En me faisant dispenser de sport à l’école, maman ne m’a pas rendu grand service. – Quel rapport avec Sade ?
« Le quatrième souper était réservé aux pucelles. On ne les recevait que jusqu’à quinze ans depuis sept. Leur condition était égale, il ne s’agissait que de leur figure [forme, allure générale, proportions du corps] : on la voulait charmante, et de la sûreté de leurs prémices : il fallait qu’elles fussent authentiques. Incroyable raffinement du libertinage. Ce n’est assurément pas qu’ils voulussent cueillir toutes ces roses, et aussi l’eussent-ils pu […] » Oui, j’ai ajouté des points de suspension, tant je suis ému. Sade à son début atteint d’emblée l’acmé de Rimbaud – avec l’avantage d’avoir vécu. Plus jamais il ne connaîtra cet état de grâce, et de fureur sacrée. Sa vie d’homme de lettres, d’écrivain érotique et érotomane, malgré ses audaces, ses trouvailles, ses découvertes, et une première apogée du roman et du romanesque qui s’incarne en lui, apparaît à son ancien émule comme une longue, tragique agonie. Descente en agonie l’histoire de Justine, dans ses trois versions, celle de Juliette sa sœur, qu’il s’agisse d’Infortunes de la vertu ou de Prospérités du vice, et cela jusqu’à celle d’Isabeau de Bavière, où la perversité balbutie – à leur instar toute l’Histoire, celle qui a survécu jusqu’à nous à travers les mailles de la Révolution, la grande, l’infinitésimale quant à ce qu’elle a fait de l’homme, même si elle a permis à Napoléon de libérer les Juifs. Longue agonie Le Génie du christianisme, même s’il a fait de Chateaubriand le grand écrivain des Mémoires d’outre-tombe, celles qu’en quelques Illuminations Rimbaud efface, et pas de commissions. De Gaulle dit avoir écrit les dernières pages de l’Histoire de France, il a raison, et tragiquement tort, elles sont écrites depuis longtemps.
[…]
Quand on a lu Les cent-vingt journées de Sodome, dont l’auteur, malgré le plan affiché, n’a pas poursuivi son ouvrage au-delà de l’introduction, féroce, et des trente premières, les anodines,
Tout est dit.
Pour le viveur commun, l’été est la plus belle saison.
Pour l’écrivain, c’est l’automne.
Mais pour le marquis de Sade, auteur des Cent-vingt journées de Sodome, c’est l’hiver, le luxueux hiver, les quatre mois d’hiver, de novembre à février inclus.
Ce n’est le printemps pour personne.
L’âge d’or est un mythe.
Le paradis perdu est un mythe mité, une calamité.
Quand on a écrit que l’homme étouffe, rien n’interdit de dire que l’homme respire enfin.
« quelle chute de reins, quelle coupe de fesses, que de blancheur et d’incarnat réunis ». Entre Ovide et Tony Duvert. À l’honneur du « plus beau cul du monde », qui deviendra un poncif ravageur.
Les liaisons dangereuses sont l’accord du participe passé.
Entre la lune de miel érotique de mes vingt-cinq ans où Sade fut illustré, sans une seule image, et le vieux garçon, old boy, je comprends mieux que sur Wilde pèse l’ombre tutélaire de Sade.
En hommage à celles qui m’ont tout donné, maman, Chantal, Joëlle.
De ma dentellière (celle de Pascal Lainé, améliorée en Sade) à mon mannequin junior,
twiggy dont les ramilles sont mes ramifications.