Cette question, il fallait bien se la poser, alors autant le faire en cette reprise de Libr-@ction, cette opération qu’il vous appartient de faire vivre : l’écriture est-elle action ?
On appréciera la subtilité critique et rythmique de ces vers envoyés par un écrivain bien connu de nos Libr-lecteurs, Patrick Varetz – romancier déjà confirmé dont le travail en vers est le prolongement d’une œuvre envoûtante (poèmes 1132 à 1134 extraits de Deuxième mille, travail en cours – Premier mille devant paraître chez P.O.L en fin d’année).
1132.
À écrire je n’agis pas mais je
Creuse ce n’est pas pour rien
Que l’on dit coucher les mots
Coucher sur le papier à écrire
Je penche vers l’intelligence
C’est trop facile alors de me
Caresser chien trop savant
Jamais je ne m’insurge au-
Dessus du vide je fais mon
Numéro.
Numéro
1133.
Chien savant qui apprend
À mordre avec les mots il
Se frotte partout sa petite
Queue sortie de son étui
Le voilà qui fait le beau et
Savamment qui bave et
Mord avec ses mots dès
Qu’on le prie d’ouvrir sa
Gueule.
Gueule
1134.
La langue s’ouvre dans
Le meilleur des cas elle
Se répand perspectives
Inattendues qui courent
Sous la peau l’esprit se
Soulève la vie s’efface.
Quelle est la meilleure
Chose qui puisse arriver
Selon toi avec la poésie
La lire sans lendemain
Ou s’obstiner et écrire
Et prolonger l’illusion ?
Et prolonger l’illusion ?
Petite rectification, cher Fabrice :
ces trois poèmes, comme leur numéro l’indique, font partie de la suite, c’est-à-dire d’un Deuxième mille, à paraître — je l’espère — quand il sera achevé : pas avant trois ou quatre ans.