Nous publions le second volet du dialogue inédit entre deux écrivains qui comptent dans l’espace littéraire contemporain : la lettre d’Annie Ernaux date de 2006, où elle a accepté de collaborer au colloque que j’organisais (Bernard Desportes autrement, Artois Presses Université, mars 2008 ; voir bibliobs.com) quant à celle de Bernard Desportes, que nous reproduisons in extenso ci-après, elle correspond à son désir ancien d’écrire sur l’oeuvre d’Annie Ernaux.
En marge de cette magnifique lettre, donnons quelques informations qui peuvent intéresser nos weblecteurs : on pourra entendre Bernard Desportes sur FRANCE CULTURE ce Samedi 1er mars à 16H30 dans Jeux d’épreuves (il était annoncé pour le 23/02) et le voir au Salon du livre (stand de FAYARD) le Mardi 18 mars à partir de 18H ; en ce qui concerne Annie Ernaux, on pourra la retrouver dans l’émission littéraire animée par Grégoire Leménager diffusée sur bibliobs.com./FT/
Chère Annie,
On ne sort pas indemne de ce livre magnifique. Dense ample profond multiple dans l’écriture, ce livre lucide est aussi, dans son exigence et sa grande générosité, sans concession aucune. Il donne et nous abandonne, aussi ballotté par le monde que l’est cette femme qui, l’espace d’une vie – un instant ! – nous aura accompagné, il nous laisse dans l’incapacité absolue d’un retour en échange de ce qui vient de nous être offert. Elle est seule car aucun asile (ni lieu ni arrêt) n’existe : nous le sommes aussi, seul, séparé. Ce livre tend à l’autre, qui aura toujours fait défaut, qui toujours aura été inaccessible et donc en quelque sorte absent, une main qu’à notre tour nous ne pourrons saisir. On n’embrasse pas plus la fugacité d’un être, d’une vie que l’on n’étreint l’irréalité du monde.
Ce si beau livre, chère Annie, ce si beau livre vraiment qui me hante depuis ces derniers jours que j’en ai terminé ma lecture, nous dit, avec une superbe élégance qui rend plus violente encore la douleur qu’il communique, l’infinie solitude d’une vie dès lors qu’elle est libre, et parce qu’elle n’avait d’autre choix que cette liberté ne peut ni ne saurait être dupe devant ce paradoxe
– ne pouvoir s’appréhender ni s’imaginer en dehors du monde
– et notre absolue impossibilité d’un saisissement du monde qui permettrait seul de nous saisir. Lucidité qui précipite la conscience que nous avons, tantôt légère (ainsi vont les jours) tantôt noire de notre tragédie, de notre éphémère.
Pour savoir il faut dire la vie tout entière – infinie et précaire, pauvre et débordante, multiple et singulière – ramassée dans l’immédiat d’un instant déjà disparu le temps du regard qui aura condensé et irréductiblement fondu notre histoire dans l’histoire du monde. Un éclair puis la nuit a si magnifiquement dit Baudelaire dans "À une passante". Un éclair de mémoire comme si l’on se voyait hors de soi dans ce bref instant qui déjà n’existe plus et porte, a emporté avec lui la vie tout entière et avec elle toute l’histoire de soi et du monde.
La grande violence vient de cette accélération/accumulation chaotique du temps, cet éclatement, cette dispersion de soi dans le monde et, en retour, cette condensation, cette disparition même du monde en soi, avec la fuite de soi. Votre livre rend admirablement cette dilution de soi dans le monde et du monde dans un moi toujours inaccessible qui tout à la fois précipite la vie et la soustrait, l’annule, l’anéantise.
Ce qui m’importe le plus peut-être est que vous ayez si bien su dire, écrire, rendre palpable et vivante, dans la matérialité des jours, l’impossibilité de saisir et se saisir de la vie, de sa propre existence, du monde, du temps.
Ce que vous avez écrit, c’est une histoire du monde. C’est, bien sûr, un livre sur le temps et la mémoire, oui c’est une ethnologie/archéologie de soi – mais bien au-delà et plus profondément c’est un livre sur l’impossibilité que révèle la mémoire de garder, de retenir, de restituer (fût-ce par des photos, toujours déjà datées, hors du temps dès lors) le temps et le monde autrement que par l’image/l’imaginaire d’un moi chaque jour à chaque instant réinventé. La grande force de l’écriture de votre livre est de figer à un moment donné par le seul temps réel – à savoir le temps de l’écriture – toute l’histoire d’une vie et l’histoire du monde comme un seul souffle brûlant, dévastateur, aussitôt absorbé par le néant.
Certes tout votre livre dit le monde mais il dit aussi, en permanence, au fil des ans/des pages, que dans le lourd magma de la durée des jours qui nous façonne il y a quelque chose qui nous exclut qui est une impossibilité de rencontrer l’Histoire, de faire corps avec elle – ne serait-elle qu’un rêve ? ne serions-nous qu’un fantasme ? qu’est-ce que le passé ? où est-il ? Comme si l’histoire du monde et notre propre histoire étaient chaque fois à refaire et à reconstruire dans le présent d’une mémoire chaque fois réinventée.
Vous savez mon amitié profonde, chère Annie, et mon affection.
Je vous embrasse
Bernard
Bonjour, je désirerais entrer en contact avec Annie Ernaux, lui faire parvenir un courrier de lecteur souhaitant à tout prix lui communiquer mon admiration et mon amour pour son oeuvre. Où poster ce courrier ? Comment s’assurer que cet écrivain le lira bien ? Je suppose qu’il n’y a pas de fan club épluchant le courrier des admiratrices, puis-je lui écrire un mail, une lettre par la poste ? Mais où obtenir un soupçon de coordonnées ?
Merci de considérer ma requête.
Grand merci pour votre intérêt !
Je vous réponds en privé.
Bonjour,
Je viens de lire les 2 ouvrages qu’Annie Ernaux a consacré à sa mère et à sa maladie! Etant aide-soignante auprès de personnes agées et très émue par son témoignage, j’aimerais lui écrire soit par mail soit par lettre, avez-vous une adresse à me communiquer?
D’avance je vous remercie.
Bonjour,
Je suis étudiante en Philologie romane à l’Université de Lublin, en Pologne, je suis aussi une lectrice fidèle d’Annie Ernaux : j’apprécie beaucoup son écriture, ses choix formels concernant le style et ceux concernant les sujets traité.
A l’occurrence, je suis en train d’écrire mon mémoire de maîtrise qui portera sur « Le rapport entre la photographie et la littérature d’après L’usage de la photo d’Annie Ernaux ». Je projette d’analyser les différences et les ressemblances entre le code verbal (des récits d’A. et M.) et iconique (des photos). Je sais que les photos en noir et blanc, reproduites dans le livre, ont été prises en couleur. Je voudrais me renseigner sur la possibilité d’obtenir ces images en couleur en vue de faire l’analyse plus complexe, prenant en considération le jeu et la symbolique de couleurs. Je voudrais communiquer mon projet à Annie Ernaux, j’ai écrit aux Editions Gallimard, mais je n’ai pas reçu de réponse. Pourriez-vous m’aider à lui passer mon message ? (p.ex. en suggérant une adresse e-mail ou postale..)
Merci d’avance !
Grand merci, Anna, pour votre intérêt – et bon courage pour vos travaux !
Je transmets immédiatement votre demande à l’auteure.
J’ai lu plusieurs des très beaux textes d’Annie Ernaux. Je souhaiterais entrer en contact avec elle. Y-a-t-il une adresse qui permette de lui envoyer un courrier ou un mail ?
Je vous remercie par avance.
C. Delmas
Merci beaucoup de votre intérêt, Colette. Je vous contacte en privé.
Bonjour,
Depuis des années, je suis sensibilisée à la problématique des difficultés liées au changement de classe. Le livre d’Annie Ernaux : « la place » fut l’une de mes révélations en 1997. Je l’ai d’ailleurs rencontrée à Lille au Forum Fnac en février 2008 et j’étais très émue de lui faire dédicacer mon exemplaire de « la place ».
Je travaille actuellement sur l’écriture d’un documentaire traitant des difficultés psychologiques auxquelles doivent faire face les personnes ayant changer de classe sociale. L’objectif de ce documentaire serait de permettre à un large public de connaître l’existence de ce « malaise psycho-social » et, par cette compréhension pouvoir donner des outils à ceux qui le reconnaissent pour pouvoir le vivre différemment.
Je pense, mais peut-être est ce par ignorance, qu’il existe trop peu de document accessible pour faire prendre conscience de ce sujet à un public non averti, c’est à dire, un public ne lisant pas ou très peu d’ouvrage de sciences humaines. Le média vidéo pourrait permettre de toucher ce public.
Je cherche à joindre Annie Ernaux pour savoir si elle serait éventuellement d’accord pour que des extraits de ses livres viennent nourrir ce documentaire.`
Ce projet de documentaire n’en est pour l’instant qu’aux premières prémisses d’écriture et je suis actuellement en train de contacter des personnes qui pourraient y témoigner et de glaner des textes et des films qui viendraient nourrir ce sujet.
Une fois ce dossier terminé, je partirai à la recherche d’un producteur et de subventions pour le réaliser. Donc, si ce projet de film rencontre l’intérêt espéré, il ne se tournerait pas avant 2011.
Pouvez-vous transmettre ce mail à Annie Ernaux ou me transmettre ces coordonnées ?
En vous remerciant vivement
Corine Bachy
Bonjour,
je viens de traduire en italien « L’occupation » pour mon mémoire de maitrise. J’ai envoyé le manuscrit aux Editions Gallimard, mais je n’ai pas recu de reponse. Comment contacter alors l’auteure? (Est-que je pourrais recevoir une adresse e-mail, par ex.?).
Je vous remercie par avance,
Lucia Caiani
Merci, Lucia et Corine, pour votre intérêt. L’auteure y étant favorable, je vous recontacte en privé.
Bonjour,
Je suis actuellement en Guyane en classe de 1ère L et j’étudie en ce moment » une femme » de Annie Ernaux.
Je souhaiterai que vous transmettiez ce message à Annie Ernaux :
Si vous n’avez pas le temps ne lisez pas ce message…
Mais si vous continuez, voilà ce que je veux vous demander, dans « une femme » vous dites que votre mère est décédée le 7 avril 1986. Puis que vous avez commencé à écrire 19 jours après ( 3 semaine moins 2 jours ) donc logiquement vous avez commencé à écrire » une femme » le 26 avril 1986 or à la fin de l’œuvre il y est inscrit le 20 avril 1986. Ma question est donc comment es ce possible ?
Bien évidemment lorsque j’ai soulevé ce problème en cours, tout le monde s’est moqué de moi et même mon professeur. Alors j’aimerai savoir si vous l’avez mis exprès ou bien es que c’est un défaut de mémoire ?
Si vous avez pu lire ce message je vous en remercie et si possible pourriez vous me transmettre une réponse ?
Merci d’avance.
Heiarii
Merci, chère Heiarii, pour cette judicieuse remarque que j’ai transmise à l’auteure : Annie ERNAUX voit en vous « une fine détective »… La seule chose dont elle est certaine est qu’elle a commencé d’écrire un dimanche… Bonne continuation dans vos investigations !
Bonjour,
Nous sommes des étudiants de 1ère en soins infirmiers. Nous avons choisit le livre L’évènement pour une fiche de lecture en faisant le parallèle avec la psychologie. Pour mener à bien notre travail, nous aurions besoin de quelques renseignements concernent Annie Ernaux et ce qui l’a motivé à écrire ce roman. C’est pourquoi nous aurions souhaité rentrer en contact avec l’auteure si possible directement.
Merci infiniment
Camille, Brigitte et Julien
Bonjour, je suis lycéene dans le nord de la France j’étudie en ce moment même une femme d’Annie Ernaux,Je trouve ce livre magnifique et j’aimerai donc envoyé un courrier a celle ci afin de lui parvenir mes impressions.
Par avance je vous en remerci
Cordialement,
Manon
Bonjour,
Est-il possible d’envoyer directement un mail à Madame Annie Ernaux?
Sinon, merci de me dire comment lui transmettre un message.
Cordialement.
Marie-Odile Bain
Bonjour,
Je ne suis pas écrivain, je ne suis pas étudiant et je ne fais pas de recherche sur Madame Erneaux. Toutefois, ma conjointe est une grande admiratrice et elle m’a fait découvrir son oeuvre. Voyez vous je ne veux pas importuner cette grande dame, mais un mot d’elle à l’intention de ma femme serait le plus beau et le plus significatif des cadeaux que je pourrais lui offrir. Nous avons beaucoup discuté de ses oeuvres ensemble et je dois avouer que ses écrits ont une résonnance particulière au sein de notre couple.
Je lance donc une bouteille à la mer dans l’espoir qu’elle se rende jusqu’à elle !
Merci à vous.
Ian Dorion
Bonjour,
Nous sommes un groupe de 4 lycéennes de premiere littéraire.
Dans le cadre de nos travaux pratiques encadrés nous avons choisis son livre L’Evenement.
Nous aurions quelques questions a lui poser, et donc entrer en contact avec elle.
En vous remerciant d’avance,
Cordialement
Aurélie,Laurie, Armelle et Marie
Bonjour,
Puis-je vous adresser un mail à transmettre à Annie Ernaux ?
En vous remerciant par avance pour votre aide !
VA
Bonjour, j’ai été subjuguée par le livre « La femme gelée » et quand j’ai su que Annie ERNAUX était la marraine du concours d’écriture de Saint Leu la Forêt j’y ai participé avec enthousiasme. Ma nouvelle sur la photographie (Prix Annie Ernaux 2007) n’a pas été retenue mais cela m’a donné le déclic pour la paufiner, la travailler et la présenter à un éditeur qui l’a retenue. Ce livre va sortir en septembre prochain et j’aurais voulu en offrir un exemplaire à Annie Ernaux qui, sans s’en douter, a été à l’origine de cette extraordinaire aventure.
Je vous serais très reconnaissante de bien vouloir faire suivre ce mail à Annie Ernaux et lui transmettre ma plus profonde admiration pour son style d’écriture et les sujets traités qui nous concernent tous.
Cordialement et respectueusement.
Jo B.
Merci, chère Madame : je viens de vous répondre, mais apparemment le message n’est pas passé… Merci, donc, de bien vouloir me recontacter par mail : libr.critik@yahoo.fr
Bonjour, je suis une étudiante en 1° littéraire, dans le cadre de nos travaux personnels encadrés nous étudions La Place avec deux de mes amies. Nous aimons beaucoup cette oeuvre et nous aimerions prendre contact avec l’auteur pour mieux la comprendre.
Cordialement et respectueusement
Philippine
Bonjour, je suis le Papa d’une jeune fille, Camille, qui a eut la chance ce vendredi dernier au théâtre de Brive La Gaillarde d’avoir une dédicace de Annie Ernaux à la fin de son spectacle juste après une séance photo dont elle devrait se souvenir.
Je vis un petit drame depuis… Je vais essayer d’expliquer ma demande avec le peu de français que je dispose, veuillez m’excuser par avance…
Ma fille a été conseillée de lire l’un de ses livres et de venir à sa lecture ce vendredi dernier par ma compagne, Isabelle, professeur de français, et qui a comme seule grande admiration littéraire, Annie Ernaux. Ma compagne est heureuse pour Camille de sa dédicace et il n’y a évidemment là aucune jalousie. Mais l’histoire de ma compagne et l’admiration qu’elle a pour Annie Ernaux est la source de mon souci. Ma compagne, Isabelle, m’a demandé de lui acheter son dernier livre et surtout d’y porter une dédicace à son attention , histoire, que pour une fois dans sa vie quelque chose puisse se réaliser, et un peu la combler. Elle serait bien incapable de demander directement une dédicace à Madame Annie Ernaux. En quelques mots, ma compagne, a vécue une vie très semblable à Annie Ernaux, avec un Papa maçon en Corrèze et, elle, qui a du lutter pour faire ses études… Depuis, elle souffre de ne pouvoir avoir d’enfant et d’avoir vécue tellement d’échecs. Je n’ai pas réussi malgré une queue de plus d’heure hier à la foire du livre de Brive, a avoir cette dédicace pour ma compagne isabelle, je n’ai pu que acheter son livre. Je suis arrivé trop tard, elle était déjà parti vers les 18h ce samedi soir pour prendre son train. Ma compagne vit cela comme un nouvel échec dans sa vie. Je serai des plus heureux pour elle de recevoir une simple dédicace par email ou si j’ose, par courrier. Merci d’avance de bien vouloir passer ce message à Madame Annie Ernaux, je lui en serai des plus reconnaissants.
Mr Pascal POIRET
2 Chemin des Hauts d’Ayras
19360 COSNAC
Email : pascal-poiret@sfr.com
Merci à vous, Madame Annie Ernaux.
Je lui donne demain à un moment privilégié. J’ai hâte d’y être…
Pascal POIRET
Je garderai précieusement cette dédicace qui est un cadeau inespéré de la part d’une personne qui fait partie de ma famille, la vraie, celle que j’ai choisie.
Merci d’avoir répondu à la demande de mon conjoint et d’avoir ainsi nourri notre amour.
Je vous adresse toute ma bienveillance.
Isabelle Mayne