Avec cet agencement répétitif, Mathias Richard revisite le topos poétique par excellence… [Mathias Richard sera ce soir à DATA, 19H-22H : 44, rue des Bons Enfants à Marseille]
J’aime une rose. Elle mange des roses, elle fume des roses, elle se lave avec des roses, sa peau est couverte de roses, ses cheveux sentent différentes roses, elle chante des roses, quand elle chante des roses sortent de sa bouche, sa voix caresse le monde de roses.
Avec elle on fait l’amour parmi les roses, on se baigne de roses, on rit rose, on broie du rose, on brûle des roses, on éternue des roses, on a des roses dans les yeux, dans le blanc de l’œil, et dans le dos, et sous les pieds, et dans les mains, les lits explosent de roses, et les rues, les édredons, les enfants sont roses, ou presque, les paupières se closent, on sourit avec des langues roses derrière les bouches closes, tout se surexpose, la Terre est blanche comme une rose, sur tout le corps on a des pétales que l’on effeuille et que l’on sent, respire, renifle, partage, toute la peau est composée de pétales blancs, rouges, roses, même noirs, on les partage, on les lèche, on les mordille, partout sont des roses qui sont des sexes, la Terre est un sexe, la Terre est rouge comme une rose.
Faire l’amour avec une rose, parmi les roses, qui se lave avec des roses, parmi des cascades de roses, qui rit des roses, qui chante des roses. Des roses sortent de sa bouche et de sa voix. Avec elle on se met au rose, on crie des roses, on brûle des roses, on broie du rose, on parle de roses, on écrit des livres sur les roses, on élève des roses, on réfléchit rose, on caca rose, on voit la rose en vie, on a des sexes roses qui écrivent des mots roses, on rosit, on s’enrose, on ose, on a des rêves-sexes, des réflexes roses.
Je connais une rose. Avec elle, on rit rose, on jouit rose, on brûle des roses, on broie du rose, on voit la rose en vie. Avec elle, la Terre est rouge comme une rose.
avec elle
on se rase rose, on se rise rose, on se rouge rose,
avec elle on saute de pétale en pétale, on s’effeuille, on se file,
on s’enfile, on s’affole, s’essouffle, se souffle, se caresse,
on se baise, s’arrose, se love, s’enlève, s’olive, s’
on s’
on ssssssssss’
on sent
on sexe
on sixe
on soze
on saoûl
on sou
on sou
on suze
on sensasose
on sensachose
on sent ces choses
partout
de la mose
de la mouse
de louse
de milouse
de l’ose
de l’expose
de la sexpose
de la susurexpose
close n’ose se la chose
et
je vois rose
et
on crie rose
(on se câline de roses
on se chatouille avec des roses)
et
on boit des vins roses
on file rose
on panthère rose
on barbe rose
et
on chie rose
on voit rose
on crie rose
Avec elle on marche dans la rue, et la ville est une rose. On se fait des clins de rose. Même, on pleure rose.
Avec elle on crie des roses, on pleure plein de roses, on frit des roses, on grille des roses, on fait des pots aux roses, on croque des roses. On en crache, on en souffle, on les vaporise, on les déglutit ; le vent nous caresse de pétales, on les boit, avec joie ;
On désire, avec plaisir ; on sirote, des roses. On les mâche, on les digère, on les chie ; on les jouit, on les prie, on les crisse,
Je connais une fille, elle s’appelle Rose.
Dans un monde on l’on écorche des roses, où l’on étripe des roses, où l’on pend des roses, moi j’oseaime une rose dont je me couvre et que je couvre, qui m’arrose et que j’arrose, qui me boit et que je bois, qui me mâche et que je mâche, qui me mâchouille et que je mâchouille, on se terre, se terreau, on se roule, on s’engraisse, on se soleille, et ça brûle et ça pique et ça rit et ça sent bon : ça chose…