Du X… pas du sonnet en X, en tout cas… De la critique sociale dans le monde du travail. Signé par un habitué en la matière : Romain le GéoGrave ! [Lire le dernier texte de Romain le GéoGrave]
x1 est un chef
x² un sous-chef, ou chef-adjoint
xetc. sont les chargés de tout ce qu’on veut
réunion des pipes. on en est arrivés là. comment. à raconter l’inutile, le vide, le creux. le flicage de x1 qui veut savoir ce qu’on a fait la semaine d’avant qu’on va faire la semaine d’après. triste tournez-manège. un après l’autre. à vos ordres j’ai eu un rendez-vous avec je vais voir celle-là. on s’en fout plus ou moins. on est installé devant un café. quoique le thé arrive en force. avec les bobos et les stagiaires arrive le thé. sûrement moins agressif pour les dents l’estomac meilleure haleine moins sale gueule de caféiné. le début de la réunion est immuable. 9.30 et toujours le même jour. c’est l’institution de la règle qui rassure. pour une impression d’équipe assez vague d’ailleurs. l’heure d’avant est. elle est consacrée à. du vide. de l’ordi de la cafetière aller chercher de l’eau dans les chiottes. de la bise aux collègues. ça pour on c’est difficile de se bécoter dès le matin. un incompris du système. on ne les connaît pas. on n’aime pas ça. le contact physique avec des gens qu’on n’aime pas peu ou pas trop. c’est électrisant crispant. et si on se touchait la bite et les nichons plutôt. pas pire. l’heure passée on revient au café. gueule devant la tasse derrière la tasse. tout dépend de l’état du jour. tout dépend de ce qu’on n’a pas à dire. au début on se sent important puis de moins en moins. l’intérêt pour la réunion décline. au commencement était le vif intérêt. on va apprendre quelque chose. un mois six mois deux ans. et puis finalement on apprend que les anciens qui paraissaient spécialistes disent toujours la même chose. spécialisés dans le recyclage de leurs anciennes connaissances. la reconnaissance décline. les paroles se diluent dans la tasse de café ou s’échappent on ne sait pas trop où. tiens à la réflexion où vont ses paroles. et les paroles de on. on essayait de dire quelque chose au début. un petit quelque chose qui tienne la route. un rien qui éveille l’équipe des x. on s’entend. on s’écoute. parler fait du bien à on. on se croit bien intelligent un moment. et en fait on dit toujours la même chose. création nulle zéro pointé. sur vingt allez on met quand même la moyenne parce qu’on essaie de faire de l’humour. humour moisi de réunion. l’humour de quand on est fatigué voilà. fatigue d’entendre x1 qui a toujours quelque chose à dire. comme xetc le nouveau venu qui était déjà venu. ce qu’ils sont longs à expliquer. ce qu’ils sont tragiques dans leurs explications incompréhensibles. on met toujours dix minutes à décoder leur langue. des sigles des gens inconnus des oublis des confusions du flou. oh que oui la réunion est floue. on ajoute du flou au flou un peu par petites touches et ça fait du bien. sauf qu’on ne pige rien. mais qui s’en fout. on compte les tours. en fait un par séance. 52 semaines. 47 de travail. moins quelques unes loupées. ça fait un 45 tours par an. une belle chanson à la fin de l’année. un refrain monotone. et le chargé de pévé. parce qu’on garde une trace du rien. toujours. au cas où on ou les autres se mettent à vouloir se remémorer cette grande expérience de poésie orale. rendez-vous réunion j’ai vu je pense que on devrait ou pas le site les congés. un magma de vie de bureau. même regarder dehors est désespérant. l’espoir faut pas y penser. on y pense pas faut être sérieux faut pas penser du tout ou pas trop. la salle elle est presque devenue trop petite pour toutes ces têtes bien pendantes. de quatre à douze x l’équipe grandit le tour d’horizon est de plus en plus long. au bout du xème on décroche on lâche tout on saute sans parachute. tellement c’est long long mais long. ferme ta gueule c’est tout ce qui vient à l’esprit au bout d’une heure de chute verbale. la décroissance des activités ne devrait pas être seulement économique. il faut réduire l’activité parlante. l’activité de bavardage pour tout et rien. faisons des économies de signes verbaux. une question. pas de réponse. on n’a rien à dire. ne disons rien. quelle belle économie pour tous. si même une réunion pouvait se passer debout sans rien dire. un signe de tête. un clin d’œil. un mouvement d’épaule. pas plus. quelques mots pour terminer. quel pied. quel repos. on éviterait les fautes de goût. les fautes de français. les fautes de frappe. les fautifs et les faussaires. on s’éviterait une gastrite rien qu’en ne les entendant plus. on s’éviterait l’envie d’une baffe dans la gueule pour faire taire l’autre avec son accent d’on ne sait pas où. qui ne comprend rien n’a rien à dire et parle tant. on serait bien en fait. on serait sur un ton juste. une bonne longueur d’onde avec soi-même. un peu avec les autres aussi. et avec le pigeon qui est dans son nid à la fenêtre. et qui nous regarde avec son air con de pigeon. et qui se dit qu’ils sont cons ces humanoïX.