[Chronique] Jean-Paul Gavard-Perret, Pour une nouvelle philosophie de l’Histoire (à propos de Jean-Louis Poitevin, Jonas ou l’extinction de l’attente)

janvier 23, 2021
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[Chronique] Jean-Paul Gavard-Perret, Pour une nouvelle philosophie de l’Histoire (à propos de Jean-Louis Poitevin, Jonas ou l’extinction de l’attente)

Jean-Louis Poitevin, Jonas ou l’extinction de l’attente, Tinbad Roman, éditions Tinbad, janvier 2021, 156 pages, 18 €, ISBN : 979-10-96415-30-4.

 

Poitevin propose une longue quête sous la forme des nouvelles aventures de Jonas. Cette version et ce visage apocryphes  permettent  d’animer et de remonter l’Histoire, ses meurtres. Là où la maltraitance des enfants – mais pas seulement – est un phénomène parmi d’autres.

L’auteur brode d’époustouflantes historiettes. Elles font comprendre combien il est difficile de se sauver de la folie meurtrière comme du remord. Tout semble pourtant avoir une fin au nom de l’amour que certains sauveteurs/sauveurs portent aux humains.

Pour autant rien n’est acquis dans une telle « théorapie » puisque le récit se termine par les dernières questions du « héros » dont le souffle dialogue avec la voix du narrateur. Preuve qu’entre eux je est un nôtre.

Pour en arriver là le discours démonte ce qui dans le réel d’ici ou de là-bas, d’hier ou d’aujourd’hui blesse, annihile, étouffe.  Le récit avance dans la délivrance et la séparation en un corpus à diverses entrées. Il possède une force franche, immédiate mais aussi poétique et à effet retour.

Il porte le virus mortel aux langages totalitaires qui ont « construit » le bouc-émissaire en accélérateur de l’histoire. Sous prétexte qu’il viendrait contrarier la pérennité de l’état-fort, absolu. Assumant néanmoins sa mission, Jonas tente néanmoins de rejeter la pensée qui enferme, retient.

Poitevin possède pour cela la lucidité nécessaire à un écrivain même s’il ne cherche jamais à rendre son « trait » intelligent. Il redonne vie à la philosophie dont il « change » la forme (selon une perspective chère à Jean-Pierre Faye.) Bref il l’extrait du contrôle mental qui enlève la vie.

L’auteur invente une autre impulsion, une autre direction à la pensée que celles de l’idéologie totalitaire. C’est pourquoi le texte est comparable à une sarabande pleine d’inattendus avec des enchaînements que le lecteur doit découvrir.

Là où il y eut les nazis et désormais d’autres émissaires de mort résistent des glorieux hommes du commun sous le bleu du ciel et sur celui de la mer. Certes, des croyances fétides reviennent par le futur et en un retour qui se fait par la guerre et le pouvoir de tuer. Mais le livre et sa pensée avancent contre les effets de lois scélérates que le XXème siècle déclina – entre autres et en quatre « exemples » à travers le fascisme, le nazisme, le stalinisme et le maoïsme.

Portant le faix et la profusion « confusible » des langages totalitaires, Poitevin montre comment résister à leur inféodation. C’est pourquoi cette vision reste la chanson de geste de la vie. Elle permet de visualiser des circonvolutions implicites jusqu’à former un immense oignon où se superposent bien des gangues. Face à eux demeurent l’espace et le temps dans l’assomption du sensible et de l’intelligence. Si bien que la fiction s’inscrit dans un avènement qui face au plomb d’une pensée mortifère vibre dans la forêt des lignes.

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Jean-Paul Gavard-Perret

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