[NEWS] NEWS DU DIMANCHE

décembre 1, 2024
in Category: livres reçus, News, UNE
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[NEWS] NEWS DU DIMANCHE

Pour bien commencer ce dernier mois de l’année, en UNE deux parutions exceptionnelles, avant que de retrouver nos Libr-événements et deux nouvelles aventures d’Ovaine (Tristan Felix)…

 

UNE : deux parutions exceptionnelles /Fabrice Thumerel/

► Suzanne DOPPELT, Un beau masque prend l’air, P.O.L, novembre 2024, 80 pages, 16 €.

Présentation éditoriale. A Vianden une araignée, un lion dans un studiolo, un rhino au carnaval, une chorale de grenouilles … ni pendu ni au pied d’une potence, un beau masque prend l’air et la manière dans les dix-sept tableaux que traverse ce livre, « un champ d’espace-temps a été ouvert : il y a là une bête » et chaque fois elle nous regarde silencieuse, sa note inimitable, comme la peinture.

Le point de vue LC. C’est avec un grand plaisir que nous retrouvons le théâtre cosmopoétique de Suzanne Doppelt. Une fois encore le charme de la poète opère, qui nous transporte de l’immobile au mobile, du prosaïque au féerique, du réel au spirituel… Celle qui tourne le dos à la représentation normée du monde met en place un petit théâtre illusionniste, un dispositif optique qui met en branle la machinerie poétique. Un rien suffit à cette magie : « un trou d’air ou de lumière il en suffit d’un pour commencer à peindre et voir une partie réduite du monde »… Et aussi dix-sept tableaux soigneusement choisis, à partir desquels nous sommes plongés dans un envoûtant palais de glaces.

 

TXT fête Verheggen : Troumlala, Lurlure, lancement en ce début décembre 2024, 126 pages, 18 €.

Présentation éditoriale. Ce numéro exceptionnel de la revue littéraire TXT est un hommage au grand poète belge d’expression française Jean-Pierre Verheggen, né en 1942 et décédé en novembre 2023. Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages dont la plus grande partie a été publiée chez Gallimard.

Jean-Pierre Verheggen a été étroitement associé à la revue TXT depuis le n°1 (en 1969) jusqu’au n°35 (cinquante-trois ans plus tard). Autour de textes inédits du poète, ses anciens compagnons de route lui disent adieu : Philippe Boutibonnes, Éric Clémens, Alain Frontier, Pierre Le Pillouër et Christian Prigent.

D’autres auteurs contemporains, Jean-Pierre Bobillot, Lambert Castellani, Cuhel, Bruno Fern, Typhaine Garnier et Charles Pennequin, ainsi que les universitaires Bénédicte Gorrillot, Olivier Penot-Lacassagne et Anne-Christine Royère, participent également à ce numéro. Sans oublier Jacques Bonnaffé, l’interprète truculent de ses textes sur scène.

Dans la tradition verheggénienne et dans l’esprit de la revue, cet hommage mêle le sérieux et la dérision, en favorisant les grandes irrégularités du langage – ainsi que l’illustre son titre, tiré d’une interview de Jean-Pierre Verheggen donnée en 2009 :

L’autre jour, j’étais à Charleville-Mézières, sur la tombe de Rimbaud, et je me disais : nous sommes devant un troumlala”. “Troumlala”, ce n’est pas un mot qui existe, qui va comprendre ça ?

 

Le point de vue LC. En cette drôle d’époque qui s’extrême-droitise, dans laquelle tout se lisse et se rapetisse, où tout le monde s’la pète et où tout peut péter, vite allons… vers rêve again ! Un rêve fait langue, et même violangue… Adonf vers langagement et l’insonscient ! En route pour le meilleur et pour le rire ! Comme le rappelle Christian Prigent, ce rire est politique : « Les jeux de mots fragilisent la solidité des représentations […]. Si nulle proposition de langue ne tient (sous les coups du jeu poétique) alors la représentation verbale communément partagée se lézarde et un doute pèse sur le sens commun » (p. 29). Dans « Cap au pitre ! », Lambert Castellani enfonce le clou : « La langue de Verheggen, c’est le méat bas des bouches bées […]. C’est la vengeance de ceux qui méprisent la langue officielle vue à la TV » (73). Ce qui tranche avec ce qui domine l’espace poétique aujourd’hui, entérine Charles Pennequin : « une poésie de poète qui fait de mal à personne, qui parle plutôt le langage des communicants que celui des peuples » (56).

Pour fêter « Jean-Pierre le ninitszchéen », le « jovial pitre » (Pierre Le Pillouër), le « Vieil Heggen » (Olivier Penot-Lacassagne), le « vrai Heggen » (Jean-Pierre Bobillot), ceux de la tribu TXT, bien entendu – les anciens comme les nouveaux , Bruno Fern en tête -, pour anecdotes sur le petit homme d’âge (Le Pillouër), mais aussi des universitaires (on lira les articles remarquables de Bénédicte Gorrillot – « Jean-Pierre Trouvèrheggen en Castafiore catastrophique » – et d’Anne-Christine Royère – « Portrait de Jean-Pierre Verheggen en mauvais lecteur ») et d’autres poètes – dont Cuhel, pas encore cité, qui s’attaque de façon caustique aux vieux-ranstiers çaprofiteurs : « Vous qui avez pognon sur rut / Vous qui thésaurisez / Vous qui terrorisez / Vous qui pornotrafiquez / Vous qui péculez / Vous qui spéculez / Vous qui spectenculez »…

Vous reprendrez bien une petite cure d’idiotie comme antidote à la Grande Connerie universelle !

 

Libr-événements

Mercredi 4 décembre 2024, 19h à la Maison de la poésie Paris : TXT fête Jean-Pierre Verheggen [réserver]
Par la revue TXT, avec Christian Prigent, Anne-Christine Royère, Lambert Castellani, Bruno Fern & Jacques Bonnaffé

 

 

Nouvelles aventures d’Ovaine /Tristan Felix/

Lorsqu’Ovaine rit à marée basse, les grains de sable s’échauffent si fort qu’ils brillent la nuit.

On dirait de la braise. La mer ne peut plus les éteindre.

Les dunes se tordent d’un rire épouvantable. Les choux marins se marrent comme des grenouilles.

On ne sait pas pourquoi. Ça pouffe et gondole de partout, jusqu’au fond des rías.

Le loup grêle dit que tous en ont marre de faire semblant de ne pas rire.

C’est que ça ne rigole plus, moi j’vous l’dis.

*

Le rat vit au lit, s’imagine Ovaine en enroulant un spaghetti autour de son oreille.

Mais alors TOUT chante, même les mots morts, comme DOMUS, TEMPUS !

Ni une ni deux elle fait mousser le dos de son rat violi par le froid, le temps que lui pousse une fourrure de lion.

Un fou rire aussitôt s’empare de son rat qui éclabousse toute la maison de sa fureur de joie.

Mais là-bas, au fond du zoo, le lion fait comme un rat, n’ose plus toucher à son plat de raviolis.

Il aurait préféré Mozart est là, sans rire.

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Fabrice Thumerel

Critique et chercheur international spécialisé dans le contemporain (littérature et sciences humaines).

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