Alain Helissen, Le journaze du soir (extraits)
Faits divers rigoureux, datés du jour de ponte
On découvrira ci-dessous la deuxième série d’extraits du Journaze du soir [lire la première, précédée de l’Avant-propos], qui se situe dans le droit fil des Nouvelles en trois lignes de Félix Fénéon (1906). Voici la présentation de l’auteur, dont on ne manquera pas de visiter le blog :
" Le journaze du soir constitue un manuscrit en quête d’éditeur. De très brefs extraits ont fait l’objet déjà d’un micro-livre présenté dans une boîte d’allumettes (VOIX éditions) et encore disponible à mon adresse. D’autres extraits ont paru (et paraissent encore ponctuellement) en ligne sur « facebook » où ils ont suscité de nombreux commentaires de la part d’amis « facebookiens ». Cette version commentée, c’est mon souhait le plus cher, mériterait d’être publiée sous forme de livre. Avis, donc, aux éditeurs intéressés qui liraient ces lignes…"
Alors qu’il s’apprêtait à tirer un coup le mari blesse mortellement sa femme. La ligue pour les droits de la femme a demandé l’ouverture d’une en(qué)quête.
Si le taux de suicide est douze fois plus élevé en prison qu’à l’extérieur, il faut toutefois relever que les accidents de la route sont rarissimes en milieu carcéral.
De nombreux pauvres invités au repas du Seigneur ont été retrouvés errants à la périphérie des villes. Ils se sont plaints d’un manque total d’information quant au lieu exact du repas en question.
Un adolescent de seize ans a été froidement abattu par un policier à qui il proposait de jouer aux billes avec lui. Le policier a été muté dans une banlieue où il est strictement interdit de jouer aux billes, même avec des pierres.
Lassée des extravagances de son voisin qui passait chaque matin la tête entre les thuyas limitrophes de sa propriété pour la regarder en train de se dévêtir sur la pelouse, Germaine Poilolard a porté plainte contre Emile Couillemolle pour voyeurisme exacerbé. Ce dernier a encore aggravé son cas en traitant purement et simplement sa voisine de « grosse salope. »
Cinq mille hectares de pinède ont été ravagés par le feu à la suite d’un fâcheux incident mettant en cause la maladresse d’un homme qui avait malencontreusement allumé un feu de bois nocturne destiné à éclairer l’arrière-train de sa dulcinée, en prélude à des ébats amoureux. Les deux tourtereaux ont péri grillés dans leur plus simple appareil. Un porte-parole du Vatican n’a pas manqué d’évoquer les flammes de l’enfer.
Les plus grands artistes vivants dépassent rarement la quarantaine. Les plus hautes personnalités politiques ne dépassent qu’exceptionnellement les deux mètres.
Lors d’un récent concert en Ardèche, Johnny Hallyday a été prié de ne pas interpréter l’une de ses chansons fétiche Allumez le feu. Le service d’ordre lui a suggéré de la remplacer par son vieux tube Noir c’est noir. Malheureusement, en allumant des milliers de briquets pour y voir plus clair, les fans mirent le feu à l’herbe desséchée et les flammes se propagèrent rapidement jusqu’à un parking de fortune, embrasant de nombreuses voitures et motos. Comprenant qu’il ne s’agissait pas d’effets spéciaux, les sapeurs-pompiers vinrent heureusement à bout du sinistre. Johnny fit ce commentaire avisé : Ah! que c’est un spectacle d’enfer !