Audience n° 4
13 / Dans votre véhicule, on a trouvé un bel ensemble de pelles, pioches, cordes, draps, plaids, et six cadavres de chiens encore chauds. On me dit que le vice de pendre des bestiaux domestiques vous travaille fort et vous occupe à plein temps. Voilà qui a de bons côtés ; nuisibles sont les chiens, l’oisiveté aussi. Mais pourquoi la pendaison ? Ce rude spectacle peine les vieilles et les écoliers. Pensez-y. Et à l’avenir, procédez plutôt par piqûre.
14 / Vous êtes connu (et coté, me dit-on) dans le milieu de l’art en qualité de photographe d’incendie, spécialité (ou branche ?) dont j’ignorais tout. Beau travail ! Maisons isolées, forêts, campings, véhicules et immeubles, bonzes orientaux, etc. : l’ensemble est saisissant. Le portrait d’Ann, votre femme, nue, enchaînée avec son amant sur un lit en feu, m’a bouleversé. Suis naïf, je m’interroge : c’est pris sur le vif, mis en scène, ou les deux ?
15 / Ah, on vous a volé votre maison. Bravo ! C’était quoi, un pavillon de banlieue ? Prenez un hôtel en ville. Le room service vous consolera. Quoi encore ? Votre mari a été saucissonné en huit rondelles par le train qui lui a passé dessus, bon, ennuyeux, mais si besoin vous en trouverez un autre, également portionnable ; je parle du mari, pas du train. Que faisait-il sur la voie, cet ivrogne ? Vous avez désiré ce suicide, soyez une veuve digne.
16 / Le service des contrôles inopinés a épluché vos ordures. Les bacs ont été saisis et envoyés au labo. Le bilan est : aucun tri. Tout est mélangé. Les agents écolo-punitifs vous adresseront l’amende forfaitaire de 555 €. Ça donne à réfléchir, non ? Ce n’est pas tout. Dans vos sacs-poubelle, il y avait aussi des restes humains : tripes, scalps, os mal rongés, et des utérus frais. Il ne serait pas un cannibale, des fois ? Merci de vite nous rassurer.