[Chronique] Aline César, Aphra Behn, Punk and Poetess, ed. Supernova

[Chronique] Aline César, Aphra Behn, Punk and Poetess, ed. Supernova

mai 6, 2021
in Category: chronique, livres reçus, UNE
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[Chronique] Aline César, Aphra Behn, Punk and Poetess, ed. Supernova

Aline César, Aphra Behn, Punk and Poetess, collection Dans le vif,  ed. Supernova, 2020, 51 pages, 15€, ISBN : 978-2-490353-45-3.

Il est des moments où, face à la biffure, aux creux, à l’anonymat déployé par les strates de culture, il est nécessaire de se réapproprier les figures tutélaires qui nous font être, comme des totems généalogiques de notre propre origine. C’est ce travail qu’accomplit Aline César. Un retour à l’une des sources de la littérature au féminin : Aphra Behn, car « le féminisme d’Aphra Behn n’a pas pris une ride en trois siècles« . Détour donc pour éclairer aussi le présent, pour en montrer certains aspects.

Aline César, dans ce court texte publié aux éditions Supernova, ne fait pas précisément travail de biographe, car « il ne s’agit pas de dépoussiérer », mais écrit les lignes de vie qui ont constitué Aphra Behn comme femme libre, libérée pour sa propre écriture et création. « Aphra Behn, nom de plume Astrea, première anglaise à vivre de sa plume, écrivaine la plus prolifique de son temps ». Ces lignes de vie, elle les constitue selon la prosodie de la ritournelle. Ici, il y a une proximité avec le travail accompli par Christophe Fiat, aussi bien dans son essai (La Ritournelle) que dans Héroïnes. « La ritournelle n’est pas esthétique, elle est pragmatique. On aurait tort de réduire la ritournelle à la prolifération de formes littéraires, plastiques et musicales » (Christophe Fiat, La ritournelle, p. 70). Tout le début, avec les paragraphes rythmés sur son nom de naissance et son âge, renvoie à ce que faisait Christophe Fiat. La ritournelle que suit Aline César détermine les étapes de sa courte existence (morte à 49 ans) et marque à quel point « Toute sa vie elle se bat contre les préjugés, et pour que les femmes, au même titre que les hommes aient le droit de s’exprimer« . On lit son parcours à travers les boucles de la langue comme s’il s’agissait d’un personnage romanesque, car la boucle ouvre à chaque âge de la vie de Aphra Behn, les champs de son propre combat, à quel point elle a dû lutter « décriée comme prostituée », ou bien accusée de « plagiat (…) d’être ambitieuse et impudique ».

La langue vivante d’Aline César, entre biographie, plongée littéraire dans le présent d’Aphra Behn, insert de ses créations littéraires et théâtrales, donne à suivre la révolution que représente en effet cette écrivaine du XVIIème siècle et pour quelle raison, après un long oubli, Virginia Woolf a pu la redécouvrir. Mais elle donne aussi à comprendre en quel sens Robert Gould, contemporain d’Aphra Behn, ait pu écrire d’elle : « For Punk and Poetess agree so Pat / You cannot well be This and not be That » (Car pute et poétesse vont si bien ensemble / que tu ne peux être l’une sans être l’autre ».

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Philippe Boisnard

Co-Fondateur de Libr-critique.com. Professeur de Cinéma en supérieur. Artiste numérique.

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