[Livres] Libr-vacance (3)

août 30, 2021
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[Livres] Libr-vacance (3)

La rentrée / rentrée-littéraire n’existe pas : LIBR-CRITIQUE vous invite à faire le vide en soi des représentations dominantes… Avec CUHEL comme avec tous les RV à venir, et aussi la sélection de livres que nous n’avons encore pu présenter depuis 2020…

 

CUHEL : Demokratos, la Voix-du-Peuple

Nous les antivax hein
on n’est pas dans le pétrin
il nous prend pour des moins-que-rien
le Maréchal Putain
on n’est pas des étoilés mais des zéros
interdits de tous restos
notre seul péché
c’est d’affirmer notre liberté

Demokratos c’est tout gratos
on n’est plus des gosses
n’en déplaise aux gogos
de la démagogocrazy
nous on ne file pas droit
nous on réclame nos droits

d’être sensibles
à la circulation virale
là où tout n’est pas net

de faire prévaloir l’individuel sur le consensuel
le nombril sur le péril
les effets secondaires sur les besoins primaires

 

À chacun sa popote
sa popost-vérité
Go on
et vive Antigone !

 

Libr-brèves

► De l’exposition (jusqu’au 25 octobre 2021) au livre : « JE VOULAIS M’EN ALLER MAIS JE N’AI PAS BOUGÉ »  
MARC-ANTOINE SERRA 

« JE VOULAIS M’EN ALLER MAIS JE N’AI PAS BOUGÉ »  
MARC-ANTOINE SERRA 
C’est l’été, SALON DU SALON, Marseille, appartement avenue du Prado. Les personnages s’activent dans différentes pièces : dormir, se laver, manger, lire. Marc-Antoine Serra les a photographiés in situ et les photographies ont été exposées à la fois dans les pièces et dans les chapitres du livre. Le dernier chapitre contient un texte de Jean-Jacques Viton qui se trouve à la campagne ; le titre de l’exposition et du livre reprend celui d’un de ses livres publié aux éditions P.O.L /P. Munda/

EXPOSITION
 
« JE VOULAIS M’EN ALLER MAIS JE N’AI PAS BOUGÉ »  
MARC-ANTOINE SERRA 

PHOTOGRAPHIES DE MARC-ANTOINE SERRA
COMMISSARIAT D’EXPOSITION PAR P. MUNDA

DU 25 AOÛT AU 25 OCTOBRE 2021
VISITES PUBLIQUES DU JEUDI AU SAMEDI DE 16 À 19 H ET SUR RDV

OUVERTURE SAMEDI 28 AOÛT DE 19H À 23H59
DANS LE CADRE DE “GALERIE NIGHT” P-A-C

VERNISSAGE DIMANCHE 29 AOÛT 12H À 18H
EN PRÉSENCE DE L’ARTISTE MARC-ANTOINE SERRA, DU COMMISSAIRE PHILIPPE MUNDA
PERFORMANCE AVEC LES MODÈLES : 
MOUSSA BEN, RODRIGUE BOTOURATSI, ABDEL-SAMAD GUEZOULI ET THOMAS MIQUEL

SAMEDI 25 SEPTEMBRE 2021 À 20H : ‘PROPAGER LE POÈME’
LE CIPM CENTRE INTERNATIONAL DE POÉSIE AU SALON DU SALON
LECTURE D’UN TEXTE DE JEAN-JACQUES VITON PAR ÉRIC HOUSER

SALON DU SALON 21 AVENUE DU PRADO 13006 MARSEILLE FRANCE
INFO PRESE : +33(0)6 50 00 34 51  EDITION@SALONDUSALON.COM

 

► Du 8 au 19 septembre, Centre Pompidou Paris, Festival EXTRA !

À la Bibliothèque publique d’informations, ateliers d’écriture avec Sandra Moussempès et Christophe Manon.

 

► Mercredi 8 septembre à 20H, SACD Paris (11, rue Ballu 75009 Paris) : Anti-théâtre farouche

Entrée libre. Une générale qui sera aussi la première qui sera aussi toutes les suivantes et aucune autre…
« Je suis l’ennemi du théâtre disait Artaud. Nous aussi. Nous allons donc, après Antonin Artaud, Isidore Isou, Filippo Tomasso Marinetti, Yves Klein, et les autres, le foudroyer. Nous avons fondé un groupe de déstabilisation pour mener des actions coups de poing dans le corps du texte. »

Avec Valentina Fago, Jacques Dor, Gael Baron, Elisabeth Doll, Katell Jan, Cyril Bothorel, Antoine Kobi (distribution en cours).
Texte de Garance Dor en collaboration avec Pierre di Sciullo.
Réservations par email (merci de mentionner votre nom, prénom et le nombre de places) à : associationvroum@gmail.com

 

► Vendredi 10 septembre à 20H, Maison de la poésie Paris : soirée de lancement de la revue Catastrophes #3.

 

Dimanche 12 septembre à 14H : Revue VÉHICULE au MAD-éditions VROUM, fondation Fiminco (Romainville, 93)

Des lectures performées et des activations avec Yoann Thommerel, Pierre di Sciullo, Garance Dor et Vincent Menu.

 

LIBR-CRITIQUE attend avec impatience…

Collection « Al Dante » aux Presses du réel : à paraître, septembre-octobre 2021 :
• Poésie (format poche) :
Emmanuèle Jawad — « Interférences »
Vincent Lafaille — « Il a fallu apprendre à lire dans le noir »
Jean-Luc Parant — « Soleil des autres »
• Essais :
Yoann Sarrat — « Phonosophie et corporalité compositionnelle : l’art sonore de frédéric Acquaviva »
Michel Surya — « Principes pour une littérature qui empeste »
• Art contemporain :
Laurent Marissal — « Brecht & Brecht »

 

Libr-6 /Fabrice Thumerel/

► Véronique BERGEN, Icône H. Hélène de Troie, éditions Onlit, Bruxelles, printemps 2021, 288 pages, 19 €.

Présentation éditoriale. Icône H. projette au 21e siècle la légendaire Hélène, la « plus belle femme du monde » dont l’enlèvement par Pâris provoqua la guerre de Troie. Séductrice compulsive, elle élève au rang d’art son odyssée dans les plaisirs, son génie de l’érotisme.

Libr-commentaire. « Je m’appelle Hélène de Troie, je ne suis pas ce que mon nom dit que je suis »…
Enchantement et poison, dans cette nouvelle fantasmagorie que l’on peut encore qualifier de « biofiction », Hélène est sœur d’Eddie Sedgwick, Marylin Monroe et Janis Joplin… Une écriture bouillonnante nous plonge entre Eros et Thanatos…
Label HélèneTM : du mytho au scato… emportés que nous sommes par une écriture électrique !

 

► Suzanne DOPPELT, Meta donna, P.O.L, janvier 2021, 80 pages, 13 €.

Quatrième de couverture. 

Dans la petite ville de Galatina, dans les Pouilles, on peut assister à un curieux rituel de dépossession autour de l’araignée et sa morsure. Un exorcisme dansé et chanté, sur plusieurs jours, qui permet une forme de régulation de l’ordre social, de redonner un sens au désordre, de soulager les conflits individuels et collectifs. Le pseudo poison circule entre l’araignée, les musiciens, la famille et les villageois rassemblés pour la circonstance. Il faut s’identifier à l’araignée, danser comme elle le ferait puisqu’elle se déplace en dansant, pense-t-on, sur une musique effrénée puisque sa morsure est musicale. Il est question de pauvreté, de grande fatigue, d’ennui mortel, de conflits irrésolus, et de poison donc, d’envoûtement et de désenvoûtement.

Suzanne Doppelt s’inspire de l’extraordinaire petit film en noir et blanc de Gian Franco Mingozzi, Tarantula, tourné en 1961 dans le Salento, au sud de l’Italie. À sa manière, par des textes en prose poétique et quelques images qui jouent librement avec ces différents aspects, Suzanne Doppelt tisse une toile pour rendre hommage à cette cérémonie cathartique, ce rituel joué et symbolisé dont elle se fait l’écho aujourd’hui. Elle réinvente dans sa propre écriture ce théâtre arachnéen, magnétique au plus haut point, qui représente l’un des derniers cultes de possession en Europe.

♦ Sur Metaclassique, on ne manquera pas d’écouter l’émission d’une heure, intitulée « Mordre », consacrée à Meta donna de Suzanne Doppelt.

Libr-commentaire. D’une danse conjuratoire qui la fascine, comme à son habitude la poète va faire « un beau théâtre surnaturel ». Des virevoltes vertigineuses (« elle danse en imitant la rotation de la Terre ou celle de l’araignée ») on est transporté dans un monde de passages et de vibrations, un monde de métamorphoses et de correspondances baudelairiennes : « Une parfaite boîte à écho où se mélangent les couleurs les sons ceux aigus du système nerveux, les formes les figures celles d’un monde finissant »… Telle est la magie de l’écriture cosmopoétique, d’une écriture spectrale (comme « ghost dance ») qui fait apparaître l’image de l’araignée en son absence.

 

► Corinne Lovera Vitali, Coupe-le, éditions MF, coll. « Inventions », janvier 2021, 108 pages, 15 €.

Présentation éditoriale. Coupe-le  est une épopée à la première personne : celle d’une femme à la conquête d’elle-même. Le héros épique devient ici un Je contemporain qui chante ses aventures. Sa voie, longue et sinueuse, est celle des traumas amoureux et sexuels. Rien de lyrique cependant dans ce texte. Car c’est par le sexe et l’amour que s’exerce ici la domination. Chaque chant du livre est l’exposition d’une forme de cette domination et des efforts non toujours conscients et volontaires du Je pour la contourner ou la vaincre. La guerre, excepté à la toute fin, demeure innommée. L’énoncer comme telle, comme violence subie mais jamais dite, sera une des conquêtes majeures du Je-personnage.

La forme est de répétition litanique de blocs sans ponctuation. De longues apnées entre lesquels le lecteur respire avant de replonger dans le flux textuel et qui font de sa lecture une expérience autant physique que poétique et morale. L’ensemble constitue un récit non chronologique – fait de va-et-vient entre l’enfance et l’âge adulte – dont les péripéties dissimulent l’enjeu véritable : l’évolution progressive du rapport à soi du Je-sujet. Peu à peu, de manière discontinue, par sauts successifs qui ne vont pas sans quelques régressions, l’écriture du Je, et donc le Je lui-même, change. Il devient le sujet de ses actions et de ses phrases. L’histoire que coupe-le raconte est de manière indiscernable celle d’une écriture et d’un personnage : celle d’un Je dont l’émancipation suppose la transformation de la langue.

La coupure qu’énonce le titre est une des clés du livre. Elle est ce qui fragmente le personnage et découpe le flux textuel en blocs discrets. Elle est donc ce que le Je doit sans cesse suturer comme il doit sans cesse rassembler les morceaux épars de son moi et de sa vie. Mais elle est aussi le geste avec lequel il exerce finalement sa puissance. Le Je devient celle qui exerce la coupure, physique et textuelle c’est tout un. Elle écrit et en écrivant coupe et en coupant renverse la structure de la domination. Elle écrit et en écrivant rassemble et suture, se construit un moi qui peut agir et parler. La coupure est ce qui passe de la forme au sens, du texte au personnage, de ce qui est subi à ce qui est agi. Il faut lire coupe-le en respectant jusqu’au bout l’impératif de son titre : lire afin d’agir hors du livre. /Bastien Gallet/

Libr-commentaire. De « Vacarme » à « Coupe-le », en passant par « Lovers rendez-vous » et « Asphyxie »… Une vision du monde – et de ses relations de domination – à fleur de peau, dans une écriture âpre et obsessionnelle : « […] une odeur de Klute sent la peau seule or ces hommes n’arrivent pas à changer de peau or ces hommes n’essaient même pas ils sont collés à leur peau d’hommes-clients comme les animaux sont collés à leur peau mais les animaux n’ont pas le choix et j’offre le choix à ces hommes maintenant […] »… Une descente angoissée en soi, dans une langue écorchée à vif qui tourbillonne parfois sous la puissance de l’affect (pour cligner vers Deleuze) : « Je sais pourquoi je n’ai pas appelé Leo le 11 septembre enfouie dans le pli profond du moi ce puits qui est moi seul souffre et moi seul souffre solitude et moi seul souffre colère »… Le télescopage des mots pour exprimer le dur-à-dire : coupe le dire pour mieux dire, quitte à t’approcher du cri ! /Fabrice Thumerel/

 

► Jean-Claude PINSON, Sur Pierre Michon. Trois chemins dans l’œuvre, Fario éditeur, printemps 2020, 108 pages, 14 €.

Quatrième de couverture. “Des comprimés de magie” — c’est la belle formule par laquelle Giono qualifiait les Sonates de Scarlatti. De plus puissants, ajoutait-il, je ne connais pas, “ni qui, d’un si petit volume, puissent déchainer soudain une telle abondance de couleurs et d’images”. La formule pourrait valoir pour les récits de Michon, son art du bref, la force hallucinatoire des images que sa phrase fait surgir. 

Les trois études magistrales sur l’oeuvre de Pierre Michon que signe ici Jean-Claude Pinson sont écrites par un philosophe et poète reconnu, proche de l’auteur de Vies minuscules et Rimbaud le fils. Elles invitent le lecteur à parcourir l’œuvre de Michon en suivant trois chemins distincts mais entrecroisés : celui du religieux et du sacré à partir de George Bataille ; celui de l’amour et de ses temporalités en regard des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes ; celui des limites de la mimésis et du récit qui dévoile, en toile de fond, le dialogue secret qu’entretient Pierre Michon avec l’oeuvre d’Antonin Artaud.

Libr-commentaire. Le pari pinsonnien : révéler de façon désintéressée la beauté d’une œuvre qu’il a rencontrée avec bonheur – et dans laquelle il trace trois chemins avec pour guides Bataille, Barthes et Artaud. Le premier explore la négativité de cet univers, une expérience des limites dans une écriture sous tensions ; le deuxième montre que l’absence de roman d’amour chez Michon – en raison de son impossibilité même – laisse place à « une poétique du « rapt » » ; le troisième analyse le rapport à Artaud, par delà les apparences (« lisibilité critique » versus illisibilité clinique ; esthétique d’un Beau qui comporte une part d’effroi versus « esthétique du sublime et du ratage ») : chacun s’efforce « de porter la langue « à un point d’incandescence absolue » ».

 

► Xavier SERRANO, Pill dream, Flatland éditeur, coll. « La Tangente », février 2021, 104 pages, 8,50 €.

Quatrième de couverture. Dans Pill Dream, il est question de stupéfiants, de réseaux sociaux, d’une île mystérieuse, de bureaux aseptisés, de boissons euphorisantes, de dérives urbaines, de melting-pot, de dérives nocturnes et d’un jardin japonais. Mais pas seulement.
Nous y croisons trois personnages. Theo Voight, un employé quasi-modèle au service d’une multinationale pharmaceutique. Manuella Goldstein, serveuse de son état et rebelle jusqu’au bout des ongles. Sur la fin, il sera question d’un troisième homme, facteur X qui déboulera à corps perdu pour marquer le récit de son empreinte.
Entre deux non-dits, il n’est pas impossible que surviennent des visions et des voix parallèles. Le texte s’entrouvre alors pour laisser place à des fantômes connus ou perdus de vue, lesquels semblent exprimer le mal être des morts-vivants.
Dans Pill Dream, il y a Pill et toutes ses déclinaisons, c’est-à-dire cachets, pilules, capsules, pastilles, sachets, tablettes et dix mille manière de les packager ou de les consommer. Heureusement, nous ne les aborderons pas toutes.
Dans Pill Dream, il y a Dream, et forcément celui-ci tournera au cauchemar.
(Avec une postface de Jacques Barbéri)

Libr-commentaire. Dans cette dystopie rythmée par l’alternance de courts chapitres et d’intermèdes, dès son jeune âge Theo Voight « absorbe les éclats d’un monde s’autodétruisant et que les médias rabâchent à longueur de flashes ou d’éditions spéciales » ; devenu informaticien en poste dans le laboratoire Exnihilor, il assiste à « l’avènement du pathologiquement correct ». L’emprise du pouvoir technoscientifique est telle que « la peur même de la mort » est en passe de devenir « un concept périmé, une image peu troublante sur un tableau de Jérôme Bosch ou dans un film d’Ingmar Bergman »… C’est dire à quel point se révèle cauchemardesque ce monde high tech – dans lequel rôdent néanmoins de nouveaux types de migrants.

 

► Vincent THOLOMÉ, Mon épopée, éditions Lanskine, coll. « Poéfilm », printemps 2020, 132 pages, 15 €. [Extrait à écouter sur Libr-critique]

Quatrième de couverture. C’était à Dubna. Au centre atomique. À la cafétéria du centre. C’était il y a cinquante ans. À l’ère soviétique. C’était tôt le matin. Avant le travail.

« C’est un texte joyeux. Bordélique. Mêlant, sans se prendre la tête, fiction et poésie, sens et non-sens. C’est un texte venu de loin. Trouvé sur une brocante, un matin d’hiver, en Russie. C’est un texte à lire lentement. À haute voix. C’est quelque chose à porter en scène. »(Vincent Tholomé)

À coups de slashs, une écriture syncopée qui évoque un monde perdu, mais sans oublier de trouer la réalité de visions singulières : « je coudrai des lèvres à une chaise qui poussera le fondement d’une chèvre à sourire dans un pré où luira un tesson de verre blanc »… L’épopée antique/classique étant devenue impossible, il s’agit ici d’un patchwork et d’une polyphonie qui fulgurent.

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Fabrice Thumerel

Critique et chercheur international spécialisé dans le contemporain (littérature et sciences humaines).

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