Terminons cette série par une livraison irrésistible… [Lire/voir Projet n° 5]
Projet n° 6
L’USINE D’IVRY SUR SEINE VA DEVENIR UN ÉROS-CENTER MUNICIPAL
Je suis contre. On avait la pollution sous nos fenêtres, on aura le viceà tous les étages. Quel intérêt ? Je ne vois pas le gain. Pour personne. Dans l’affaire, il n’y aura que des perdants. Je pense en particulier aux catholiques asthmatiques (ils sont minoritaires par ici mais il n’y a pas de raison de négliger les groupuscules) ; eh bien, les asthmatiques : une pollution chasse l’autre, etl’indignation aidant, ils ne cesseront pas de suffoquer. Certains, jusqu’à leur dernier souffle. Et pfuit. Ces victimes collatérales échapperont, il est vrai, aux ravages des MST : une maigre consolation. Un soir, après une réunion publique, j’ai eu l’occasion de dire au maire, en aparté, mon opposition à ses projets bordéliques et le sentiment de hontequ’ils m’inspiraient. Il a eu l’air étonné. Tu serais pas catho ? me dit-il. Non : athée intégriste, je réponds. Ça me rassure, dit-il. Et il me récite un interminable blabla sur les bienfaits à son avisdu sexe municipal. Tu comprends, conclut-il, c’en sera enfin fini de la misère sexuelle localemais pas seulement, ça va attirer les Parisiens et aussi les touristes, des millions de touristes ; eh oui, crois-moi, Pigalle, c’est mort ! Suis atterré. Ce maire de choc paraît si sûr de son nouveau credo : prostitution industrielle, certes, maissociale. Pas d’abattage, ni d’heures sup imposées. Un syndicat maison ; CE, tickets-restaurant, 6esemaine de congés payés. Mazette ! Il délire l’élu. Et le client aussiest soigné : tarifs indexés sur le quotient familial ; CB acceptée ; gratuit pour les étudiants, les chômeurs, les seniors. Ah, le bougre ! Il a pensé à tout. Toi, sexuellement, t’en es où ? me lance-t-il in fine. Point mort, j’avoue ; zéro érec. Bien, dit-il. On va recruter des vigiles, ça te dirait ?