[News] News du dimanche

[News] News du dimanche

avril 18, 2010
in Category: News, UNE
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  Dans ces news de Libr-printemps : Soirée autour de Giney Ayme à Databaz [centre d’art expérimental que l’association Trame-Ouest qui dirige libr-critique a créé à Angoulême depuis novembre 2009], une humeur de Philippe Boisnard en forme de manifeste pour une approche ontologique de la poésie, le colloque "Politiques de la littérature" (Bourdieu, Sartre, Foucault) et les livres reçus : Françoise Khoury, Échafaudage ; Franck Smith, Guantanamo ; François Collet, Bernard Heidsieck plastique ; revue CCP et Cahier de l’observatoire de l’espace du CNES.

Pour une approche ontologique de la poésie

C’est dans l’air du temps, Disputatio XXI  aurait été inutile, recommençant pour la énième fois le combat des modernes et des classiques, la critique ou la théorie serait de même inutile, comme l’explique assez péremptoirement Sylvain Courtoux dans son grand entretien qu’il nous a accordé, toutes ces entreprises d’analyse, de jugement n’auraient plus de place. Cela me laisse un peu pantois. Tout d’abord, il m’apparaît que chaque texte critique, chaque effort d’ouverture à une oeuvre, est le témoignage d’une conscience face à ce qu’elle rencontre, est la tentative de dire pour quelle raison un texte la touche, la marque, en quel sens elle le trouve cohérent du point de vue de son existence. Car c’est bien d’abord et avant tout de cela qu’il s’agit : non pas seulement décortiquer mécaniquement une oeuvre (cela vaut académiquement), mais témoigner qu’elle fait sens pour nous, pour nous en tant qu’extérieur au texte, en tant qu’il nous est adressé, sans l’avoir été pourtant nommément, voire intentionnellement.

De plus, et pour revenir à Disputatio XXI, que je vois critiquer à plusieurs endroits : certes on pourrait en effet dire qu’il s’agit de la énième discussion des anciens et des modernes. Certes. Toutefois, c’est oublier que dans chaque discussion qui s’ouvre ainsi, ce qui se constitue, dans le temps où le débat s’initie, ce sont des positions, des définitions, des frontières, des démarcations. Et cette émergence est importante pour percevoir comment en un temps et un lieu donnés, les protagonistes d’un domaine qui synthétise pourtant de nombreuses pratiques, classent, hiérarchisent, déterminent les espèces appartenant à ce domaine. Il est évident, par exemple, qu’ayant participé à Disputatio XXI, je ne partage que fort peu une majorité d’approches qui y ont été écrites. Cela ne signifie pas que je les trouve inutiles, ou que je sois indifférent à celles-ci. Tout au contraire, c’est bien en les lisant que je comprends aussi mieux ma propre position. De même, c’est en lisant Roubaud ou la réponse de Prigent que je comprends mieux comment, aussi bien en pratique, en tant qu’écrivain, qu’en tant que théoricien, je me démarque de ce qu’ils énoncent. Accueil de la différence, non pas selon un différend mais comme tangente, parallèle, à ma propre position, comme référence possible pour établir une distance, une prise en vue de ce que je veux énoncer.

Tous ces efforts établissent d’abord en quel sens ce qu’on appelle la poésie est protéiforme, non pas un univers, mais un multivers. La variation des jugements, des analyses sur la poésie, des pratiques poétiques, du lyrisme, à l’écriture à contrainte, de l’objectivisme au document poétique, de la modernité négative à la post-modernité ludique, indiquent d’abord et avant tout, non pas des genres, mais bien des variations modales de l’intuition poétique chez des individus différents. Au lieu de refuser de saisir les enjeux d’une discussion, au lieu de se renfermer dans son propre lopin de terre poétique, il s’agit alors de comprendre en quel sens chaque modalité poétique exprimée, quelle que soit l’hétérogénéité, exprime un versant distinct de ce qui, faute de mieux, est appelé poétique. Certains diront que cela devient chaotique, que cela devient informe. La question du poétique est peut-être au cœur justement de cet informel originel qui n’obéit ni strictement à l’entendement rationnel, ni strictement à la raison morale, mais qui tout au contraire les ouvre problématiquement quant à leur empire. La question poétique, comme l’énonçait parfaitement Heidegger, est celle d’un habiter, d’un éthos, d’une éthique. L’homme habite en poète (cf. Jean-Claude Pinson), et c’est parce qu’il est capable de s’ouvir à cette modalité d’existence, qu’il témoigne, à chaque fois selon des formes singulières, les siennes, celles d’autres qui font effet et sens en lui, de son propre être, qu’il habite en poète. La poésie est un genre de l’exister, et non pas un genre littéraire. Un genre de l’exister, au sens où, c’est par et pour l’existence que l’homme écrit, et non pas d’abord pour faire littérature, et non pas d’abord pour être publié. On oublie trop que la question de cette écriture-là, qui est unique en sa modalité, est témoignage de vie, insistance de notre être dans le monde. Ce n’est pas pour rien, que la poésie est une pratique couramment répandue, solitaire assez souvent pour bien des individus, qui permet de supporter une existence, de la doubler dans l’espace de la parole humaine libérée de ses contraintes.

Une approche ontologique de la poésie est une approche ontologique des modalités d’existence de l’être humain, de cet animal parlant. Il ne s’agit plus dès lors de voir qui est dans le vrai, qui est dans le faux. Tout cela tient à des époques, à des stratégies de pouvoir (éditorial, universitaire, publicitaire), de constitution de champ. Ne pas partager une approche, devrait d’abord nous questionner sur la raison qui amène que nous n’apprécions pas un texte, la raison qui nous conduit à ne pas être impliqué par son vécu de sens. Une approche ontologique de la poésie serait la possibilité de saisir la variation modale de l’existence humaine, et de là de comprendre la plasticité de sa représentation dans l’invention de langage, de forme. Établir des typologies, non en les hiérarchisant, en en excluant, mais en les répartissant quant à un possible spectre des gestes poétiques.

Bien évidemment, cela demande une réforme de l’entendement, cela demande une humilité de l’amour-propre : se dire que l’autre, celui avec qui l’on ne partage pas le même vécu de sens, les mêmes sédimentations textuelles, structurelles, est aussi dans le vrai que nous-même, ne posède ni moins, ni plus de vérité que nous.  Ainsi, il ne s’agit pas de dire "tout s’équivaut", mais bien de différencier, mais non pas du point de vue de la valeur, ou de la vérité (Ô maladie ancestrale de la métaphysique qui hante encore tant de poètes et de petits maîtres de ces contrées), mais du point de vue de l’articulation de la vie. Pour quelle raison, untel est lyrique ? Fait retour à la versification ? Travaille le cut-up ? etc…

Il y a quelques années, quelqu’un me faisait la remarque qu’en lisant libr-critique, il ne voyait pas précisément ce que j’aimais, rendant "intelligent" tout texte auquel j’accordais une critique. Il s’agissait déjà de cela : non pas chroniquer un texte seulement par l’ordre de mes goûts, de mon propre vécu de sens (quoique ceux qui y prêtent attention savent que je me retrouve plus dans le formalisme, dans le document poétique, dans l’objectivisme, que dans le lyrisme, l’écriture blanche, etc.), mais plutôt selon la cohérence qui me semblait apparaître dans chaque texte, sa propre mécanique d’existence, son témoignage d’une existence intérieure : la sienne et celle de son auteur. C’est pour cela que j’ai toujours articulé philosophie et analyse poétique, c’est pour cela de même que la rencontre avec Fabice Thumerel a été importante : lui-même travaillant à partir de la sociogénétique impliquant l’auteur et son existence.

Encore actuellement, un certain nombre se demandent quelle est ma pratique, et même me mettent en dehors de la poésie (il est évident que selon les critères aussi bien de Roubaud, que de bien d’autres attachés au livre, au texte écrit, je suis loin), mais là aussi c’est ne pas saisir en quel sens une pratique peut utiliser d’autres médiums (la programmation informatique, la performance, le son, l’image, le corps) et pourtant se définir comme poétique : car la langue est originaire dans toutes ces pratiques, ainsi qu’elle l’est chez des créateurs comme Julien Blaine et ses performances, chez Lucille Calmel, Henri Chopin, Philippe Castellin, Joachim Montessuis.

Le refus de la critique, de la disputatio, est ainsi à mon sens un double refus : celui tout à la fois de la pratique de l’autre, que l’on efface, et le refus primitivement du vécu de sens de l’autre, sans doute au profit de son propre vécu à soi. Alors que notre époque par le politique, le constat n’est pas original, se sclérose idéologiquement autour d’une définition de l’homme de plus en plus restreinte, celle du travailleur, de l’être organisé selon les impératifs économiques de la société mondiale, il serait temps que ceux qui justement mettent en critique cela, s’interrogent sur leur propre définition de l’existence et des pratiques qui lui sont corrélatives, en quel sens elles peuvent parfois nier aussi — et cela d’une manière quasi-totalitaire — le témoignage de l’existence d’autrui. /PB/      

                     Soirée performance              

ÉCRITURES EN EXTENSIONS

24 avril à 20 h à DATABAZ (centre d’art expérimental de l’association Trame-Ouest) — Entrée Libre.

Une video-performance poétique de Giney Ayme
avec un dispositif multimédia de Philippe Boisnard

>> travail réalisé lors de la résidence à Databaz [du lundi 19 avril au samedi 24 avril) >>
+ projection de videos-poésie de la collection
le point sur le i, l’une des plus belles collections de DVD d’art et de poésie.
//// entrée libre

À partir de simples gestes de travailleur (fendre du bois à la hache, découper du verre, écrire à la plume, scier, meuler, poncer..) réalisés en direct par Giney AYME, et remixés par Philippe BOISNARD, un poème interactif se construira projetant la gestuelle humaine, source sonore et visuelle analogique, dans
une réalité «augmentée».

L’espace sera constitué comme des pôles de créations visuelles où chaque gestualité viendra emplir le film des gestes qui sera constitué sur plusieurs écrans.

Entre arts plastiques, poésie visuelle, dispositif de musique concrète et art numérique, ce qui aura lieu sera à proprement parlé écritures en extensions. Cette performance entre dans le cadre du développement de la poésie action numérique.

Journées d’étude des 29 et 30 avril 2010. POLITIQUES DE LA LITTÉRATURE : BOURDIEU, SARTRE, FOUCAULT (Université de Liège)

Journées d’étude du Groupe belge d’Etudes Sartriennes (groupe de contact FNRS), Université de Liège, 29 et 30 avril 2010.

Programme :

Jeudi 29 avril :
9h30 Jean-François Louette (Paris IV – Sorbonne), "Le deuxième sexe dans Les Mains sales"
10h30 Gianluca Vagnarelli (ULg), "Démocratie et communication littéraire dans Qu’est-ce que la littérature ? de Sartre"
11h30 Jacques Lecarme (Paris III – Sorbonne Nouvelle), "Sartre et Bourdieu : Refus de l’autobiographie, passage à l’acte autobiographique, présence inévitable de Flaubert"
12h30 à 14h Pause midi

14h Jacques Dubois (ULg), "Flaubert analyste de Bourdieu"
15h François Provenzano (FNRS/ULg), "L’ellipse du sujet. Bourdieu et Foucault face à la littérature comme discours"
16h Thomas Bolmain (FNRS/ULg), "Une éthique de la littérature : Foucault, de Kant à Lacan"

Vendredi 30 avril :

10 h Daniel Giovannangeli (ULg), "Entre littérature et philosophie. Mallarmé et Derrida"
11h Julien Pieron (FNRS/ULg), "De l’hermétisme à l’émancipation : réflexion sur le Mallarmé de Rancière"
12h à 14h Pause midi

14h Philippe Sabot (Lille III), "L’engagement imaginaire de Jean-Paul Sartre" ; 15h Fabio Caprio Leite de Castro (CAPES/ULg), "Le public et l’esprit objectif chez Sartre"
16h Grégory Cormann (ULg), "Des muets qui veulent parler. Politique, langue et littérature chez le dernier Sartre"

Lieu : Université de Liège, Salle de l’Horloge, place du XX-Août, 7. Bât. A1. Contacts : tbolmain@ulg.ac.be ou gregory.cormann@ulg.ac.be

Livres reçus

[+] Françoise Khoury, Échafaudage, Biro, "KB 9", printemps 2010, 48 pages (15 photographies en couleurs), 15 €, ISBN : 978-2-35119-073-9.

Présentation éditoriale :

En regardant les photographies de Francoise Khoury, en lisant ses textes, nous nous trouvons plongés dans une série de souvenirs : amours éphémères, maternité, rencontres fortuites, retrouvailles imprévues.
Ces souvenirs s’attachent à des lieux qui sont tous des villes : Florence, Venise, Paris, Beyrouth et Montréal – les villes de l’auteur.
De 1986 à 1998, ces images enjambent le temps, établissent une continuité. En y regardant bien, nous y voyons une série d’autoportraits, à travers ombres et reflets. Ainsi se fondent les expériences vécues, lieux et épisodes d’une vie, dans une œuvre exceptionnelle.

Note de lecture :

"Je cherche une image qui n’existe pas.
Quand je l’aurai trouvée
je la photographierai.

Lors des deux précédentes livraisons (KB 7 : Nombres. De zéro à onze ; KB 8 : Back Yard), nous avons eu l’occasion de saluer cette collection dirigée par Stéphane Cohen, qui fait entrer en résonance  écriture et arts visuels. Cette dernière, encadrée par deux clichés révélateurs, s’avère tout aussi intéressante. Le premier est composé de trois plans : à gauche, la photographe en train de photographier ; au milieu, une main en train d’ouvrir la porte de la chambre d’hôpital où dort l’enfant ; à droite, l’intérieur de cette pièce, avec, en surimpression, l’effigie de l’enfant. Le dernier est un singulier autoportrait, miniature incrustée dans un paysage urbain, entre dedans et dehors. Entre les deux, on est frappé par celui où l’ombre portée de la photographe donne sur une tombe aussi dépouillée que dégradée par le temps.

 

L’art moderne commence avec la prise de conscience que la représentation est impossible : pas plus que la peinture ou le roman réalistes, la photographie n’est une fenêtre ouverte sur le monde… Toute représentation se perd dans le labyrinthe des représentations de représentations. Françoise Khoury s’incrit donc bel et bien dans cette modernité, mettant en scène l’acte artistique, échafaudant les vues et visions, témoignant un art du cadrage comme de la profondeur de champ. Dans Échafaudage, l’espace comme le temps, tout s’étage par plans et strates. Entre passé et présent, entre Liban, Canada et France, sont orchestrées des épiphanies visuelles ou tympanisées : contact magique d’une main, scènes violentes dans un ascenseur, réapparition – en pleurs – de la "professeure de poésie" de l’enfance… "loup vouloir louve", "inutile de te jeter à l’eau, tu ne nourrirais que deux sardines, alors à quoi bon", "une échelle, vite une échelle" (derniers mots d’un écrivain mourant)… /FT/

[+] Franck Smith, Guantanamo, ed. du seuil, col. Fiction & co, ISBN : 978-2-02-102095, 15 € .

4 ème de ouverture : Le 23 janvier 2006, quatre ans après l’ouverture du camp pour terroristes présumés sur sa base navale de Guantanamo, le Pentagone est contraint par la presse américaine, au nom de la liberté d’information (Freedom of Information Act), de rendre publics les comptes-rendus d’interrogatoires de plusieurs centaines de prisonniers. Le département de la Défense décide de ne pas faire appel, s’incline et livre trois cent dix-sept procès-verbaux ? certains comportant les noms des détenus ? sous la forme de CD-rom ou accessibles à la demande sur son site Internet. Frank Smith se saisit des documents publiés, les déverrouille pour en faire une suite de récitatifs. Ça se lit comme une enquête pour dire l’innommable, par les seuls moyens de la langue. Frank Smith est né en 1968. Il écrit, et coordonne avec Philippe Langlois l’Atelier de création radiophonique de France Culture.

Note de lecture : Dès sa présentation, on pense bien évidemment à Reznikoff, à l’objectivisme qui s’initie dans ces deux oeuvres que sont Testimony et Holocaust. Écrire à partir des témoignages des autres, écrire pour témoigner d’un ressenti, mais non pas à partir de sa propre langue, mais à partir de la langue de ces autres-là. Reznikoff expliquait que c’était le seul moyen de traduire l’horreur ressenti : une incapacité à créer une langue autre que la langue de l’horreur qui s’était historiquement donné. Une même démarche chez Franck Smith, même si est perceptible une approche rythmique forte, à travers la variation et la récurrence de figures grammaticales dans chacune des parties [cf. par exemple p.35, p.53. Comment parler de Guantanamo ? Comment indiquer ce qui a eu lieu ? Certes on pourrait inventer la langue, un idiolecte, mais on peut aussi comme ile le fait, déplacer le dire de son contexte d’origine, dans un autre contexte. Ce qui est dit se fictionnalise et tout à la fois par la recontextualisation (dans un livre non documentaire) fait ressortir d’autant plus l’absurdité de la procédure. Il y a là, dans le texte quelque chose de kafkaïen, d’absurde. ceci ets très bien rendu par les séries qui se succèdent : série des On dit, On répond [qui on ? qui, qui est ce on ?], série des questions/réponses, série des interrogés. Mêlant les figures poétiques formelles, Franck Smith nous montre cette autre réalité de ce qui a eu lieu avec les tribunaux militaires, le dialogue de sourd qui s’est tissé entre les déportés et l’armée américaine. Mini-scène, mini-théâtre, des juges, des greffiers, des interrogateurs et des interrogés, le lecteur ne peut être pris que dans ce mouvement à vide des questions. /PB/

[+] François Collet, Bernard Heidsieck plastique, avec la participation de Julien Blaine et Michèle Métail, ed. Fage, ISBN : 978-2-84975-175-6, 20 € . 

4ème de couverture : Depuis plus de cinquante ans, Bernard Heidsieck travaille à arracher la poésie à ses carcans traditionnels ; pour la rendre active, vivante, pour la dresser face au monde. Pionnier de la Poésie sonore, théoricien de la Poésie action, il aura participé activement à l’aventure des avant-gardes radicales des années 60/70, période intense de création, de transgression et de décloisonnement des formes et pratiques artistiques. Si son travail sonore – la pratique de la Poésie action – fait de lui un patriarche des écritures expérimentales actuelles, il est un pan beaucoup plus méconnu de son œuvre : le domaine plastique. Une œuvre de plasticien qui, depuis la fin des années 60, se poursuit avec, sur et autour de la Poésie action, dans un même élan de création. Il était temps de donner à voir ce travail plastique – ces planches d’Écritures/Collages, comme les nomme Heidsieck – mais aussi de chercher à en comprendre la place et l’enjeu au sein d’une œuvre toujours aussi tenacement novatrice.

Note de lecture : Les dernières lignes de la quatrième de couverture sont de Heidsieck : "Voilà qui devrait rabattre le caquet des couillons qui ne manqueront pas de s’étonner qu’un poète puisse exposer, en tant qu’artiste, en tant qu’être multiple, dans une galerie d’art" (1965). Tout est dit. Les couillons l’ouvriront toujours pensant que l’art contemporain est détaché de la poésie, que les médiums ne s’entre-pénètrent pas. Tout est dit. L’homme n’est pas mono-modal, mais multimodal, il se décline de par sa langue dans des contrées distinctes, il explore des variations de son dire selon des possibilités d’agencement parfois hétérogène. En réalisant ce livre François Collet nous donne à redécouvrir le parcours plastique de Bernard Heidsieck. Et on y découvre beaucoup d’oeuvres, qui traversent le temps. Cela fait partie des indispensables pour tout chercheur et tout admirateur de Heidsieck, car non seulement il y a de très belles reproductions mais en plus François Collet laisse la place aussi bien à la parole de Heidsieck que celles de Blaine et Métail. /PB/

[+] CCP, cahier critique de poésie, n°19, dossier Bernard Heidsieck, ISBN : 978-2-909097-80-0, 15 €. Direction de François Collet : François Collet / Bernard Heidsieck : Entretien, Olivier Cadiot : Un derviche à Royaumont, Patrick Beurard-Valdoye : Bernard Heidsieck, vif de voix sur du motif, Sébastien Lespinasse : Cher Bernard, Jean-François Bory : Portrait de Berbard Heidsieck, Anne-James Chaton : Exposé des 53 motifs d’absence de Bernard Heidsieck à son bureau entre juin 1975 et novembre 1985 (extrait de la partition), Marion Naccache : Vaduz, la lecture-performance comme « plasticité du sonore » : poésie action / plastification, Frédéric Acquaviva : À propos du retard d’un livre à venir sur l’activité plastique d’un poète par un compositeur qui filme, Noura Wedell : Tentative de (re)description du Carrefour de la Chaussée d’Antin, Philippe Boisnard : Espacement et distinction, Jean-Pierre Bobillot : Heidsieck, Godard : medium, mon beau souci (ou : tout est politique), Jacques Demarcq : Retour au livre, Nicolas Tardy: Pourquoi Heidsieck ?, François Collet : Ekphrasis, Emmanuel Ponsart: Bibliographie sommaire.

[+] Espace(s) (Le cahier de l’observatoire de l’espace du CNES), n°6, thème : La fabrique de la mémoire, ed. Observatoire de l’espace/CNES, ISBN : 978-2-85440-014-4, 19 €.

Note de lecture : Aventure peu banale que cette revue littéraire, publiée par une institution scientifique, sous la direction de Gérard Azoulay. Décloisonnement, porosité, exploration. Le CNES s’ouvre à tous les espaces, ici poétiques et littéraires, et interroge une diversité d’espace : ici en l’occurence la Fabrique de la mémoire. Les écrivains que l’on y retrouve ici (aussi bien à travers le dossier : Noëlle Renaude, Sabine Macher, Claire Guezengar, Thomas Clerc, Renée Gagnon, Cyrille Martinez, Dorothée Volut, Jacques Albert, Jean-Jacques Viton, que dans l’Exploration : Éric Pessan, Hortense Gauthier, Philippe Braz, Jacques Sivan et Cédric Pigot, Vincent Ravalec, Éric Pistouly, Jean-Louis Lippert, Philippe Boisnard, David Christoffel) explorent tous à leur manière le thème de la mémoire, de ce qui se fabrique là, dans la mémoire, notamment à travers le thème de l’espace. Entreprise pas banale, car nous y trouvons des pistes étranges, notamment cette fiction entre poésie, Science-fiction et BD de Sivan et Pigot, ou des plans de concepts scientifiques, se donnant dans une fiction informatique chez Hortense Gauthier. L’ensemble de ces textes témoignent de la porosité entre lapensée poétique et littéraire et la science. Loin d’être des domaines exclusifs, aux frontières rigides, se découvrent des espaces communs, de métaphores concrètes, de devenir de la langue.  À lire aussi dans ce numéro l’entretien avec Hugo Boris, ou les connexions de fin de numéro avec Corine Pencenat, Robert Lepage, Jean Lambert-Wild, Jean-Luc Soret. Accompagne ce numéro un CD : Les voyageurs de l’espace. /PB/

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