En ce premier dimanche de printemps, permettez-nous d’attirer votre attention sur trois parutions très récentes : Valère NOVARINA, La Quatrième personne du singulier ; Hubert GUILLAUD, De la mesure à la démesure de soi ; KILL ME SARAH, Chroniques des temps perdus et bande-son pour orgasme. Libr-campagne avec le caricaturiste Joël HEIRMAN.
Viennent de paraître : LC recommande…
Présentations éditoriales, avant chroniques.
► Valère NOVARINA, La Quatrième personne du singulier, P.O.L, mars 2012, 160 pages, 14 €, ISBN : 978-2-8180-1612-1.
Ensemble – plus que recueil – de 9 textes, La Quatrième Personne du singulier fait partie de ces livres "théoriques" (mais tout aussi lyriques que théoriques) grâce auxquels Valère Novarina fait régulièrement le point sur son travail. Ici, les thèmes recoupent et prolongent ceux des précédents ouvrages de même registre (Le Théâtre des paroles, Lumières du corps, L’Envers de l’esprit). Avec peut-être un peu plus d’emportement, qu’il s’agisse de parler de la langue, française mais aussi hongroise, et du patois aussi bien, du théâtre toujours, de l’acteur, du sacré.
"Le théâtre peut opérer au fond de nous la rare division mentale : il nous ouvre, par une suite de joies libres, par scènes déchaînées et par un soudain chemin plus court ce qui était grammaticalement interdit dans toutes les langues : la quatrième personne du singulier… Je tu il et moi toi lui tournent en ronde infernale s’ils ne s’ouvrent à la quatrième personne du singulier, moteur invisible, délivreur du drame pronominal : comme dans le Livre de Daniel, les trois Hébreux dans la fournaise : un quatrième est avec eux."
► Hubert Guillaud, De la mesure à la démesure de soi, Publie.net, coll. "Washing machine", mars 2012, 235 pages, 3,99 €, ISBN : 978-2-81450-611-4.
On a tous envie d’en savoir plus sur nous-mêmes. De comprendre ce qui nous arrive, les changements qui nous transforment, et pas seulement de s’arrêter à la perception que nous avons de ces changements. De dépasser la subjectivité avec laquelle on se décrit ou on nous décrit et qui fait de nous aujourd’hui – le premier terrain documentaire – qu’évoque le chercheur en sciences de l’information Olivier Ertzscheid. Mais comment dépasser notre subjectivité et celle de ces little sisters chères à Jan Chipchase qui, plus que Big Brother, nous observent et tracent en ligne ce qui apparaît de nous ? Comment comptabiliser nos vies pour les regarder sous un autre angle, et nous permettre de mieux les observer, les analyser, les comprendre – et y réagir ?
Croire que les données factuelles sur nous-mêmes permettent de mieux nous comprendre, c’est, il me semble, croire que les faits n’auraient pas d’incidences sur ce que nous sommes. Or un même fait subi par des personnes différentes est-il le même fait ? A-t-il les mêmes conséquences ? Peut-on croire comme nous le répètent les transhumains, que nous pourrions avoir des expériences humaines une fois la carte de notre cerveau clonée dans une machine, une fois que nous ne serons plus humains ? Peut-on croire ou veut-on croire que nous serions améliorables comme un logiciel ?
En attendant, la fascination d’avoir à partager ce qui semble faire de nous des humains et le "faux" sentiment de pouvoir avoir de soi une compréhension augmentée, sont là. Sentiment terriblement humain finalement qui nous pousse à jouer au Loto alors que la proportion de chances de l’emporter est si ténue que tout programme informatique l’exclurait comme quantité négligeable.
Finalement, ce qui n’entre pas dans les données, c’est le côté humain de notre caractère. /Hubert Guillaud/
► Kill Me Sarah, Chroniques des temps perdus et bande-son pour orgasme, Publie.net, coll. "Temps réel", mars 2012, 215 pages, 3,99 €, ISBN : 978-2-81450-624-4.
KMS est en France une légende du web. Pseudonyme, évidemment. Un blog magistral, qui vous secoue l’écoute, vous emporte sur des chemins où on ne serait jamais risqué seul. Comme une encyclopédie vivante de la musique électrique (et encore : pas seulement – et il vous dirait que la musique ne se divise pas).
Mais c’est le rock qu’on explore : ses grands morts, ses figures tragiques, ses impasses et ses dieux – majeurs ou mineurs. Des légendes, des mythes. Et ça, comment en parler sans descendre au plus profond de sa vie même, des étés en caravane, des amours brèves, de souvenirs d’auto-stop ou de guitare désaccordée ?
Et c’est cela qui fait le bonheur de la lecture du blog Kill Me Sarah, 10 ans d’existence.
Textes "remixés, remastérisés": ici, il ne s’agit pas d’un blog compilé. Mais de prendre cette matière à bras-le-corps, dans sa force de langue, et ses rires, et ses fuites, et ses émotions. Alors, dans cette suite de chroniques où on croisera Gainsbourg, Dylan (souvent), les Stones à Nellcote, comme Neil Young, Coltrane, Tom Waits ou Supertramp, The Cure comme Leonard Cohen, c’est l’inconscient qui surgit, ce qu’on cherche de rêve en soi-même, d’où on l’extorque et comment – dans le monde qui nous est offert, dans ce qu’on appelle la vie adulte – on tâche cependant à le préserver.
Libr-campagne
"Le PS n’est pas pour la sécurité"… L’UMP est pour, mais ne l’assure pas… / "Le PS a un problème avec la sécurité"… Avec l’UMP, le problème c’est précisément la sécurité… On méditera le dessin de Joël Heirman – dont on visitera le blog.