[NEWS] News du dimanche

avril 28, 2024
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[NEWS] News du dimanche

On commencera par réfléchir avec Patrick Beurard-Valdoye sur une forme actuelle de langagement. On découvrira ensuite le livre de la semaine à venir et deux autres d’avril, avant de riches Libr-brèves

 

Patrick Beurard-Valdoye : La poésie comme mise à nu des MACHINES À LANGAGES aliénants

Pour l’auteur de Lamenta des murs (Flammarion, avril 2024), « les poètes devraient fonder […] / un observatoire évaluant dénonçant / les actes de corruption langagière / par les administrateurs de langue ». Il s’agit de dévoiler « d’invisibles /  chaînes de langage » qui aliènent les subalternes (p. 90-91). Et de s’attaquer aux « administrateurs de langue » qui « préfèrent DIFFÉRENCIANT à INÉGALITAIRE » :

            qui lisent ou écrivent
USAGE PROPORTIONNÉ DE LA FORCE – ÉCOSYSTÈME ISLAMISTE – ACTIONS CONJOINTES – SYSTÈME PAR POINTS UNIVERSELS – PETIT DÉJEUNER DE LA MAJORITÉ – AMPLITUDE HORAIRE – QUARTIER AIRBNBISÉ – DÉTERMINATION TOTALE – COCKTAIL DE MESURES – DÉCUBITUS VENTRAL – CÉDÉTISTES – HOMOGAMIE ENTRE MAGISTRATS – DÉPOSITAIRE DE L’AUTORITÉ – ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTERPRO – DIVERGENCES ENTRE PARTENAIRES SOCIAUX – MONTÉE DES INÉGALITÉS – RETRAIT DE L’ÂGE PIVOT – MARÉE HUMAINE – PAYSAGE SYNDICAL (p. 84-85).

Notre Observatoire des Forces néo-libérales en fRANCE pourrait lui emboîter le pas…

PiloRIONS
le RÉARMEMENT (démographique, étronomique, etc.)
de l’Enfant-Roi qui aime encore jouer à la guéguerre !

la RÉSILIENCE programmée de tous ceux que
les bienfouteurs de l’homonculité veulent homonculer…

le SOCIÉTAL de tous ceux qui ne souhaitent
plus faire société

les VALEURS… qui sont toutes sauf actuelles !

 

Le livre de la semaine

Yves CHARNET, Lettres à Juan Bautista (vingt ans après), Au diable vauvert, en librairie ce jeudi 2 mai 2024, 400 pages, 22 €.

Présentation éditoriale. Été 2023. Yves Charnet replonge dans les lettres adressées à Juan Bautista de 2001 à 2006, avant qu’il ne devienne l’une des grandes figures de la tauromachie française. Les turbulents débuts du torero : brusque interruption de sa carrière en 2003 puis retour miraculeux en 2005. Un destin hors-normes s’écrit à la pointe des cornes. Jusqu’au triomphe du 15 août 2006 et sa légendaire faena sous le déluge de Dax.
Que reste-t-il de nos Années Bautista ? Vingt ans après, pareille recherche du temps perdu prolonge le geste littéraire de l’écrivain-matador Yves Charnet. L’afición est le fil rouge du poète égaré dans le dédale des temporadas d’après l’an 2000. À la poursuite de Juan B., le double impossible. De la crise de la quarantaine aux angoisses de la soixantaine, chaque vie d’homme finit par ressembler à une grande corrida.

Le point de vue de LC (Fabrice Thumerel).

Les écrivains transforment tous ceux qu’ils touchent
en fantômes. À commencer par eux-mêmes. Je pratique
obstinément cette spectromachie. Depuis mon enfance hallucinée (p. 95).

Nouveau chantier pour l’auteur de Proses du fils et de Chutes, nouvelle plongée dans « ce fatras des écritures intimes », nouvelle figuration de soi via une figure autre : « J’ai confié à Xavier mon désir de m’adresser à Bautista comme on écrirait à un ami. Selon le conseil égotiste de Stendhal » (p. 62). S’inscrivant en droite ligne des artistes matadors (Cocteau, Picasso, Leiris), Yves Charnet continue de « toréer l’intime » (64) en retravaillant ses « notes taurines » (12) du début de siècle, afin de brosser un (auto)portrait en garçon frêle à l’écriture aussi biscornue que possible. La corrida, cet « art magique », cette « poésie en plein air », cette « cérémonie de la mort dansée » (19). D’où un réseau métaphorique très développé ; un exemple parmi de nombreux autres : « C’est une bête furieuse, la colère. Un animal intoréable. Ce n’est pas la première fois qu’elle donnait des coups de corne dans ma vie. La rage » (342).

Le mélancolique « feuilleté du temps » (11) qui se dégage de ces pages écrites en free jazz (cf. p. 170) – idée chère à Jean-Claude Pinson –, empreint d’un certain antimodernisme, s’accorde bien à un air de fin des temps. Comme on peut le constater dans l’extrait suivant. /FT/

La débandade de notre République sans Carmagnole. Même les joueurs de l’équipe de France ne les connaissent plus par cœur. Les paroles de La Marseillaise. […] Les forêts brûlent en Grèce. Au Canada, en Algérie. Notre-Dame a brûlé le 15 avril 2019. Et les banlieues françaises après le meurtre du jeune Nahel, au début de ce mois de juillet 2023. L’incendie n’a pas fini de se généraliser. Sur cette planète en attente de dévastation. Il est devenu définitivement invivable. L’univers après la mort de ma mère. C’était elle. Le monde (p. 319).

 

Libr-livres d’avril

Christophe ESNAULT, Espèce invasive, photographie de couverture Aurélia Bécuwe, Milagro éditions, avril 2024, 78 pages, 10 €.

Présentation éditoriale. Série de fragments efficaces. Parodie d’écologie politique qui s’autorise la solution génocidaire idoine : en éradiquant l’espèce humaine avec art, la planète se portera mieux. Humour inadmissible et autres rires crispés (ou vivants).

Le point de vue de LC /FT/. « Soyez au courant / De la catastrophe / Avant tout le monde / Évoluez au coeur de l’événement » !
Comme l’espèce invasive c’est nous, on peut trouver que l’effondrement spectaculaire de notre monde-immonde n’a pas lieu… Encore un effort ! il nous appartient de précipiter les choses… Nous devons toujours être au cœur de l’action… Si nous ne le faisons pas, ce seront les IA qui choisiront une poignée d’humains pour représenter, voire sauver l’espèce.
Après tout, n’est-ce pas, « un monde viable est un monde où l’humain / A été délicieusement éradiqué » (p. 41)…

Vive la « grande poésie post-apocalyptique » ! Nous vivons du reste à l’ère du -post depuis un certain temps et l’éco-poésie règne en maîtresse… Et dites-vous bien que les « poèmes génocidaires / Participent d’un espoir débarrassé / De mièvrerie attendue / De bienveillance usée » (p. 15)…

L’ironie est décapante et la parodie hilarante : on rit de voir mise à nu la pensée écologiste radicale et de retrouver les excès de notre société de communication mondialisée. On reste néanmoins un peu sur notre faim. /FT/

 

Laurent JENNY, Sur l’instant, Verdier, avril 2024, 128 pages, 16,50 €.

Présentation éditoriale. La vie n’est pas un roman, plutôt une somme discontinue d’éveils. Laurent Jenny cherche à ressaisir ces « épiphanies », brèves et incertaines, rebelles à la cohérence des jours : scènes dans le Paris de l’enfance, visages croisés, visions hallucinées, dépaysements, génies des lieux qui se révèlent soudain, bonheurs sensibles, deuils, vertiges amoureux…

Ces instants laissent des traces de ce qui pourtant semble n’avoir jamais existé comme tel, des éblouissements dont les phrases de Laurent Jenny dessinent le chemin, entre clarté des mots et incertitude du vécu.

Le point de vue de Jean-Claude PINSON. Une phénoménologie de l’instant étoilée en fragments. De superbes phrases pour en accoucher, par le « développement verbal », le diamant, en ses multiples facettes épiphaniques.
Des lieux, des moments de vie (par exemple le récit d’un instant qui est « l’incarnation du bonheur new-yorkais »).
Une poétique qui n’est pas sans rappeler les propos de Barthes sur le haïku : « l’instant n’est pas intentionnel. Il ‘arrive’ « .
Une réflexion aussi sur la photographie; notamment sur son usage le plus contemporain : « … la vie constamment remplacée par son souvenir immédiat ».
Très beau, très juste portrait, également, de Pierre Pachet : « Homme bourru et malaisé qui m’intimiderait si un mélange caustique de brutalité et de finesse ne me le désignait comme l’un des non-conformistes absolus dont je cherche et souvent gagne l’amitié ». […] « Homme profondément religieux, non par la croyance, mais par l’acceptation d’un commerce avec les morts, du soin de leur mémoire, de leur passage. »

 

Libr-brèves

► Découvrez « Lyrique (saison 1, épisode 7)« , vidéo dans laquelle Lucienne Elstir rend hommage au cinéaste Jordan Belson.

 

 

SOIRÉE DE POÉSIE : vendredi 3 mai 2024 à partir de 18h30, salle des étoiles Halle des douves de Bordeaux : Lectures, lecture dessinée, lecture musicale. [Réservation gratuite]

La soirée de la Maison de la poésie de Bordeaux, intitulée de « Vivants à vivants » aura lieu le 3 mai prochain. A cette occasion, ce sont, pas moins de quatre lectures en solo, une lecture dessinée et une lecture musicale qui seront proposées, lors d’une soirée gratuite.
Loin des clichés sur la poésie, cette soirée proposera des lectures vivantes, dynamiques et intenses. Des voix actuelles de la poésie comme Miel Pagès, Christophe Manon, Marina Skalova, Antoine Boute liront leurs propres textes. De plus Charlotte Bonnefon et Marion Duclos offriront une lecture dessinée et la soirée s’achèvera par une lecture musicale avec Mona Malacar et les musiciens Titouan et Waagal.
Allant des thématiques de l’identité, de l’écriture de soi, de l’intimité, du corps, comme de la traduction, de l’invisibilité dans nos sociétés, les lectures s’enchaîneront joyeusement pour créer des moments accessibles, ouverts et de qualité. Le plaisir d’entendre de la poésie quel que soit son âge.

Vendredi 3 mai, Université Paris Cité : Poésie & Instagram 

Programme

9h – Accueil des participant·es et présentation de la journée

La communauté des instapoétes·ses

modération : Heiata Julienne-Ista (U. Bordeaux Montaigne)

9h30 – Niels Penke (U. Siegen, Allemagne) –  « Instapoetry as ‘emotional community’ » [en anglais]

10h – Camille Bloomfield (U. Paris Cité) – « L’enquête “Poésie & instagram : profils, pratiques et productions” : quelques résultats. »

10h30 – pause

Instacréations 

modération : Pascal Mougin (CERILAC, U. Paris Cité)

11h00 – Zoé Besmond de Senneville (artiste) – « En faire quelque chose » (projet en cours) – performance

11h30 – « Instanormes, instaformes – entre le réseau et les autres formes poétiques, allers-retours et influences” », table ronde animée par Caroline Giraud (poétesse), avec FX @sousletoitdu5 (organisateur du concours le Puy Poétique), Floriane Joseph (poétesse et chercheuse, Univ. Lille), Sélia Louise Château (poétesse, membre de @poetesses.gang).

12h30 – Cécile Châtelet (UC Louvain – Saint-Louis – Bruxelles) et Marion Siéfert (dramaturge) : « Discussion autour de _jeanne_dark_, une création sur Instagram »

13h – déjeuner

Pratiques et politiques

14h30 – Gaëlle Théval (U. de Rouen) – « De la poésie sauvage sur Instagram ? des écritures de rues à l’espace numérique »

15h00 – Clara Zgola (U. libre de Bruxelles, Belgique) – « Poésie intersectionnelle : politiques de visibilité et affects féministes »

15h30 – pause

Poétiques de résistances quotidiennes

(modération Liza Hammar)

16h00 –  Marc Jahjah (artiste, U. de Nantes) & Lou Dimay (artiste) : « Performance hypnographique »

16h30 –   « Pouvoir et tactiques de résistances poétiques sur Instagram », table ronde animée par Liza Hammar (UQaM), avec Selim-a Atallah (poétes·se, U. de Cergy), Clara Paris (UQaM), Maymouna Baradji (Beaux-Arts de Marseille)

17h30 – Discussions et clôture de la journée

 

 

► 

 

Adaptation du récit d’Arno BERTINA paru en 2017 :

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Fabrice Thumerel

Critique et chercheur international spécialisé dans le contemporain (littérature et sciences humaines).

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