[Texte] Sébastien Ecorce,   Coda, raptus (I)

[Texte] Sébastien Ecorce, Coda, raptus (I)

décembre 31, 2023
in Category: Création, UNE
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[Texte] Sébastien Ecorce,   Coda, raptus (I)

La condition préalable à toute véritable intimité est la distance.

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Les jours traînaient leurs lignes dans ma gorge.

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La petite valise ressemble à cette mémoire qui a traversé l’océan.

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L’obsession est absurde quand elle est une fiançaille avec « l’ornement ».

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« Vous avez le nez de votre mère », dit l’archéologue.

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Quelqu’un a dit que le mot est un monument de la relation. Comme une bague.

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Quelqu’un a dit que le deuil marque son propre temps en révélant les limites de la temporalité.

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La valeur n’existe qu’en référence à l’histoire.

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La boîte à mémoire se trouve en haut du placard dans ses dents de lait.

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En lisant le poème, elle s’est sentie comme un oiseau de proie.

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Mais à quoi sert l’oiseau ? L’oiseau ne sert à rien. Arythmique, les ailes souples se posent.

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La lettre est un risque pour son destinataire.

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Elle voulait faire coudre une réplique de la voix sur cette croix en bois dans un sac à main en soie.

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La lettre ne protège pas du sacré.

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Il faudrait lire un poème comme on lit un réquisitoire contre la romance, ou comment une femme échange son héritage contre une croix volée par un soldat.

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Je dois traduire une photo qui n’est déjà plus une photo.

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Ses mots grinçant comme des roues sur le même terrain.

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Le pire : le trou de ses oreilles est vide.

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Le visage fut frappé par quelque chose de muet que je ne voulais pas voir.

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Accepter la logique catastrophique – c’est le crime de l’histoire.

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Je n’ai pas accès à vos soupçons – et je ne les comprendrai jamais – je vous plains parce que, pour faire face à une déception, vous êtes obligé de détruire l’autre, celui qui a causé cette déception, si profondément devant vos propres yeux et ceux des autres.

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Elle voulait s’orner de l’histoire à laquelle elle n’avait aucun droit.

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Le temps et le lieu marquent la page et le poème, comme ils marquent la lettre.

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Peut-être qu’un brouillon peut être lu comme une lettre non envoyée ?

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L’incertitude méticuleuse entre les gestes, et ce mouvement qui offre le partage des souffles.

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L’existence est engagée. Un épistolaire secret.

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Il lui fallait un monde, un monde évoqué.

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La peur des mots ne consume pas les ombres.

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Le cauchemar insiste sur le fait que c’est le rêve qui écrit. S’écrit.

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L’insomnie, la peur de revoir ce visage sans visage.

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Si la mémoire n’est pas fiable, c’est qu’elle ne se déchire pas assez.

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La violence invisible donne naissance à des fantômes.

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Elle est coincée dans l’irrésolution de sa forme.

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Tu ne pourras te laver les yeux avec les yeux de la mémoire.

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Supprimer les images posées sur ta rétine forme encore un paysage.

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Cette crainte de l’image lumineuse, cette histoire cousue sous la paupière.

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Libérer les voyelles dans tout leur spectre de résonance et recréer des connexions depuis longtemps perturbées.

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Les lettres sont des petites oreilles qui bourdonnent à s’en crever les tympans.

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A ma surface, c’est toute une écologie qui se déploie.

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Il suffit juste de me lire comme un « Tout » neurologique.

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Tout semble en apesanteur sauf le bruit équidistant de l’oubli et de la mémoire.

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L’image parfois est une « vieille peau » qui n’obère pas la pierre du récit.

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L’envers de la lettre est une résurrection autant qu’une destruction.

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Son « Tu » est toujours situé dans le futur.

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Si le fantôme est plus bruyant que le vivant, l’adresse détruit le temps pour l’atteindre.

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La première note ne se confond pas avec la première voix.

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Sa mémoire était ce bouquet de lys du Cap qui sortait du cercueil vide dans une salle vide.

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Sa vie est une série d’occasions manquées, et il vaudrait peut-être mieux ne pas s’interroger trop longtemps sur elles, sinon les mots ne  pourraient jamais plus couler.

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« L’œil » comme un doigt frénétiquement sondé.

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La signature du corps antérieure à la rêverie de la lettre.

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La plénitude de la couleur veut le délassement de la lumière, le retour à l’intensité qui la fonde.

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Ce n’est pas de l’indicible, mais de « l’ininscriptible » ou ce qui ne peut être que simplement « informulable » par l’incapacité conjoncturelle de moyens. Ce qui « s’ininscrit » s’inscrit pas une autre forme de concentration.

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Il avait la tête fixée sur cette allure primitive, cette force inexpressive.

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S’accrocher à la création comme à un bas-relief sortant de l’éternité.

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Le pressentiment est une intuition qui a par trop appris son chemin.

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Il ne lit pas le déclin dans la « lettre », mais les signes encore furtifs de son épaisseur.

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Je veille à renverser des matières essentielles quand je m’efforce d’élucider mon amour.

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Les cicatrices synonymes de témoignages.

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Je pèche aussi par description présomptueuse. Je pèche par l’endurcissement d’une grande respiration.

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La topologie du retournement. L’eau absente. La pente de la « peau » retournée.

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La couleur du sang dans le « soleil » de la folie. Une question de « touche ». D’inclusion de lumière dans la chair. Une présence au-delà des « voies naturelles ».

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Je cueille l’ovule dans la neige de l’œil. C’est un signe du « dehors ». Un passement de jambes dans l’arbre de l’étirement.

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© Bandeau et photo en arrière-plan : C. Shiota.

G. Crewdson

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