Solo suite, Soizic Lebrat au violoncelle, texte de Fanny Chiarello, livre-CD, Mazeto square, en vente depuis le 22 novembre 2024, 20 €, ISBN : 978-2-38028-028-9.
À l’origine de ce livre-CD, le projet « Le paysage est une suite », qu’explicite le blog de la violoncelliste Soizic Lebrat :
« Quand Soizic Lebrat propose à Fanny Chiarello de l’accompagner en résidence à l’Abbaye de Noirlac, l’écrivaine pense à l’écriture d’un livret pour le disque à venir. Il s’agirait du parcours de la compositrice, de sa pièce Solo Suite, de l’œuvre de Bach que cette pièce prend pour matière première, à savoir la première Suite pour violoncelle seul ; il y serait aussi question du dispositif d’enregistrement imaginé par Soizic Lebrat et l’ingénieure du son Céline Grangey, peut-être de Noirlac et de son abbaye, plus précisément de l’abbatiale où aurait lieu la captation.
[…]. Faire suite, articuler le son et le verbe, inventer une dynamique et un flux qui dépassent la formule classique de la lecture musicale, générer une entité artistique hybride qui les relie aux espaces qui les accueillent.
Soizic Lebrat imagine pour sa composition un processus qui traverse la diversité de ses matériaux, puisés dans tout son répertoire, allant des notes baroques de Bach aux matériaux électroacoustiques. Ce cadre compositionnel accueille, selon un même principe, la voix de Fanny Chiarello, qui s’appuie sur les motifs et les obsessions de son parcours.
Ce duo cherche la frontière entre écriture/composition et improvisation. Un pari : ce qui les sépare est toujours flou, flottant, à être rejoué, à être déjoué. »
Le « poème graphique » de Fanny Chiarello, qui éprouve une véritable fascination pour « un langage plus subtil que nos phonétiques », propose avant tout la transposition d’un univers musical, celui de la première suite en sol majeur pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach, en un paysage érotique et extatique : texte et images, poésie spatiale et poésie rythmique nous transportent bel et bien dans une transe et une danse, tant cette œuvre « peut devenir / pour le public une porte d’embarquement à destination / d’autre chose » – et tant la poésie, comme la musique, est ouverture vers un « ailleurs enchanté ».
Déroutant au début, le texte dévoile ensuite toute sa subtilité : en fait, « Bach est un prétexte pour aller ailleurs »… (D’autant plus que la violoncelliste a trouvé sa voie grâce à Joëlle Léandre, au cours d’un master class où elle s’est lancée yeux fermés dans l’improvisation). Et toutes deux, Soizic et Fanny, sont en quête d’ « un lieu secret », musical ou géographique. Pour ce qui est de la poétesse, ses lignes de fuite, parallèles aux « lignes taillées au fil de l’archet », l’entraînent loin de toute tradition, mais paradoxalement lui font suivre un mouvement centripète : sa poésie spatiale et musicale tracent « les lignes de désir » qui la conduisent à rechercher les divers centres géographiques de l’hexagone, et par glissando de la borne marquant le centre de la France à la partition de Bach…