[Chronique] Michaël Moretti, Un Peigne-sans-tête qui décoiffe (à propos de Fred Léal)

[Chronique] Michaël Moretti, Un Peigne-sans-tête qui décoiffe (à propos de Fred Léal)

juin 5, 2025
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[Chronique] Michaël Moretti, Un Peigne-sans-tête qui décoiffe (à propos de Fred Léal)

Fred Léal, Le Peigne-sans-tête & autres récits décoiffants d’un médecin de campagne, éditions de l’Attente, Bordeaux, avril 2025, 284 pages, 22 €, ISBN : 978-2-493426-15-4.

 

Voici un best of Peigne, l’Eiffel d’FL, après Un petit nuage ? (Patin & Couffin, 2000 ; inédit), où Bitus laisse songer au drolatique Pauvre Bitos ou le Dîner de têtes de Jean Anouilh, Peigne-noir (éditions de l’Attente, 2004), une histoire de substitut dudit objet, digne du Collier de la reine de Dumas ou Madame de d’Ophüls d’après de Vilmorin, entre une hôtesse démunie et un macchabé coincé dans les WC, le Peigne-rose (2007), où mamie ne délire pas tant dans l’Ehpad, et le Peigne-jaune (2011), une histoire de chien jaune à la Simenon en lien avec ceux utilisés dans les tranchées, le Peigne-cocotte (2020), avec force caquetages où se retrouvent la fusée Ariane et un légionnaire de Selva !,  avec un inédit, Le peigne-sans-tête, plus grave, rough, avec une quiche, dont un dessin original de Françoise Valéry, aboutissant à un accouchement dramatique sur fond de viols et génocide rwandais, au passage quelques hommages à Deluy et Prigent (lui ; dans le jeu des 7 familles, Quéquette ; Fred : Peigne). Le Léal, le Loyal, ce matador ou orpailleur des mots, ce chiffonnier littéraire qu’étudia Compagnon au Collège de France, que j’avais découvert avec Mismatch aux mêmes éditions de l’Attente (Bordeaux), est attendu comme le prochain dessin de Lefred-Thouron : réjouissant. Etant initié à la poésie visuelle par La satire ménippée et un tapuscrit catholique confidentiel, Le Triunisme de Miecislas de Dukszta, je suis sensible, alors que Claro va replonger dans une nouvelle traduction de Mark Z. Danielewski, aux liens entre fragments de réalité collés comme dans ceux du schéma de l’inconscient de 1892 par Charcot, similaire à la première topique de Freud en 1900 vu dans l’expo « Sigmund Freud. Du regard à l’écoute » par Jean Clair au MAHJ, quasi parallèlement au simultanéisme français (Barzun, Divoire, etc.) étudié par Isabelle Krzywkowski à Grenoble, à la suite de Bob sur Ghil, la modélisation des réseaux neuronaux ou, pour le fan de Zorn, de liaisons dans l’acousmonium par Max/MSP. Pour le féru de schémas à la Pubmed, la couverture sur papier Sirio Color Rough (FSC mixte) teinte Flamingo, en lien avec les flamants roses dessinés par FL dans Le Peigne rose, qui était épuisé, se tachant facilement malgré des doigts propres, ressemble à celle d’une thèse. Celle sur Albert Pitres (1848-1928) et Emmanuel Régis (1855-1918), les deux fondateurs de l’École Neuropsychiatrique de Bordeaux sous la direction de Mme Verdoux ? L’IA envahit la médecine, l’oralité est traitée comme une carte heuristique comme indiqué en documentation inspirée des sciences cognitives et du deep learning. A force de consultations, les bobologues semblent avoir un rapport à l’oralité : WCW, Döblin, Céline, dont il est question dans le Peigne-cocotte etc. Fan de Novarina, il s’inspire côté livres d’Expériences de l’Américaine Bernadette Mayer, mais on songe à Mallarmé, Iliazd, van Ostaijen, Cendrars et Maurice Roche ; pour le cinéma, ce sera Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia (Bring Me the Head of Alfredo Garcia, Sam Peckinpah, 1974), Les Naufragés de l’île de la tortue (Jacques Rozier, 1975), Histoire de cannibales (Dei yuk mo moon, Tsiu Hark, 1980) ou Le Roi de l’évasion de Guiraudie (2009). Il est certain que Léal n’est pas un peigne-cul. Ces anecdotes dignes de carabins sont réjouissantes mais, s’il y a de la cuisse à la Giresse, tout de même moins profondes, dans leur traitement, que les textes d’Arno Schmidt dont il s’inspire (les étyms et photos-témoins cités en préface). Le moléculaire de Léal, « maelstrom de poésie bancale » avec page-partition, espacement dans la page, variétés de corps, de police, d’empâtement (d’ailleurs j’ai repéré une grosse tache d’encre p. 252 : alors l’imprimeur tourangeau ?), inserts, fenêtres distincts, etc. dans un possible partage du sensible à la Rancière – ne reste que l’impossibilité de transmettre la richesse du témoignage d’un patient, est distinct des motsléculaires de Sivan, même s’il en est possiblement l’héritier. Le sérigraphe Franck de l’Attente se fend d’un dessin de chien pour le Peigne-jaune : avec le dessin de la quiche, nous pouvons en conclure que c’est un livre entre amis, dans la bonne humeur. Nous sommes conviés à ce repas. Alors une chanson pour celui – bien qu’ici il soit plus question de jazz – qui a écrit quelques chansons pour des petits groupes de rock ? Pourquoi, alors que Cadiot a été magistralement adapté au théâtre, Léal, avec force onomatopées, ne l’est pas, tant cela paraît évident ? Tupperware© pour attendre, Fred ! On attend un peigne sur la souris déglinguée. That’s all folks !

 

 

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