[Livre-chronique], Mathieu NUSS, <em><strong>Agio</em></strong>, par Bruno FERN

[Livre-chronique], Mathieu NUSS, Agio, par Bruno FERN

septembre 16, 2009
in Category: chroniques, Livres reçus, UNE
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Mathieu NUSS, Agio, vignettes de Jean-Marc Scanreigh, VOIX éditions / Richard Meier, collection « Vents Contraires », 2009, 64 pages, 13 €, ISBN : 978-2-914640-83-8.

Bruno FERN

Dans son deuxième livre (le premier est paru aux éditions Ragage) , Mathieu Nuss cherche à établir, en 7 blocs de versets, une différence avec les coutumes en vigueur, c’est-à-dire la valeur ordinairement accordée à la langue selon le taux communicationnel dont les exemples ne manquent pas : la langue de (grande) surface, tant « le discours publicitaire est devenu le maître des discours » (Dominique Quessada, L’Esclavemaître, Verticales, 2002), qui se rate elle-même à force se croire transparente. C’est ainsi que l’on pourrait comprendre, du moins en partie, le titre de l’ouvrage, comme ce plus espéré par l’investissement total de miettes de langage.

Indéniablement, il y a de l’emportement là-dedans (et même de la furie), ce qui suppose à la fois de la continuité, des fils tenables à travers reprises et variations (par exemple, celui des multiples passages entre les états solide et liquide qui évoquent aussi bien la forme du livre, à mi-chemin entre précipitation et concrétions), et des ruptures qui constituent autant de relances, oscillation multidirectionnelle qui renverrait en fin de compte à celle, fondamentale, entre moi & moi-démis-de-mes-fonctions.

Comme on le voit, l’humour n’est pas absent, conformément à ce qui est d’ailleurs souhaité en 4ème de couverture : on préfèrerait drôle à absurde – l’emploi du conditionnel soulignant la lucidité de celui qui, dès les premiers mots, n’essaie pas de masquer les limites de son entreprise puisque le grain de sable est partie prenante du mécanisme : « du lait du défaut dans le lait ayant fait croître l’armature visagée de la suite qui prend le relais maintenant échancre. »

En outre, une telle écriture enchevêtre subtilement les registres, du savant au trivial, avec une fréquence élevée du lexique relatif à l’organique où elle se désigne souvent elle-même : « choisir & altérer comme un grand cette proximité remplie de l’état animal » ; ou bien encore : « évitant ostensiblement le conduit préfabriqué c’est (s’) admettre végétal demandeur d’espaliers. »

En fait, chacun des versets pourrait être comparé à un cluster au sens musical du terme (surtout quand l’on connaît le vif intérêt que porte à ce domaine celui qui porte sa chemise couleur violoncelle pour se dédommager de ne pratiquer aucun instrument), mêlant toutes sortes d’éléments afin d’en tirer un accord si possible inouï : « déchets sonores (produits des conditions de résonance sans cesse changeantes) non sans y ajuster quelqu’onomatopées d’attache-vie        elles couvrent temporaires & préfèrent recommencer ailleurs. »

Ainsi l’auteur tente-t-il à sa façon de parvenir à ce qu’il semblait se fixer comme objectif dans un texte critique paru antérieurement et qui portait le même titre : Voilà d’exemplaires poussées et repoussées qui fonctionnent en îlots de continuités sensitives, intimement organisées (Revue Po&sie, n° 116, septembre 2006).

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rédaction

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