CONFRONTATIONS, Bulletin de la Société des Amis de Louis Guilloux, n° 24, été 2011, 104 pages, cotisation annuelle de 20 €.
Cette livraison peut en partie être placée à l’enseigne de la modernité : Christian Cavalli montre en quoi l’écriture romanesque de Louis Guilloux est un lieu de tension entre parole et silence ; Valérie Fournaison-Poussard s’attache à la déconstruction du personnage ; enfin, il sera question du "dialogue posthume" entre Christian Prigent et Louis Guilloux (intervention de l’écrivain, suivie d’un article de Fabrice Thumerel, "Prigent/Guilloux : un dialogue carnavalesque" – version remaniée de l’article paru dans le numéro 21-22 de la revue Il particolare, hiver 2009-2010).
Selon Valérie Fournaison-Poussard, "la modernité du romancier" tient à ce qu’il "n’a cure de proposer un parcours abouti à ses personnages, énigmes qui se définissent aussi par leur absence et par leurs manques". Et de mettre en parallèle la déréalisation du monde, sa "réalité fuyante" – dont l’image du kaléidoscope est la métaphore –, et la spectralisation du personnage, sa "fragilisation existentielle, psychologique ou morale".
Pour ce qui est du rapport de Christian Prigent à Louis Guilloux, voici ce que l’auteur lui-même en dit : « […] il m’a fallu me différencier parce que, né au champ de la "poésie", j’étais porté vers d’autres questions intellectuelles et formelles. Mais m’en différencier n’a jamais voulu dire m’y opposer, encore moins le mépriser. J’ai au contraire tenté de trouver des formes narratives qui intègrent le souci humaniste et l’engagement civique dans une recherche formelle d’un genre très différent". Concernant l’article de Fabrice Thumerel, suite au préambule publié sur Libr-critique, on en donnera le final ci-dessous.
" À la maison du Peuple qu’évoque Louis Guilloux et dans laquelle Édouard Prigent harangue ses "camarades" et administrés, Christian Prigent préfère la Maison de l’œuvre, qu’il peuple des ombres de son histoire familiale comme de l’Histoire, sans oublier l’histoire littéraire (des baroques aux Modernes, en passant par Guilloux, le réalisme et le réalisme socialiste). Pour l’auteur de Demain je meurs, écrire c’est dépasser le clivage entre deux milieux socioculturels − qu’incarne l’antithèse Maison du Peuple / Maison (bourgeoise) de la Littérature − en habitant une Maison Prigent placée à l’enseigne du réalisme carnavalesque. Pour lui, écrire c’est libérer l’âme, ce je-ne-sais-quoi qui (s’)échappe à/de l’écriture, cet irreprésentable qui se soustrait à son contrôle pour faire figure à nos yeux. "