. Je n’allais pas loin. Mais ce fut un petit commencement
. Il ne pouvait régler cette langue que par le poids de cette peau qui raclait toute la crasse du monde
. Refaire les chemins. En sens inverse. C’était cette manière de jouer en solitaire. Et de faire collectif
. Une fleur qui fleurit sur une ruine est déjà un voyage lointain, ou une pause sur une étendue bleue
. La position du bleu. Du rouge. Une trame. Une trajectoire. Et pourtant, je ne vois que du bleu, du bleu, et de la cendre. Entre idéal et abject.
. La nature est déserte. C’est une hypothèse. Un vide opératoire. Elle sera déserte, après.
. Je compte les troncs pour m’assoir à côté des trous commis par des taupes. C’est un calcul par composition.
. Le bornage est une langue saturée.
. La conduite dynamique, un train pour un poème.
. Il manque un élément. Est-ce l’espace du poème ?
. Il s’accoutuma au fracas des lies, au fracas des mêlées inédites, à l’aspect tendre des moribonds. Puis, le vent tanna sa peau.
. Je voudrais écrire comme si j’avais gardé le silence.
. Se déplacer sous la surface du poème peut apporter un certain soutien.
. Il se sentait tellement sensible et affaibli, malgré ses heures de sommeil, qu’il aurait été capable d’entendre le son des couleurs.
. La taille droite, le geste mesuré. Une lumière sèche. Aiguë.
. On ne piège pas une voix. C’est elle qui vous piège. Sans appel.
. Nulle neige. Rien venu du ciel, rien venu de soi. Ni d’ailleurs. Ou plutôt, si. Un mot. Une erreur.
. Nous repérons l’oubli d’après la direction de la fumée dans la mémoire des villes.
. L’attente, ou l’attente de la pensée à se dévoiler, est une étape d’apparence subjective et dilettante, vers la plus objective et croyante des conclusions.
. Mon travail d’aiguille, de micro-localisation, d’incision fine, est un exercice mental. J’enfonce l’aiguille puis je la retire, et c’est comme si je retirais quelque chose de mon cerveau
. Une vie de silence, cela laisse le temps de chercher ses mots. Monodie des latences. Ou du murmure.
. L’onde est un cri qui perce le manteau du déni.
. Les secousses de l’inattendu, c’est un peu la géo-graphie qui tremble.
. Au pas cadencé, est un contre-rythme, une contre-vue dans l’empaquetage des fréquences.
. Un corps ne se renferme pas. Il s’éteint.
. Tout est mélangé. Il croyait que la couleur était phytosanitaire.
. Ils ne savent pas tuer sous protocoles. Ils sont hors champs. Des ramassis. Des recalés de toute structure. Des ordures brisées de leur isolement. Des petites masses mêlées que tout referme. Sans rigueur. Sans âme. Ils ajoutent de l’insécurité à la fixité de cet ordre même de mise à mort.
. Le bien être d’une tranchée. La dernière expiration.
. Il faut ordonner l’espace. Mais c’est l’espace qui décide. Qui crée. Toujours. De cette forme de décidable dans l’indécidabilité. Tu ne fais de fait que l’habiller.
. Les on-dit ne produisent pas d’énonciation. Tout au plus, ils ne créent qu’une masse d’opinions, d’oripeaux serviles, d’histoires officielles, d’illuminations cathodiques, et de fautes déguisées en vérité.
. La vulve est une petite bouche, ou un petit phonème de salive. Elle recartographie le corps en y mettant du désordre
. Le poème n’est pas la dévotion définissant l’identité du langage, mais la langue même, la langue se faisant langue, la langue s’opérant d’elle-même, soustraite de cette valeur sacrée qu’il voudrait lui accorder en lui exigeant une reconnaissance universelle
. On parle d’une blessure. Quelle couleur ? Quelle densité ? Quelle intensité ? Ferait-elle support, à sa manière. Nous ne le savons toujours pas. Elle serait au fond d’un temps. A pincer les plis d’une mémoire. Quelque part, tapie sous la langue. Festonne l’incertain. Elle aurait cette présence de l’œil aveugle noué à des mots perdus.
. Mettre sa langue au clou permet de retrouver un vocabulaire
. Du silence derrière les dents. Le rien. Une amorce. Peut-être. Comme une salive tire sur la forme.
. Tu crois toujours pouvoir finir un poème avec des points de suture
. Si une rose tombe dans l’eau encore rouge ça troue l’imparfait d’une mémoire ça troue nos peaux nos racines nos rêves ça troue le désir
. Ça fait partie de l’existence d’une forme que d’être le parasite des métaphores
. La puérilité implique une susceptibilité à l’absorption et à l’enchantement que l’on associe aux intoxicants chez l’adulte
. Expédier le rêve. Suturer la plaie de vivre.
. Les mains qui se détachent du visage forment un nouveau visage. Sans terreur.
. Il faut attribuer ce regard animal dans son extase.
. Il y a des enfantillages des bêtises, des manques de sagesse, des fantasmes ; en même temps, c’est là que se trouve ma créativité. Si j’essayais de la contrôler, et de la rendre plus mature, ce ne serait pas bon du tout. Ce serait sans intérêt, sans aucune vivacité.
« L’absurde est essentiellement un divorce » (Camus)
. L’erreur comme une faillite d’actions plus ou moins programmées pour atteindre des buts souhaités, en dehors de toute intervention d’événements imprévus
. La décision absurde comme une action radicale et persistante contre le but qu’il veut atteindre, dans un cadre de rationalité de référence (individu ou groupe)
. Nous faisons semblant d’être là, n’est-ce pas ? Et parfois, peut-être, nous le sommes vraiment. Mais seulement dessinés, ébauchés : dans l’instant même de nos propres extractions – le dedans, c’est-à-dire le dehors
© Bandeau : Y. Klein ; en arrière-plan, V. Molnar