Suite à l’article sur le n°6 de la revue le Quartanier, et à la note sur le travail de Arno Calleja, les réactions furent rapides, énervées, pleines d’injures pour certaines, et de mécompréhension pour d’autres, je vais donc essayer d’éclaircir le propos tenu dans cette chronique. Ce petit article devait être une simple réponse aux commentaires de Antoine Hummel et Ludovic Bablon, mais se faisant au fur et à mesure de son écriture plus longue et plus précise, j’ai pensé qu’il pourrait être publié ici.
Si je peux reconnaître ma critique rapide, et peu argumentée, à propos de Calleja, elle n’est pourtant ni un dédaigneux revers de la main, ni un a priori, ni le signe d’une lecture rapide de cet auteur, elle est plutôt la manifestation d’un certain agacement et même d’une certaine colère face à son travail, que je connais bien le suivant déjà depuis trois ans environ (à travers des textes sur le net, revues, livres, lectures…). Elle se voulait aussi un petit coup de pied alors qu’il est de bon ton de dire les choses entre soi, plutôt que d’affirmer clairement des partis pris, afin d’ouvrir le dialogue, et pourquoi pas la polémique, à propos de ses textes et des questions qu’ils soulèvent, les réactions d’ailleurs n’ont pas tardé. ( y compris de l’intéressé qui m’a écrit une très belle lettre à laquelle j’ai répondu, lettre qui engage un dialogue justement et qui n’est pas simple invective et insulte, contrairement à d’autres mails et commentaires reçus).
Tout d’abord, dans ma chronique du Quartanier n°6, je n’ai jamais parlé ni utilisé les critères de « nouveauté » et de « modernité », qui d’ailleurs n’est pas simplement un vieux concept, mais un concept classique qu’il ne faut cesser d’interroger, et qui n’en finit pas d’être interrogé lui-même par les travaux littéraires en train de s’écrire …
(NB : par ailleurs, oui, quand j’ai découvert Tarkos, je me suis dit que je n’avais jamais entendu ni lu un truc pareil, oui c’était nouveau, et je pense que le travail de Tarkos est vraiment inédit, « jamais dit », je ne trouve rien qui lui ressemble, et cet inédit est tellement fort dans son cas, que le critère de nouveauté peut être un critère, même s’il n’est pas le seul, de qualité.)
Cependant, je ne juge pas Calleja à l’aune de ces concepts, mais je ne peux pas non plus le lire détaché de toute relation dans le champ littéraire, de toute histoire, de toute généalogie, et il se trouve qu’avant lui il y a eu Tarkos, et Pennequin (qui est toujours là lui) __ la proximité avec ces auteurs est flagrante, je ne vois même pas comment cela pourrait être autrement, ne pas le reconnaître serait de la malhonnêteté et de la mauvaise foi. Par contre, je reconnais n’avoir fait qu’affirmer ce fait sans l’argumenter, ce que je vais donc faire :
En effet, Calleja n’est pas un « plagiaire », le terme ne convient pas (je ne l’ai d’ailleurs pas employé), mais la proximité entre Pennequin et Tarkos et lui me semble indéniable, donc de quelle proximité s’agit-il ?
Des travaux qui sont proches de ceux de Pennequin et Tarkos, il y en a beaucoup, poursuivre les pistes, les interrogations, les formes qu’ont lancées ces deux auteurs, pourquoi pas, il peut y avoir des choses intéressantes …
Mais dans le cas de Calleja, une chose me gêne profondément : c’est une proximité qui veut se masquer elle-même, qui ne reconnaît pas la généalogie dans laquelle elle se situe, je ne trouve pas cela correct (aucune morale là-dedans, même si je ne trouve pas d’autre mot), vis-à-vis de Tarkos, qui est mort, et qui ne peut plus rien dire. Je pense que c’est un auteur majeur, dont la reconnaissance n’est pas encore assez solide et établie, il est donc encore facile de le recouvrir par d’autres travaux qui sont dans la reprise et la continuation de son travail. Déjà des gens rencontrés m’ont dit « ah alala que c’est bien Calleja » et ils n’avaient pas lu Tarkos, je trouve ça intolérable, comme si on enterrait une deuxième fois Tarkos, peut-être mon côté historienne que d’être comme ça préoccupée par la mémoire, mais je pense que c’est important …
2ème chose : la proximité d’entretient Calleja avec Tarkos et Pennequin est une proximité qui me semble en deçà des possibilités qu’ont ouvertes Tarkos et Pennequin dans la langue.
Car Calleja est dans la reprise d’une forme, (et oui on peut parler d’une forme, comme on parle de forme en peinture, en cinéma, en musique, etc…toute création est faites d’idée(s), de matière(s) et de forme(s)), d’une mécanique, d’un rythme, d’une construction qui est parfois plus celle de Tarkos, parfois plus celle de Pennequin __ forme qu’il n’arrive pas à renouveler, et dans laquelle, toute la singularité de son écriture, toutes les pistes et idées personnelles qu’il ouvre (car oui il y a des choses intéressantes dans ses textes) ne peuvent véritablement se déployer tellement elles sont prises dans et recouvertes par cette forme. Ainsi tout ce qui pourrait se jouer vraiment dans son texte est déjoué par cette forme, à mon sens.
En effet, les formes, les mécaniques, les logiques respectives de Pennequin et Tarkos sont tellement singulières, tellement définies, dessinées, abouties, qu’il est à mon sens très difficile de les reprendre ; mais elles sont en apparence tellement simples, élémentaires (tout en étant aussi complexes quant aux éléments qu’elles mettent en jeu et dans la manière de les agencer) qu’il peut sembler très facile de se les réapproprier.
La question qui se pose alors est : le travail de Pennequin et Tarkos peut-il trouver des successeurs qui parviennent à le reprendre tout en le renouvelant ? peuvent-ils laisser des enfants qui ne soient pas de mauvais ersatz ? je ne pense pas, mais j’attends que l’on me prouve le contraire, que ce soit de façon théorique ou pratique.
Ainsi, Calleja me semble échouer dans la reprise des langues de ces deux auteurs auxquels il reprend de nombreux éléments et caractéristiques, et n’être que dans une duplication qui rate, en plus, ce qui est en jeu dans le travail de Tarkos, c’est-à-dire cet étirement, cet étalement de la langue, d’où ce mot de facial, sans profondeur, simplement en surface, poésie de l’horizontalité, dont les seules profondeurs ou perspectives sont des jeux de géométrie produits par les agencements particuliers qu’il fait de la grammaire et du sens. Chez Calleja il y a, dans la petite mécanique de syllogismes finement huilés mais trés rhétorique, les profondeurs d’un sujet qui tourne autour de son propre abîme, et qui réintroduit de la verticalité, d’où la mise en échec de la grammaire de son écriture, qui paraît alors d’autant plus comme un emprunt.
Là où la rumination schizophrénique de Pennequin ouvre sur une multiplicité de voix et d’énoncés du monde qui le traverse de toute part, là où sa langue macératrice et ravageuse est un forage qui détruit, déjoue l’ego, Calleja rate ce forage de lui-même (contrairement à ce qu’il écrit – texte « poésie crisique » dans la revue Los flamencos no comen p.48) en maintenant un sujet unifié, enfermé dans une rumination de lui-même, qui ne fait que répandre et déverser sa psychologie dans un fleuve, un ruisseau, un égout, ou dans ce qu’il appelle « une psychidité », de psyché et liquidité (cf. texte dans le pdf Reprise 4 des Cahiers de Benjy).
« je suis en train de me singulariser, je ne parle jamais de moi au pluriel, parce que je n’en suis pas encore là, j’en suis encore au singulier, à chaque fois qu’on dit je c’est toujours singulier, pour plusieurs je, on ne met pas de s à je non plus, bien qu’il s’agisse du pluriel » (Hargne)
« j’me sauve par moi. au trou de moi. le trou c’est moi. c’est moi qui sent pas bon. je sens moi. que j’ai une fuite. ma salive coule à l’égout. à l’ego d’moi-même. j’me sauve au ruisseau. par l’ruisseau d’ego. je coule le moi. dans la salive. pour qu’il se sauve. » (texte sur Inventaire/Invention, Cheval)
Calleja se cogne frontalement au monde, il se pense lui-même face au monde et aux choses, là où Pennequin n’est qu’une éponge traversée de part en part, là où Tarkos est immergé, dissolu dans les éléments du monde et dans le langage.
Là où la poésie de Tarkos est une poésie des choses du monde, une poésie d’objets, bâton, caisse, bidon, merde, terre, oiseau, air, argent, etc … la poésie de Calleja parle seulement de lui, et ce n’est pas parce qu’il prend la voix d’une femme dans plusieurs de ses textes (dans la revue le Qr, ou dans son texte sur remue.net « Légen ») que ce n’est pas toujours lui, ou un sujet … d’ailleurs il le dit « Je suis moi-même mon autre c’est totalement identifié. » Alors que l’on ne me refasse pas le coup de la différence entre l’auteur et le narrateur, on n’est plus à l’école.
Cet affrontement face au monde se traduit par une position peu originale et assez basique dans son expression__ à savoir une critique de la dévastation sociale par le Capital (cf. le texte de la revue Qr, le texte sur remue.net)__ et donc par des figures binaires récurrentes : « légen riches et légen pauvres », la parole libre et la « parole d’esclave », les maîtres et les opprimés (cf. texte sur remue .net) ,
Et cette position a son pendant dans l’écriture : Calleja ne rentre pas dans l’écriture, dans la langue, mais ne cesse de tourner autour, de la poursuivre. Contrairement à ce qu’il dit à la fin d’un texte Hargne : « je suis dans la langue », si il y était peut-être n’aurait-il pas besoin de le dire ? mais accordons-lui le fait qu’il y soit s’il le dit, je dirais alors qu’il n’est non pas dans la langue, mais dans les mots, pris dans les mots, empêtré dedans, à tel point qu’il ne parvient pas à toucher l’écriture. Il poursuit les conditions de possibilités du surgissement de l’écriture (la pauvreté, la maladie, la crise, la vitesse, la lutte contre l’aliénation, ect…), il parle de l’écriture, il est dans un vouloir de l’écriture avec ses « je veux », « il faut » mais il n’est pas dans l’écriture, comme le sont Tarkos ou Pennequin :
cf. texte Cheval, « je veux être dans la vitesse » « je veux que personne n’arrête ma vitesse. je veux pas qu’elle s’arrête la vitesse. on arrête pas la vitesse. tout est vitesse. rien ne s’arrête. dedans rien ne s’arrête. »,
« il y a encore du travail à faire, il faut être, il faut être dans la philosophie, être dans la parole, le soir on continue une parole qui n’est pas la même parole que la parole du jour au travail, le travail est la parole qui ne travaille pas, le travail se fait la journée, la journée c’est esclave que je suis la journée, et le soir je dois trouver une autre parole, une parole qui n’est plus une parole d’esclave, mais qui est une parole du soir, du libre soir de soi, »
On peut se rendre compte de cela dans une lecture de Calleja à Montévidéo en 2006, il parle de la respiration, du souffle, il parle de cela, mais sans y être. Alors que dans une lecture de Tarkos sur le site des éditions Cactus, (cliquer sur CD, expressif le petit bidon, puis sur « le bonhomme de merde »), on entend Tarkos respirer de façon forte et régulière, il respire, il respire, puis il dit « je gonfle », et continue de respirer, respirer …
C’est là toute la différence entre Tarkos et Calleja, le premier n’a pas besoin de dire, de parler de, il est dans le souffle, dans la respiration, alors que le second ne fait que tourner autour en en parlant …
Il faut aussi aller regarder une lecture de Tarkos au CEP à Lyon (surtout la lecture 2, en bas de page) __ et là, on voit bien que Calleja reprend complètement la façon de lire, de dire, entre l’improvisation et l’explication, de Tarkos, tout en reprenant des questions de Pennequin comme par exemple, l’idée selon laquelle c’est pas moi qui parle, c’est la parole qui parle toute seule, c’est la parole qui parle en moi , quand il dit : « je souffle avec des mots dedans » « c’est pas moi qui est mis des mots dans le souffle », « les mots viennent dedans, s’inscrutent », « c’est eux qui ont quelque chose à dire, moi rien ».
On retrouve aussi cette reprise de l’idée de Pennequin notamment (car on pourrait faire encore de très nombreuses comparaisons, entre Pennequin et Calleja, ce ne sont pas exemples qui manquent) dans un texte publié sur le blog Les Cahiers de Benjy, dans le pdf Reprise 1 : « i paraît que j’ai rien à dire. me dit la parole. i paraît que t’as rien à dire. me dit la parole. i paraît que t’as rien à faire. me dit l’être. je dis à la parole que je criture l’être. elle me dit ah bon. je dis à l’être que je me laisse parler. »
« Criture est une nouvelle langue dans le français. Criture s’écoule quand ça lui vient, car criture n’est assujetie a rien. Criture parle pour criture, et pour personne d’autre. Criture n’est assujetie, criture n’est aliénée qu’à elle-même. Criture est à la langue ce que bougnoule est au français. »
Avec son concept assez flou et vague de « criture », qui fait surtout penser à la trace scribouillarde d’un malade de l’écriture, on peut aussi se demander si Calleja n’essaye pas d’inventer un concept opératoire de son travail, comme Tarkos a pu le faire avec « pâte-mot », qui était une idée bien plus complexe et intéressante me semble-t-il.
Car pâte-mot n’était justement pas pour Tarkos une langue différente de la langue commune, il travaillait avec cette pâte-mot commune, à tous, avec cette langue banale que nous partageons, et il y avait là une dimension politique intéressante. La poésie de Tarkos ne s’extrait pas de la langue commune, elle est faite de celle-ci, donc il maintient ce commun, pour en souligner les fonctionnements, les absurdités mais aussi pour nous indiquer tout ce qu’il est possible de faire avec, pour le réanimer autrement, de façon vivante, pour lui donner de nouvelles intensités, dans une lecture que j’ai entendu de lui, il parlait de cette idée « d’intensification du texte».
Alors que la criture de Calleja (cf. citation ci dessus) se pense comme une langue étrangère dans le français, et comme une langue pauvre, une langue du pauvre, une langue pour les pauvres __ mais en fait cette langue n’est qu’un idiome singulier, qui ne vaut que pour lui-même, qui ne peut ni être partagé, ni créer du commun, elle lui appartient trop, et d’ailleurs il le dit lui-même, « Criture parle pour criture, et pour personne d’autre. », il reste donc enfermé dans sa criture, impartageable, incommunicable, sa criture tautologique, qui ne parle qu’à lui, à travers laquelle il se parle à lui-même et non aux autres.
Par ailleurs, on peut encore souligner une proximité avec Tarkos, à travers cette question d’une langue pauvre, simple, “prolétaire”, et les implications politiques qu’elle contient. Tarkos et Molnar avaient réfléchi à cela à travers la revue Poézi Prolétèr de façon plus fine et plus intéressante à mon sens que ne le fait Calleja.
Chez Calleja, il y a aussi, derrière une naïveté factice, artificielle, une tentation philosophique, une tentative de faire une poésie philosophante, qui pense et qui se pense elle-même, il élabore une sorte d’art (faussement) brut qui philosophe, il y a déjà là une contradiction __ on retrouve d’ailleurs de nombreuses références à Heidegger, à Aristote … (cf. texte dans le pdf Reprise 1 des Cahiers de Benjy : « l’être et la parole sont un couple divorcé, et moi je suis l’enfant séparé », cela signifierait-il que Calleja ne parvient à être ni dans l’être ni dans la parole en même temps, c’est peut-être pour cela qu’il n’est pas dans l’écriture … ?)
Alors que Tarkos parvient à créer de véritables outils de pensée dans sa poésie, ainsi que des objets de pensée quand il parle d’un bidon, d’une caisse, de l’argent, et en créant des situations cognitives perturbantes, il interroge de façon très vive à mon avis la philosophie, mais sans faire le philosophe, sans être dans une poésie pensante, qui se veut un pensée, il interroge vivement le langage, mais à l’intérieur du langage lui-même, il questionne la parole depuis la parole, c’est pourquoi ses lectures étaient si fortes. Chez Calleja, il y une interrogation de la pensée et du langage de l’extérieur, il tourne autour, s’y frotte, s’y cogne, violemment (et cela peut produire des choses intéressantes) mais il n’y entre jamais véritablement ; on sent ainsi beaucoup trop les lectures philosophiques qui transpirent dans son écriture … Comme le disait si bien Bernard Desportes, il faut apprendre à désapprendre pour pouvoir entrer vraiment dans l’écriture …
Enfin, pour reprendre la distinction entre les trois rapports à la vérité qu’opère C. Hanna dans un article en hommage à Tarkos sur le Web de l’Humanité , on peut vite se rendre compte en relisant le travail de Calleja qu’il est en fait dans un rapport classique à la vérité, celui que C. Hanna appelle “métaphysique”, et selon lequel la poésie est un outil critique de dévoilement de la vérité du réel, et de celle du sujet face à celui-ci.
C’est à cela que je voulais faire référence en disant « une posture classique de l’écrivain maudit », et non pas “romantique”, comme l’ont mal lu certains.
La poésie de Calleja repose sur la croyance que les conditions de possibilité d’une poésie vivante, sa poésie, sa langue “prolétaire”, c’est la pauvreté (cf. texte dans la revue le Qr), la hargne, la souffrance (la crise, la poésie crisique «c’est dans la crise qu’on travaille. on n’est travaillé par la crise. c’est dans la crise qu’on travaille la parole. »
« la parole crisique fait du corps une chose qui questionne librement. la parole crisique fait du corps une chose libre ».
Ainsi finalement la poésie crisique, la poésie qui se fait dans la crise, a une vertu thérapeutique qui libère le corps et l’esprit de l’aliénation, on est finalement entre l’art brut et l’écriture automatique (car quand Calleja dit qu’il faut laisser la parole parler, se déverser, sans réfléchir, il réhabilite d’une certaine façon un automatisme de l’écriture), et on sait à quelles illusions et impasses à la fois politiques et littéraires mène cette conception de l’écriture. Car la crise, oui la crise, mais n’est pas Artaud qui veut…
Mais peut-être que tout cela n’est pas très important compte tenu de ce que peut écrire Calleja :
« je ne parle pas du résultat je parle du geste ce qui est intéressant c’est le geste, le résultat c’est pas intéressant, le résultat toumonde a des résultats des bons et des mauvais résultats des résultats qui plaisent ou des résultats qui ne plaisent pas mais un geste peu de gens sont dans un geste, un geste est une manière de faire qui est une manière de vivre, un geste de criture fais vivre un texte »
Ainsi, si le résultat n’est pas important, mais que seul compte le geste, alors laissons Calleja faire des gestes de criture, laissons le brasser de l’air et des mots, allons relire Tarkos, et continuons à lire Pennequin .
Merci Hortense pour ces éclaircies. De la même façon que nombre de personnes pensent que Konrad Schmitt et Ivar Ch’Vavar sont un seul auteur (ce qui est faux), je croyais qu’Arno Calleja était un pseudonyme de Charles Pennequin. Je suis heureuse d’apprendre qu’il n’en est rien. Je savais déjà que Charles Pennequin n’était pas un pseudonyme de Christophe Tarkos.
Chère Hortense,
Merci pour cette éclaircissement de votre point de vue. Pour autant, je peine à imaginer qu’une lectrice aussi cultivée et nuancée que vous ai négligé de s’intéresser à la psychanalyse. Car, en définitive, il semblerait que les sujets soient clivés par leur propre discours. Autre chose : pourquoi ne pas critiquer le travail de Charles Pennequin de la même façon que vous épinglez l’écriture de Arno Calleja? Vos arguments seraient aussi valables à son encontre (on ne démontre pas une aversion). Par ailleurs, les uns et les autres font parfois de mauvaises lectures, et je sais pour l’avoir souvent vu lire qu’Arno est bien souvent brillant en lecture, quelque chose de lumineux se passe, qui relève de l’évidence : il y a dans son travail une écriture, qui travaille le désir, la tautologie, la pauvreté, avec et contre la sophistication de la rhétorique, du discours. Qu’il y ait des rapports plus qu’évidents d’écriture à écriture entre Christophe Tarkos et Arno Calleja, le recours à la ritournelle, la répétition, la pauvreté lexicale, le dit assez. Mais pour moi des univers différents se dessinent. En bref vous ne m’avez pas convaincu, et j’ai peur qu’une fois encore, votre intervention ne nuise plus qu’autre chose à la « lettre » (au sens littéral) de l’auteur auquel vous faites référence, et aux textes et auteurs plus largement, critiqués sur Libr-Critique, pour lesquels vos qualifications et caractérisations tombent souvent, trop systématiquement, à côté de ce qui fait l’intérêt principal des textes en question.
Cher Guillaume,
Je n’interviens pas dans le débat. Mais par rapport à cette sentence qui me dérange un peu :
« j’ai peur qu’une fois encore, votre intervention ne nuise plus qu’autre chose à la “lettre” (au sens littéral) de l’auteur auquel vous faites référence, et aux textes et auteurs plus largement, critiqués sur Libr-Critique, pour lesquels vos qualifications et caractérisations tombent souvent, trop systématiquement, à côté de ce qui fait l’intérêt principal des textes en question »
Elle me dérange, au sens où je la trouve plus fiéleuse, qu’intelligente et réfléchie. Je ne m’attendais pas à lire cela de ta part…
Je ne crois pas que les chroniques d’Hortense Gauthier soient, comme tu le dis : « à côté de l’intérêt principal des textes en question ».
Relis par exemple :
Mobiles de Vannina Maestri, par H. Gauthier
La blondeur, de Cécile Mainardi
ou encore
Couples etc de Vincent THolomé par Hortense Gauthier
Je ne crois pas que ses angles d’approche déservent les auteurs ou les textes, ni ne soient infondées.
je ne crois pas non plus que cela nuise à Libr-critique, comme tu le laisses sous-entendre.
D’ailleurs, au niveau de la justesse des chroniques, est-ce que tu penses que ta dernière chronique sur Mission Impossible nuise à la revue Le Quartanier ?et à la revue Mission Impossible ?
Tu te demandes où je veux en venir ?
Tout simplement tu fais des grossières erreurs :
_ Il ne s’agit aucunement du n°1, mais du n°3 tout d’abord.
_Tu dis ensuite que les n°1et 2 (étrange après avoir écrit que c’était le n°1, même si tu rectifies) étaient sur le web. Faux encore, car ils on été publiés en version papier, et d’ailleurs c’est écrit. Pas du tout la même facture, c’est certain. Et mis en ligne ensuite sur le web.
_ Tu dis que Anne-James Chaton était dedans, de nouveau faux, car MI est né après la fin et le différend qui a séparé Christophe Fiat et Anne-James Chaton.
Je ne pense pas que ta chronique nuise ni au Quartanier ni à MI, car mis à part ces erreurs, tu tentes d’expliquer ce qui te plait dedans. Et c’est déjà pas mal.
Ton commentaire désobligeant et injuste, ne discerne pas ce que toi même tu sembles reprocher à Hortense (aversion = défense // dans ce cas précis). Elle donne une lecture, avec laquelle d’ailleurs je suis certains points en accord pour ma part.
N’entrons pas dans la question de la littéralité des textes, car là ce serait un autre débat de savoir s’il existe une réalité du texte, le « littéral », extérieur à son interprétation, à savoir à la subjectivité qui le lit et en donne la contextualité nécessaire pour être.
On a tous nos influences, mais parfois, il n’y a qu’apparente influence. HISTORIENNE, tu sais certainement que la technique de la photographie a été inventée par plusieurs, qui ne communicaient pas entre eux (Fox Talbot, Niepce, Daguerre). Même chose avec : l’électricité, le cinéma, la radiotransmission, etc. Et bien avant cela : la VILLE (invention par des collectifs de plantes d’animaux de sols de techniques et d’hommes en Chine Mésopotamie Egypte etc), l’écriture, etc etc. L’un invente un truc, l’autre invente presque la même chose, un troisième synthétise en ajoutant un apport personnel. Darwin, et au même moment, Lamarck et Wallace. J’ai été ulcéré quand j’ai vu le film Epidémic, de Lars Von Trier, deux mois après avoir terminé ma première version de The Farm : ce con m’avait piqué mon idée de faire du titre la méta-rangaine de l’oeuvre ! Franchement, j’ai failli porter plainte pour plagiat. On n’est jamais tout seul.
Calleja a-t-il écrit sous influence ?
Réponses :
1/ C’est assez difficile à savoir
2/ C’est aussi assez vain, dès lors que :
3/ On montre facilement que les textes d’AC (non pas Action Chômage) font preuve d’un apport personnel non-négligeable
Maintenant : ce que tu dis, ça se tient parfois genre quand tu isoles un germe générateur de chez Pennequin repris par Calleja (et au passage, les Chants de Maldoror ce n’est que ça, des germes empruntés cultivés par un jardinier fou – la technique a donc fait ses preuves), sauf que… d’une manière partiale, tu te focalises sur tout ce qui – philosophique, méta, repris – prête à critique, mais qui n’est pas l’essentiel des textes de Calleja.
Voici donc une liste non-exhaustive de petites phrases thématisées sur un point d’enfance, de folie, de situation sociale, de pratique artistique, etc etc, qui sont chez Calleja et pas dans Tarkos et Pennequin, à ma connaissance – au tribunal des délits littéraires, cela servirait à démontrer la fausseté de l’allégation de plagiat. Donc, rien que dans le texte publié dans Le Quartanier 6 :
– Légen riches ont un gros nez
– Les mains propres c’est dégueulasse (plagiat de Sartre, partis comme on est ???)
– Tu creuses ta place pour tenir droit, sinon on te passe dessus
– Heidegger me parle
– Les pauvres ont des plus belles bites que les riches
– un riche italien (…) a donné l’usine aux ouvriers, ensuite il est allé se perdre dans le désert
– comme sujet social donne, comme sujet sexuel donne
– dame criture tu es défaite et tu n’existes plus madame criture (l’adresse directe prolonge utilement un truc qui existe en fait depuis… depuis qui ? Ducasse ? Ou Platon ? Pennequin l’a pas inventé non plus)
– une petite boulette de vide infra- visible que certain appelle dieu mais que moi je n’appelle pas dieu mais que j’appelle parfois énergie ou mieux piston, énergie j’appelle ou même encore parfois j’appelle ça le grand piston
– je n’ai pas d’idée pour la révolution
– je fais du dessin plutôt l’écriture de dieu est dans le dessin
– sauf le dessin, dieu se manifeste dans la criture et le dessin
– dans le présent du tracé la pensée devient une chose animale
– crisique a plus de style, crisique a plus de personnalité
– on est toumonde dans les bougnoules
– je suis une fille belle et tout mais bon je suis pas fiche de rien (…) sauf que je sais que je suis fiche pour le sexe et même je sais que je suis très très bien fiche pour le sexe
– je suis pas fiche de me tanquer face à l’autre et de lui envoyer des vibrations compréhensibles et d’ailleurs personne n’est fiche de se tanquer devant l’autre et de lui envoyer des vibrations compréhensibles et d’ailleurs même l’autre avec lui-même il n’arrive pas à se faire circuler du compréhensible (ça ça doit te parler directement parce que tu fais du compréhensible peu pertinent… c’est beaucoup moins troublant que de l’incompréhensible qui te latte la tête !!! de Dôgen à… Kinski 😉 )
Et concluons avec :
– les hommes d’un côté modèlent une pensée souple et normale, informative, ils n’ont rien choisi mais c’est la fatalité c’est à eux que revient de modeler la pensée normale, et les autres dans leurs mains ils modèlent la glaise de l’instant, ils ne l’ont pas choisi mais la glaise qu’ils modèlent devient la pensée crisique, crisique est vrac et prosaïque, et les hommes eux-mêmes sont les hommes crisiques qui fonctionnent d’une certaine manière qui est leur manière, crisique,
et là c’est moi qui reparle : crisique, c’est diamétralement opposé à critique, et c’est beaucoup plus libre, au sens de « freestyle »
LB
(promu par la présente champion de France du « commentaire 0% insulte », ceci afin d’éviter le blocage par « la rédaction »)
Chers Philippe et Hortense,
Mon intervention visait à faire entendre une autre voix, qui j’en suis surpris paraît donc plus fieLLeuse que la note d’Hortense elle-même. Etonnant. Ta réponse, Philippe, me surprend. Personne (tout au moins chez les gens qui lisent et désirent faire connaître la poésie aujourd’hui) ne cherche à oublier Christophe Tarkos, ni à occulter l’importance de son travail, bien au contraire. Son travail ne me semble pas souffrir d’ailleurs ni d’occultation, ni de trop de confidentialité (cf. l’ACR passionnant de David Christoffel récemment chroniqué ici).
Nous partons ici d’une note épidermique de Hortense Gauthier sur le dernier texte publié d’Arno Calleja dans la revue LQ n°6. Je ne m’exprime pas ici au nom de la revue LQ, mais en mon nom propre, en tant que lecteur. Tout d’abord je ne comprends pas la raison de la première diatribe injustifiée à l’encontre d’un auteur dont l’intérêt n’est plus pour moi à démontrer. La longue intervention qui l’a suivie, à laquelle ce commentaire s’adjoint, j’y lis, entre les lignes, l’affirmation de la valeur première d’un écrivain, Christophe Tarkos, auquel une généalogie pendrait, conduisant tout droit à l’auteur incriminé. Faut-il penser le contemporain proche en terme de généalogie? Si généalogie il y a n’est-elle pas AUSSI ailleurs? Je crois pour ma part qu’il y a une proximité d’esprit entre les oeuvres de C. Tarkos et d’Arno Calleja, mais qu’il y a beaucoup à trouver dans les textes d’Arno, entre ressassement blanchotien et logorrhée bernhardienne (c’est-à-dire plutôt loin de Tarkos), à proximité des univers que convoquent l’art brut, le langage parlé, sans oublier non plus la question du clivage du sujet, qui, dans une perspective lacanienne ou post-lacanienne (Guattari) pour non nécessairement nouveaux en littérature (non-inouïs) méritent mention et commentaire, développement. Tout cela dit trop mal et trop vite bien entendu. Arno Calleja travaille le syllogisme, les propositions, pour élaborer une prose de parole, prose de prole comme il l’énonce lui-même, prose de pensée en mouvement. Que la systématicité et la radicalité de ses moyens puissent énerver est un fait, mais on ne peut pas lui reprocher inconsistance ni incohérence.
A mon sens, le développement d’Hortense, s’il cherche à étayer ses points de vue, porte en lui l’affirmation sous-jacente qu’Arno Calleja ne serait en quelque sorte pas réellement un écrivain, pas un écrivain digne du plus grand intérêt : « cela signifierait-il que Calleja ne parvient à être ni dans l’être ni dans la parole en même temps, c’est peut-être pour cela qu’il n’est pas dans l’écriture … ?) ». Il faudrait citer in extenso…
Or Arno Calleja est (pour moi) un auteur du plus grand intérêt. Ce genre de sous-entendus et de disqualifications, même argumentés (et je crois pour ma part qu’ici les arguments ne tiennent pas) me semble peu déontologique. Voilà ce que j’appelle une affirmation fielleuse, qui me porte à réagir (ex. la mention de l’écriture automatique et ce qui en découle ici rhétoriquement, également, qui est un peu trop rapidement formulé car il est évident que l’écriture automatique n’a aucun rapport avec l’écriture en question. Pensée en roue libre peut-être…). Il faut bien noter que ma remarque concernant les interventions critiques de Hortense reste circonscrite à cette intervention-ci, et ne porte pas, ce qui me semblait clair dans mon commentaire précédent, sur l’ensemble de ses notes de lecture, pas du tout. J’ai plutôt apprécié (en tant qu’information ET en tant que note de lecture) ses textes sur Vannina Maestri et sur Cécile Mainardi.
Ma remarque, acerbe sans doute, mais à valeur intempestive, doit être prise plus généralement, et aussi comme note d’humeur. Elle porte sur un ensemble de textes lus depuis le début de Libr-critique, dans lesquels je vois revenir sempiternellement des réflexions sur la modernité ou pas, la post-modernité ou pas de tels ou tels écrits. Ce sont là des questions qui intéressent l’université et les lecteurs, et m’intéressent également, mais qui demandent de plus vastes développements et un recul peut-être plus grand vis-à-vis des textes recensés. On peut parfois parler de livres sans nécessairement les positionner ainsi, a fortiori quand les auteurs contemporains connaissent à la fois les oeuvres de la modernité et les débats de la post-modernité, s’y référant ou pas, essayant des écritures bien souvent dans des dynamiques non avant-gardistes, sans pour autant qu’elles soient réactionnaires ou classisantes… Il faudrait penser de nouvelles catégories, essayer des concepts plus légers, plus variés. Libr-critique semble défendre un point de vue théorique systématiquement tourné vers les avants-gardes, dont on voit mal, dans les écritures aujourd’hui agissantes, d’éventuels représentants. Lirais-je derrière vos notes de lecture un certain dogmatisme philosophant? Sans doute, même s’il appartient à d’autres de le formuler mieux que je ne saurais le faire. Je pose des questions naïvement, en tant que lecteur… On a parfois l’impression ici que lecteurs et auteurs sont pris de haut, de très haut, de trop haut. Avec des outils peu adéquats finalement à leurs projets textuels. Quand je parlais de « lettre » d’un texte, je ne parlais pas d’extériorité à l’interprétation, mais au contraire de plus grande proximité avec l’énonciation. Pour ce qui touche à l’oeuvre de Christophe Tarkos, elle mérite encore et toujours, sans doute, d’être portée, montrée, expliquée, ce pour quoi il importe que des textes soient écrits et publiés à son sujet. Faut-il pour autant en faire pâtir le travail d’un auteur plus jeune, bien vivant, et qui n’a pas besoin de ce genre de commentaires pour faire avancer un travail qui se porte bien, merci, ai-je envie de répondre à sa place? Et qui n’a pas dit son dernier mot?
Arno Calleja a été édité par des éditeurs sérieux et programmé dans nombre de festivals de performance et poésie : il appartient donc au critique de ne pas se substituer au pôle éditorial, qui semble faire son travail par lui-même, sans chercher à se tirer de balles dans le pied généralement (merci pour lui également). Je voudrais par ce plus long développement, auquel je viens de me livrer sans en mesurer par avance les effets, enjoindre les chroniqueurs de Libr-critique à plus de circonspection, par-delà les qualités déjà nombreuses de ce projet éditorial. On peut évoquer la valeur de vos notes de lecture et l’intérêt général du site, le rythme des publications, l’éclectisme du sommaire, le haut degré informatif des notes de réception d’ouvrages (très bonne idée) et enfin l’intégration de documents vidéo qui ajoute beaucoup au dynamisme d’un lieu critique indéniablement riche. Concernant mes bourdes éventuelles je vérifierai, merci pour ces précisions – nul n’est à l’abri d’un manque de discernement (passager), qui pour autant qu’il soit imprécis ne nuisait pas à la revue en question.
Bien cordialement à vous deux, ainsi qu’aux autres membres de la rédaction,
Guillaume Fayard.
Merci Mauricette de nous faire part de vos découvertes. J’en rajoute une, face à ce grand acharnement thérapeutique mal accompagné de sommités myopes voire aveugles. Si Wolman, Gil J Wolman, qui a écrit sur le mot (mais pas le mot mot, mais c’était vraiment pas loin) avait le même âge que tarkos, on pourrait aussi dénombrer + de pseudos encore. ça ne tient pas debout, Tarkos a influencé grandement Tholomé à un moment avant qu’il développe un truc qui émanait de moi, pour finir par écrire des trucs avec des gens (il dirait des « brols » sans doute, poèmes mal brolés…), des histoires avec l’accent bien personnel. et je pense que on avait les même préoccupations de toute façon, que ça nous travaillait drôlement Vincent et moi, et Tarkos aussi. Maintenant Calleja je pense qu’il doit poursuivre et ça va sûrement produire son effet. Je pense surtout qu’il faut être vigilant sur le côté bête, le côté simple simpliste, ça me travaillait avant ça, le « meumeu » j’ai d’ailleurs écrit un poème là-dessus dans le premier TIJA, le débile léger ou pas, je veux dire en ce sens que ça peut facilement rejoindre le béotien amoureux de la bourrache et tous les trucs chiants de la nature et du retour au lyrisme mystique (tarkos était un peu mystique et on aime bien les poètes habillés de blanc, comme des jésus en France, donc c’est facile, découlant de lui, et avec plus de mou dedans qu’on dégringole entre des textes entre chamanisme du quotidien et pathos à la pimpin).
Ce qui faut c’est moins de lisibilité, de clarté je crois oui, et puis parler de ce qui travaille vraiment, et pas quelque chose de construit par la gentillesse qui dénerve tout sinon on devient vite bégueule d’un style, d’une logorrhée. Il y a une grosse différence pour moi, chez Tarkos, c’est que Tarkos faisait peur. ça il faut pas oublier. Mais Arno c’est tout le contraire, et je pense qu’il va trouver son style à lui ou alors il le trouvera pas mais qu’est-ce que ça peut foutre aussi ? encore une fois qu’est-ce que ça cache cet acharnement thérapeutique ?
Tarkos était présent au moment où il faisait, fabriquait ses poèmes, et aujourd’hui il faut aussi des textes qui parlent pour le présent, c’est ça l’important, et puis l’idiotie il faut pas oublier que ni tarkos ni tholomé ni moi ne sommes dans le livre de Jouanais, alors qu’il nous avait vu à Beaubourg des années avant, avec Java. (ça c’est pour l’anecdote, bon je sais j’ai la dent dure mais maintenant je suis plutôt content de pas y être – un très grand absent de marque par contre : HUBAUT !!!! – parce que l’agneau est enragé maintenant, le meumeu n’est pas que burlesque, et les avants gardes regardent LA STAR ACCADEMOCHE, alors ça moi ça me fout dix fois plus en l’air que l’écriture d’arno si oui ou non c’est d’la crotte de bique made in taiwan, que plein de poètes sont vieux et croulants ceux qui donnent des noms et disent qui fait bien son travail, qui est une valeur sûre ou non, prometteuse, et qui regardent sans coup férir LA STAR ACCADEMOCHE, se gavent de toute cette société en répétant sempiternellement « nous ne sommes pas au monde ». pour ma part les questions sont ailleurs je trouve, les questions qui brûlent c’est l’édition et la politique, l’édition le monde de l’édition est mort, fini, ne va plus faire long feu, est vieux, est chiant, n’a rien à nous dire. voilà sur quoi il faut débattre aujourd’hui. moi j’en ai rien à péter des livres s’ils ne me maintiennent pas en vie, s’ils me donnent pas l’envie de vivre, ce qui faut c’est vraiment une colère, alors que Cadiot par exemple, qu’est-ce qu’il fait ? je ne comprends pas les poètes français qui se disent après 50 ans c’est fini, on prend notre retraite, alors que quand on voit Heidsieck et CHOPIN on se dit ouf, ça existe, il y a des vieux qui sont pas trop vieux dans leur tête, qui ont encore une PUTAIN DE HAINE. c’est là-dessus que vous devez débattre, mais pour le moment vous attaquez surtout les d’jeun’s, ceux dont la voix n’a pas encore porté. Aujourd’hui il faudrait pouvoir foutre en l’air la pensée française, et on n’est pas aidé, aujourd’hui il faudrait casser nos habitudes, nos façons de faire, de parler, de performer tout, qu’est-ce qu’on a à perdre ? qui organise des stages de clodo parmi les poètes, dites un peu, qui est prêt à vivre dans la rue à crever la dalle aujourd’hui, à part des vieux sdf comme giroud ? qui ? qui est prêt à prendre des coups, à faire des choses qui sont pas habituelles, à tout désorganisé déjà pour lui-même, pour la vie, qui aujourd’hui ne nous gave pas d’avant garde et est prêt à signer n’importe où pour écrire un roman du moment que ça lui rapporte 3000 euros ? qui ? dites un peu des noms ? et puis on arrêtera les gamineries autour de Calleja. merci.
plus facial que lui tu meures
comprendre c’est éviter de chercher pour prendre à l’autre ce qu’il énonce. comprendre c’est aller au plus facile. se défendre de la compréhension est la moindre des choses.
je ne veux pas être compris pour moi-même je veux être compris par erreur ; si j’étais compris pour ce que je dis j’en dirai moins.
les ressemb lances av ec la vie et la mo rt so nt un e coïnci dence. parf ois viv re se ter re au co in de mo i / viv re et mou rir. il y a là un to ur de pas se pas se diffi cile à sui vre. l un pas se l aut re re pas / la fa ce cac hée de mou rir es t tour née ve rs le vi de l horr eur d un e tel le inspir ation es t dépe inte av ec de s mo ts simp les le s mo ts vo ir sa ns êt re jam ais vu sa ns êt re jam ais la fa ce cac hée de viv re
prendre la lettre au mot. déposséder le mot le prendre à la lettre. prendre à la lettre ce que le mot veut dire à la lettre. déposséder le mot du fait d’être qui fait de l’être le mot. prendre gorge au mot. rendre au mot ce qu’être veut dire. prendre son sens au mot lui rendre sa voix. le mot ne s’use pas quand on s’en sert il se charge. il y a dans le mot une apparence et une transparence. laisser faire les mots. l’ordre des choses passe par l’ordonnance des mots le désordre aussi. les mots qui se suivent ne se rassemblent pas. l’acte se passe du mot le remplace. le mot ne se passe pas l’acte l’imagine. WOLMAN
Cher Guillaume,
je tenais à te répondre même si c’est un peu tard, je suis désolé le temps file trop vite …
D’abord, je suis trés contente de tous ces commentaires qui me contredisent et défendent le travail de Calleja, Libr-critique doit être un lieu de discussion et c’est trés bien d’avoir plusieurs points de vue qui s’expriment sur un auteur, car je ne prétends pas détenir la vérité sur un travail mais j’essaye de réfléchir sur des pratiques d’écritures en train de se faire, de les interroger. Donc merci aussi à Ludovic Bablon pour son petit florilège de citations, même si ce n’est pas en citant comme ça que l’on démontre quelque chose, mais au moins les lecteurs auront un autre angle de lecture
Tu me dis, Guillaume, que je ne t’ai pas convaincu, tant pis, mais toi non plus, dans ton commentaire, tu insinues que j’ai une « aversion » pour Calleja, je n’ai aucune aversion contre lui !! si vraiment je trouvais ça détestable, je n’en parlerais pas, je ne lui aurais pas répondu une lettre de 10 pages, je n’ai pas dit que ce n’était pas un écrivain, mais je pose la question de savoir si il ne rate pas ce qu’il cherche.
On peut interroger, mettre en critique un travail sans que cela soit de la détestation, et je ne pense pas que dans mon article il y ait quelque chose de l’ordre de l’aversion, ni que ce soit une entreprise criminelle vis-à-vis de son travail. De plus, je n’ai jamais dit que Calleja n’avait pas un univers qui lui était propre, mais je répète ce que j’ai dit dans mon article, je pense que son propre, sa spécificité est trop recouverte par les similitudes que son travail a avec celui de Pennequin, et de Tarkos, et c’est dommage car cela lui nuit.
Ensuite tu dis que l’on pourrait mettre en critique Pennequin de la même façon, et bien non, si tu avais bien lu mon article tu aurais peut-être vu la différence que je pose entre eux, donc si on devait critiquer Pennequin (et on pourrait le faire, mais personne ne le fait), ça ne serait pas avec les mêmes arguments je crois.
Tu parles aussi des lectures, je ne comprends pas, faire de bonnes ou de mauvaises lectures ce n’est pas la question dont je parle, mais de la différence et des similitudes entre des lectures, je ne pose aucun critère de « bon » ou « mauvais », j’ai juste voulu souligner la ressemblance entre les lectures de Calleja et celle de Tarkos, qui est indéniable, et qui pose questions à de nombreuses personnes, alors peut-être fait-il ses lectures differemment maintenant, je ne sais pas. Mais pour me contredire, tu me dis que Arno est « brillant » en lecture, que c’est « lumineux », drôles d’arguments, trés subjectif cela, il est difficile de discuter sur ces bases là, ça serait comme discuter des goûts et des couleur, on ne démontre pas une amitié.
De même, l’argument selon lequel Calleja serait un bon écrivain car il est édité par des « éditeurs sérieux et programmé dans de nombeux festivals », je trouve ça moyen ! On ne peut plus critiqué quelqu’un parce qu’il est légitimé de façon institutionnelle ? c’est quoi ces conneries !
donc voilà tes arguments ne me semblent pas trés valables car ils sont bien plus subjectifs que les miens je trouve.
Par ailleurs tu me parles de psychanalyse, la critique psychanalytique en littérature n’est pas ce que je préfère, ça donne souvent des analyses un peu limitées, mais pourquoi pas, et pour parler de sujet clivé ok mais je trouve pas que Calleja aille trés loin dans cette perspective, je pense que Pennequin explore de façon bien plus intéressante cette question-là, qu’il va bien plus loin. Tu parles aussi de Blanchot, et de Bernhard, c’est intéressant, oui, même si j’ai beaucoup de mal à voir les liens entre Calleja et Blanchot, on pourrait aussi alors parler de Michaux, dans le rapprochement entre la boule et dieu, que fait Calleja, mais qui est de façon quasi identique dans La connaissance par les gouffres et Plume je crois.
Par ailleurs, je ne prétends pas faire l’éxégèse entière du travail de Callaj, je rate sûrement des choses, mais je pense avoir la droit d’affirmer l’angle de lecture qui est le mien, car la critique ce n’est pas être objectif, c’est plutôt l’affirmation de sa subjectivité de façon argumentée, c’est la tentative de penser un texte avec les ressources, les lectures, les questionnements qui nous traversent et nous constituent. Pour ma part, j’ai faist de l’histoire et de la socio, et j’aime réfléchir les textes dans leur contexte, leur intextualité, leur généalogie, c’est un prisme, qui me semble intéressant, mais ce n’est pas le seul evidemment.
Quand tu dis que Libr-critique aborde de façon récurrente la question de la modernité et de la post-modernité, c’est parce que ce sont les problématiques de Philippe, (qui vient de la philosophie, et pas de la littérature, donc il pense en philosophe) mais tu exagères car de trés nombreux articles réfléchissent les textes avec d’autres critères. Ensuite je ne pense pas que l’on prenne les lecteurs de haut, on essaye juste de faire des critiques exigeantes, approfondies, qui ne sont pas juste de petites notes de lectures comme on voit partout.
Par contre, je suis d’accord avec toi quand tu dis qu’il faudrait d’autres concepts et catégories, mais ceux que défend Philippe me semble légitimes, trés intéressants, vraiment opératoires, de plus ils ne prétendent pas permettre de tout expliquer, ils ne s’affirment pas comme hégémoniques, et universels.
La critique est toujours le reflet d’interrogations plus personnelles, l’objectivité est une croyance, on ne peut pas être des girouettes scizophréniques et dire du bien de tous les livres et revues que ‘lon reçoit, ce serait hypocrite et inintéressant…
lire, penser, ce n’est pas être d’accord, c’est toujours essayer de prendre les choses autrement que comment elles se donnent, ce n’est pas carresser les jeunes auteurs dans le sens du poil comme de jeunes étalons, ce n’est pas flatter l’ego des vieux auteurs pour avoir une petite place dans l’écurie, nous défendons une critique exigeante, indépendante, qui peut être violente, et dure, mais jamais méchante, mesquine et restons ouverts aux contradictions, on est un des rares sites qui permet des commentaires, et donc le débat, c’est-à-dire qui est prêt en son sein même à recevoir attaques, remarques, coups d’humeur etc …
Donc tu peux ne pas être d’accord avec les points de vue que nous défendons, tu peux ne pas être convaincu par mes arguments, tu peux trouver mes critiques mauvaises, mais ne me dis pas que ma critique n’est pas « déontologique », car franchement je commence à en avoir marre qu’on me donne des cours de critique et que l’on me fasse la morale. Car je me demande si la même critique, signé Jean-Pierre machin, 51 ans, critique dans tel ou tel truc reconnu, aurait eu autant de mails et de commentaires aussi énervés …
Et si comme tu le penses Calleja est un grand écrivain, ma petite critique ne sera pas grand chose dans 50 ans face à son oeuvre, donc tout cela n’est pas bien grave. Il a l’air d’avoir de nombreux amis qui le soutiennent, ce n’est pas une mauvaise critique qui lui nuira, ce qui ne tue pas rend plus fort, n’est-ce pas …
Bien à toi
et au plaisir d’une autre discussion
hortense
Chère Hortense,
Merci de ta réponse. C’est pas si grave, non. Je passe sur les réactions à brûle-pourpoint de Charles. Je reconnais bel et bien être myope (je pensais que ça pouvait être une qualité).
Peut-être y a-t-il un aspect positif à ton article et nos commentaires : la question de l’influence et du « bon ton » d’époque font partie des écueils qui touchent le contemporain. Notre petite chamaillerie pose aussi cette question vers d’autres auteurs, d’autres revues, d’autres maisons d’éditions : il est intéressant de voir par exemple comment un écrivain majeur peut arriver à fermer les possibles pour ses contemporains dans le mouvement même de sa réussite, en interdisant par son esthétique tel ou tel rapport au sujet, au langage, au vocabulaire, à la forme livre, etc. constituant de cette façon des tabous, parfois pour une génération…
Je peux avoir des divergences avec certaines des affirmations des uns et des autres sur Libr-critique, mais ces divergences sont inévitables dans la mesure où votre travail critique se positionne dans un rapport fort à l’histoire littéraire / artistique (en se référant à la modernité et la post-modernité) et induit des connections, des rapports, que tout un chacun peut de son point de vue légitimement contester, au vu de la même histoire littéraire / artistique, si celles-ci et ceux-ci lui semblent lacunaires ou biaisés. Mais il faut reconnaître que peu de critiques aujourd’hui tentent même de positionner quoi que ce soit, et l’effort de Libr-critique est louable dans cette dimension de son travail.
Heureusement les commentaires sont possibles sur Libr-critique, c’est une très bonne chose. Dans cinquante ans, certains s’amuseront à relire, décoder, recoder et tirer au clair les crispations et les schizophrénies des uns et des autres. Quant à reparler de déontologie, personne n’en fera jamais l’économie.
Bien cordialement,
Guillaume
Je viens de relire l’intervention de Charles qui a mille fois raison…
Les questions sont ailleurs. Au travail tout le monde.
Guillaume