[News] Libr-fêtes (2)

décembre 23, 2024
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[News] Libr-fêtes (2)

En cette avant-veille de Noël, passons de la crèche à 2025 avec Max ERNST… Et après une nouvelle livraison des aventures d’Ovaine par Tristan Felix, notre quintessence de Libr-livres reçus…

 

UNE

Avec Max ERNST

corrigeons le tir

pour 2025…

 

Nouvelles aventures d’Ovaine /Tristan Felix/

– Oyez ! Oyez ! Quand Ovaine balance une blague, elle fait un de ces tabacs ! lance le loup grêle devant l’assemblée des vagues accourues à son dernier spectacle.

– Attention, pas drôle à tous les coups mais elle a une façon de t’enfumer qui secoue la moëlle, ch’te dis pas !

Sur le sable, glisse alors une méduse, tellement secouée qu’elle se sent pousser au dedans un fin squelette.

Elle demande si elle fait partie de la blague du spectacle ou si elle existe à son insu.

Le loup grêle, qui sait lire dans l’âme des petits transparents, lui assure que son squelette lui va comme un gant.

Les vagues applaudissent à tout rompre et emportent avec elles toute la méduse enchantée.

*

Quand elles sont prêtes à mettre bas, Ovaine emmène ses brumes paître au sommet d’un glacier.

Elles ne tardent pas à s’effilocher et s’égarent dans les failles d’où tintent leurs grelots de cristal.

Mais le loup grêle veille à les rassembler pour qu’elles ne prennent pas froid.

Elles délivrent bientôt toute une marmaille de brumeroles qui courent dans tous les sens. Le loup en perd l’esprit.

Si blanche transhumance éblouit même la glace dont la transparence se trouble.

C’est que les brumes s’échappent de la pensée pour n’y jamais revenir.

 

Libr-livres reçus /Fabrice Thumerel/

Guy BENNETT, En exergue, Lanskine éditions, en librairie le 5 janvier 2025, 80 pages, 15 €.

Quatrième de couverture. En exergue est une méditation sur l’usage (et l’abus) des citations dans le discours, dans la littérature, dans la vie. Il présente de manière parfois drôle, parfois grave une des questions primordiales de la littérature contemporaine, le cut up et la citation. Guy Bennet dans ce texte use et abuse de la citation dans un jeu en abîme dénonçant tout en utilisant. Le texte se compose d’une série d’épigraphes appariées et de gloses qui les commentent. Ces épigraphes sont organisées en cinq sections thématiques qui, dans leur ensemble, tracent une trajectoire allant de la conception (de l’écriture) à la mort. Ces sections sont ponctuées d’un choix de méta-épigraphes, certaines comiques, d’autres non, qui soulignent notre tendance à nous approprier et à recycler ce que d’autres avant nous ont dit. Comme le texte lui-même est truffé de citations, il est à la fois une discussion et un exemple de cette pratique.

En bref. Plongée dans un vertigineux tourbillon de miroitements entre lectures et écritures !

 

Lambert CASTELLANI, Grabide, Atelier de l’Agneau, coll. « Architextes », automne 2024, 96 pages, 18 €.

Point de vue éditorial. Grabide, écrivain obèse sans succès, fomente de sales coups pour nuire au Génral Génreux et au Captain Captieux, super-poètes officiels du bienveillant. La lutte de grabide, c’est celle contre le « toujours tout bien », contre ce déni contemporain du négatif.

Grabide le retourne contre lui, se détruit à la bouffe, ce qui mène à un surcroît de déjections jusqu’à l’explosif.

En bref. Un livre de COMÉDON, entre Kati Molnar et TXtiens, dans une collection toujours aussi exigeante.

 

Michel LAURE, À la lettre, Sorbonne Université Presses, en librairie depuis le 21 novembre 2021, 404 pages, 22 €.

Quatrième de couverture. Comment dire le réel sans le représenter ? Apparue dans le champ poétique à partir des années 1980, la littéralité s’est imposée comme une catégorie centrale de l’histoire de la littérature récente : elle sous-tend jusqu’à aujourd’hui de nombreuses pratiques littéraires et artistiques. Qu’elle désigne la recherche d’une écriture simple, minimale, voire tautologique, ou la création par prélèvement, duplication et montage d’énoncés antérieurs, la littéralité engage la question majeure de nos possibilités de dire le réel. Elle poursuit à ce titre l’aventure de la modernité propre au XXe siècle. À bien des égards cependant, la littéralité conduit plus loin : ses enjeux de contestation générique, de remise en question de la subjectivité créatrice et de critique des discours collectifs en font une notion indispensable à la compréhension du contemporain.

Emmanuel Hocquard et Jean-Marie Gleize sont les principaux jalons de cette histoire. Il leur revient d’avoir fait de la littéralité un outil et une catégorie, rendant ainsi visible, au tournant du XXIe siècle, un moment littéral de la poésie française. Cet essai s’attache à situer leur usage de la notion, à en dégager les pratiques et à en mesurer la portée.

En bref. De la modernité négative – label Orange Express Ltd – au « réelisme » de Jean-Marie Gleize, tout sur « le moment littéral de la poésie française », par celle qui fait partie des meilleurs spécialistes.

 

Jean-Claude PINSON, Vies de philosophes, Champ Vallon, en librairie depuis le 22 novembre 2024, 328 pages, 25 €.

Point de vue éditorial. Si les philosophes pensent, enseignent, écrivent, il leur faut aussi vivre, comme tout un chacun, quand bien même leurs vies, souvent, ne sont pas tout à fait ordinaires.

Des douze philosophes ici évoqués*, on ne se propose donc pas tant d’exposer les pensées ou les doctrines (sinon par la bande) que de raconter comment ils ont vécu – agi et subi les tourments de l’existence autant que ceux de l’Histoire (celle avec sa grande hache).

* Salomon Maïmon (1753-1800) ; G.W.F. Hegel (1770-1831); Giacomo Leopardi (1798-1837); Karl Marx (1818-1883); Gustave Chpet (1879-1937); Georg Lukács (1885-1971) ; Bernardo Soares (1888 ?-1934 ?) ; Martin Heidegger (1889-1976); Walter Benjamin (1892-1940) ; Alexandre Kojève (1902-1968); Hannah Arendt (1906-1975) ; Tran Duc Thao (1917-1993).

En bref. Douze exercices de style, douze stèles stylées, douze phares effarants, douze rhapsographies, douze vies par un maître en poésophie, douze poésiproses de virtuose…

 

Dominique QUÉLEN, Fiction tombeau / Ma phrase, Backland éditions, novembre 2024, 248 pages, 17 €.

Point de vue éditorial. C’est un livre construit autour de deux textes mis en miroir comme les deux faces différentes d’une même pièce. Le premier texte, Fiction Tombeau, est au sens littéraire un tombeau, un hommage très intime à son demi-frère décédé, texte de deuil que l’écriture permet de dépasser, de sublimer. Le second texte, Ma Phrase, est une sorte de contraire, une ode à la vie au travers de la langue et des questionnements qu’elle représente pour l’auteur.

Selon Manuel D., « Dominique Quélen est un funambule de la langue » : « cette main tendue au-delà des ténèbres – ce tableau en creux comme un autoportrait – quelque chose qui se situerait entre le Retable d’Issenheim de Grünewald et les derniers tableaux de Dieter Appelt – une sorte de passage du Styx – que l’homme comme l’auteur n’hésite pas à franchir régulièrement – pour nous guider de ses expériences – et nous ramener toujours vers la lumière. »

En bref. Où tout tombe : la forme-poème. Ce troisième livre de 2024 est tout aussi brillant que les deux précédents : Le Chant de la plinthe (Lanskine) et Poésie des familles (Les Hauts-Fonds).

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Fabrice Thumerel

Critique et chercheur international spécialisé dans le contemporain (littérature et sciences humaines).

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