastique, pas même d’ivoire, traîné avec moi dans ma poche pendant des mois), trois fois lancé (si, si !) pour passer d’un poème au suivant, tout au moins à son squelette – tel mot, en telle position, structure strophique, and so on. (Faudrait lire les poèmes dans l’ordre d’écriture ? Pas possible, tout a valsé. D’ailleurs j’en ai réécrit les 3/4 sans tenir compte des contraintes.) Et le résultat : reprises, échos d’un poème à l’autre, permutations, et mise en valeur aléatoire de tel ou tel motif, diversité donc, toutim.
Jeux de langue, disais-je, désir d’y aller franchement, naïvement – & l’aide du dé toujours pour tordre la syntaxe et (faire) fondre les mots, les syntagmes. Procuste, Jabberwocky, dicos, approx., etc. Ah, le vocabulaire ! Le vioc à bulles d’air ! Bocal, bulleur… Aussi, ménager un peu le lecteur, est-ce contradictoire, ça dépend des jours, lui prendre la main, lui tordre les doigts. Et le prêt des yeux lancés d’un coup de langue sur la table de jeu, sur le monde.
Deuxième partie (six premiers sizains)
Revoilà notre sympatique héros il –
Revoilà notre sympatique héros encore il –
Re.etc.voilà – s’en lasser à la longue peut-être ?
/ Je suis votre poupée de chiffons de conscience, ah
Ah, admirateur creux bouffon des familles conformes aux normes
Acceptez : ah, articule ma bouche vide
Vous dirai tout divulgue renversé
à l’envers à la soupe
à l’envi à l’endort les mots inof-
fensifs chocs perdus en terre
Ment ment à quels morts vivants béats
– En quels croire dang’rires et quels et crocs
Scargot dans ta coquille
Clopin-rampant bave un mot une phrafleuve avant point final
– Le tour des mondes ?
Tire ta radula cette langue-lime
Salades (ne conte pas de, mange)
Mouvelent – tire-toi de la presse !
L’alluvion blanche au coin de
La bouche au bord des vœux
Rien que la pluie que cette bave
Douleur blême liure
Vaine comme on t(r)ire une
Dent de l’eau !
L’ongle de trucmuche
Déjà mordant l’derme la cornée
‘pein’entamée surface
Perte g’livure – fossil’têtu
Pâlir / Stop je relis le dictionnaire :
Trucheur trucider trucmuche truculence
Crache crache espièglerie non !
Est vide l’échoppe !
N’as une once de tête !
N’est malice !
Plaisir de gallinacé décapité !
Courir carotide au vent !