[Création] Joël Hubaut, ÉpidémiK (14)

août 27, 2020
in Category: Création, UNE
0 496 1
[Création] Joël Hubaut, ÉpidémiK (14)

Pour cet automne 2020, chers Libr-Lecteurs, vous disposerez d’un objet littéraire déconcertant et bouillonnant, d’une rare vie singulière : la somme épidémike de Joël HUBAUT, écrite dans les années 70 – et introuvable. [Lire le treizième texte]

Dans INTER-ACTION C.L.O.M. (Joël Hubaut) (Le Clou dans le fer, 2007), Philippe Boisnard rappelle que, pour lui, « le terme d’épidémiK, loin de s’entendre au sens viral, doit s’entendre selon le principe d’une cancérisation » (homogénéité vs hétérogénéité). [Lire sur LC : « Lissez les couleurs »]
Fabrice Thumerel : « Étrangère au style comme appropriation idiolectale de la langue, la cancérisation épidémik fait sortir la langue de ses gonds. Dans lissez les couleurs ! à ras l’fanion (Al dante, livre + CD, 2003), à la mollesse de la « langue pure moulée à la louche », le poète excentrique oppose « une langue libre démoulée » » [cf. « Poésie, musique et chanson dans le champ poétique contemporain »]

 

… l’épidémie expulse les graines par le chargeur glissant le long du porte-bagages les bactéries sursautent proliférant entre les fesses dans le foin dans les barbelés collant les épluchures sur la toile avec les traces épidémikes fixées dans le gras recouvrant les mailles du soutien-gorge avec la bite qui décharge l’épidémie mord la bite dans le bonnet avec les tétons qui se répandent les grains de beauté en forme de croix cercle flèche triangle etc. bloqués dans la peau avec la prolifération l’épidémie écorchant les mamelles claquant la portière puis se faufile dans le moteur s’échappe par les gaz stabilisés s’effritant dans l’herbe recrache les signes dans les tiges les orties se tordant qui font éclater aussitôt le germe qui se répand par les orifices entre les mottes les paquets agglutinés dans les terriers le gargouillis d’entre les fleurs les pétales mordus par flocons signaux comme des copeaux une pluie de formes multicolores flottant dans l’air neige épidémike fouillant les sillons s’injecte dans les pommes de terre la purée épidémike atteinte les chancres qui vont éclore aussi dans la bouillie par les globules aspirent les signaux toutes les sortes de formes comme des insectes accrochés à la peinture la boue en rondelles dessinées toutes les notes les bulles épidémikes assaisonnent l’espace à fiel ouvert les prières en alvéoles lâchées du cerveau jusqu’aux allumettes des cheveux qui s’enflamment enfumant l’égout mental puis se bloquent dans le siphon qui distribue l’épidémie dans le réseau universel par tous les pipelines avec la rosée et lèche la toile en longeant les burins du crâne même la flaque grise grouillante de vermine qui s’enroule indéfiniment l’épidémie en rotation permanente qui prolifère dans le lavabo terrestre stratifie les caillots de sang en forme de triangle cercles flèches croix bâtons etc.
Grande maladie d’épidémie de mémoire pour s’éclater dans les cristaux des yeux les tubercules rougeâtres gorge vague haletant comme le pinceau cahote les reflets le bourgeonnement répandu fouette et toute la jungle épidémike par l’écriture-méduse s’imbibant dans les pores de la toile l’ongle du crayon griffant aussi le papier par signes épidémiks la lumière entre les formes goutte à goutte toutes les couleurs comme des baisers sur fond gris poussière en lave dessinée sur l’écran des minutes de gouffres la cendre au niveau des lignes chair – signes de ride des traces quotidiennes sur le corps des étoiles qui flottent dans la piscine en grumeaux boue maladie de crotale dans la pâte la houle noire des doigts à brosse en lame absorption des plantes le ciel dans sa fuite aussi par le vent de mouche jeter les épines dans l’espace pleuvant les hoquets marqués avec les gélules gaze-frange dévorant le cervelet par les hublots la crème à la gaine du fusil par grappe crâne citerne d’épidémie les cônes des signes comme des becs mêler les convulsions les araignées acryliques avec la bouche qui crache mon épidémie qui explore la lumière par éjection d’ovules des jets de signes comme des algues qui pourrissent le cadre s’étendent dans l’aube noyée sur fond négatif des milliers de miettes d’épidémie par le trou du souffleur dérivant vers les extra-terrestres empilant les gerbes de formes les molécules colorées qui dégoulinent dans le vagin du sablier s’écoulent comme des poissons vidant la mémoire une végétation de pistil sous la peau émeutes de têtards par la galaxie la toile couverte de perles torturant la raison l’épidémie alors pulvérise l’espace avec les étiquettes de l’électrocardiogramme l’épidémie se répand avec encore plus de passion entre les feuilles bulles sanglantes se précipite dans la brèche le sang qui afflue à l’extrémité du tube les globules dans l’orifice du toboggan hurlement avec l’haleine entre les sondes en forme de fourchettes à escargots le coeur par rafale collant au papier avec le hache-oignon anti-larmes les signes crevant la lumière en spirale l’épidémie comme des morpions jusqu’au fond de la plaque chauffante les sirènes tue-tête insectes et globules dévorant le papier les formes augmentent dans la matière du cerveau compressé par la densité du jet alternatif avec l’albumine épidémike pinceau-caméra prostré sur l’infini allume éteint le pare-brise à tendresse des traces de respiration collées par fureur forment une super-mosaïque sur la toile universelle l’odeur du piétinement continuel qui donne l’orgasme permanent fait vibrer les intestins sur le tamis des origines secoué sans relâche le corps en vibration constante s’enfonce par devant puis par derrière glissant au ralenti dans la cervelle qui s’épure presque immobile comme une huître avec ce moteur à fond qu’on dirait au point mort ou qui sommeille exécutant le dénouement intemporel puis pompe les torsions raclant les images dans le pot jusqu’à les rendre visqueuses avec des équerres des règles des compas dont la rigueur reste en relation immédiate avec le pouls qui bat dans le congélateur gèle les signes et les moignons épidémiks avec la langue l’éruption de déchet tous les signaux la rage d’empreinte sur la bande de liane vidéo jusque dans la soudure de l’éternité collant les pièces de la fourmilière au-dessus du sol les signes d’oiseaux-nuages à zéro pépites accumulées par la main emplir les bidons d’épidémie avec une couche de pellicule noire tache de rousseur jusqu’au volcan qui crache la peinture dans les pattes de scarabées les chewing-gums enregistrés avec le séisme des nerfs étendus sur le papier empli de traces brosses au rythme des tempes rongeant l’image détecteur de quotidien l’épidémie de lentes panne secrète du temps des larmes comme des quenelles au bord de l’âme la poche de rêve brune les crocs longeant la couture jusqu’au corset lèche la pelle les gencives sous les draps lueur de lavis opaque sous les os la pulpe et le beurre nu collant à la tenture des boutons-prépuces éjectés du goulot l’épidémie entre les jambes le silence des sigles bègues qui mouille l’océan du coma le nerf respiratoire rempli de pollen épidémik avec le blues des formes triangles croix cercle flèche carré appel céleste – Dessin d’astre ébloui – avec les couleurs de détresse l’ombre en position de drame par inflammation des traces saupoudrées la peinture enceinte qui se coagule et les bêtes timides qui hurlent échappées des prototypes avec les crinières barrant le crâne empli de vers de furoncles sous les plumes l’épidémie en débris sur l’ordure avec les ciseaux vaporisés dans l’horizon l’espace épidémique comme un flot proliférant une saga obstinée qui décape le cosmos puis pose les tessons d’écriture dans les vitres de l’eau-de-là corrigeant les reliquaires poncés dans les météorites des peaux mortes collées dans le vide confettis moisis englués dans les cahiers de l’art ornés du temps obscur en répétition le plein noir inextricable d’un voyage permanent de voltige balançoire épidémique entre les ronces avec les bourdons les guêpes les puces contagieuses et les tensions qui restent en survie dans les mousses poreuses des pluies du coeur par où s’échappe le fracas de tendresse éclaté par concentration lumineuse échouant dans le silence mutant l’épidémie verbale branchée sur l’univers d’où jaillissent mille formes projetées magiques vaporisées dans les transes jusqu’à la cassette avec l’épidémie mentale à thermostat récitatif qui cogne dans les murs éclate dans l’éponge qui étrangle le miroir avec les caillots rouges en charpie qui dansent dans la page où se noie un désir d’expansion permanente en polaroïd plein feu puis s’écoule dans les larmes comme une potion gonflée de paroles gémissantes qui reflète l’insomnie éternelle puis s’agrippe à la chair mord. etc. etc. etc…

« Epidémie d’infection émotive », poème paru dans la revue L’oeil lisant
(à côté de ce que vous êtes en train de lire), mars 1977, édition B & J. Froidefond.

Visuel et poème paru dans la revue L’oeil Lisant en 1977. Joël Hubaut

, , , ,
librCritique

Autres articles

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *