Mouvement n° 1
La gardienne de l’immeuble m’a dit : Mme Packi, neuvième, et son mari, deuxième. Ah, ils habitent séparément ? Si j’vous l’dis ; c’est des malades. Suis pas médecin, mais j’ai pris l’ascenseur et appuyé sur le 9. Mme Packi, au terme du stage Retour à l’emploi qu’elle animait, m’avait dit : Venez nous voir, mon mari aura un travail pour vous. Sa porte était entrouverte, me voilà au salon. Un type (j’ai supposé le mari) était assis profond dans le canapé : la 50taine, rasé de près, sinistre, accablé, l’air d’attendre le dégel. Or j’étais le dégel : Asseyez-vous, dit-il. Voilà : Martha va venir ; elle aura des exigences, vous devrez les satisfaire, je vous paierai 12 €/h. C’est quoi exactement, ménage, petit bricolage ? Sexe, il a dit. Je me suis levé pour partir : Pas de mon ressort ! C’est vous le mari ! Il a sorti un flingue (sorti d’où ? va savoir) et m’a visé : Holà, pas si vite amigo ! Et Martha est arrivée : Comment il est ? Récalcitrant mais ça va aller, a dit le mari ; il fera l’affaire. On est passés dans la chambre. Drôle d’ambiance. Monsieur me pointait toujours avec son arme. Martha m’a donné ses instructions. Rien de décoiffant ; popote son menu érotique, sauf qu’elle voulait que ça dure long, des heures, impérativement (là était le vice), et en présence du mari bien sûr. Bon. Silence pesant puis : Au travail ! a gueulé M. Packi. Et là, gueulant également : C’est non, j’ai dit ; trop mal payé, je refuse le job ! Ça l’a estomaqué. Il a baissé son arme. Il était tout penaud. Eh quoi, Martha ne vous plaît pas ? Ah non, j’ai dit, pas à plein temps ! Là encore, ça l’a troublé. Pauvre type. Il cogitait. Et soudain illuminé, il a relevé son flingue et tiré sur sa femme lovée au creux du lit. J’ai filé sans demander. Dans le hall, je tombe sur la gardienne. Eh ben, déjà fatigué ! elle a dit.